Comme toutes les vieilles entreprises, Warner Bros. respecte l'obligation des traditions. Après chaque sortie proposée par l'entreprise, en particulier dans le cadre des adaptations de la marque DC Comics, le Hollywood Reporter, ou une autre antenne bien informée, publie l'habituelle enquête accablante mettant en lumière les réalités souvent macabres ou sordides de l'envers du décor. Le fait que Joker ait reçu un accueil critique favorable, ou soit en bonne voie pour devenir l'une des adaptations de comics les plus rentables de tous les temps, n'empêche pas les habituelles réjouissances de backstage de s'opérer - vous n'en avez pas envie, nous non plus, mais, c'est un petit peu comme ces fêtes de Noël entre tontons racistes et cousins dans la finance, on ne peut, hélas, pas décemment y échapper.
Dans un papier récent, THR sera revenu sur les dissensions provoquées par le projet de Todd Phillips, en particulier du côté de Jared Leto. La colère de cet ex interprète du Joker, apparu dans le film Suicide Squad de David Ayer, avait déjà été rapportée par d'autres articles. Le Hollywood Reporter aura depuis contacté quelques sources proches du dossier pour revenir en détails sur la façon dont l'acteur et musicien aura, tout bêtement, tenté de faire interdire le Joker de Todd Phillips en amont de son développement.
D'après l'enquête, Leto aurait commencé par se plaindre à ses représentants (de la respectable agence d'acteurs CAA), avant d'appeler son manager Irving Azoff, furieux, en lui demandant d'entrer en contact avec les patrons de Warner Bros. - autrement dit, d'aller se plaindre aux patrons de Time Warner ou AT&T. L'idée était de leur demander de tuer le Joker de Phillips, à une époque où le comédien était encore sous contrat pour un film solo' et un éventuel projet Joker & Harley Quinn qui n'aura, vraisemblablement, pas vu le jour depuis. Paradoxalement, les manigances de Jared Leto seront intervenues dans la foulée d'une autre feuilleton médiatique, après l'avoir vu se plaindre de façon répétée de sa présence dans Suicide Squad, amoindrie par le montage de David Ayer.
Du côté de Warner Bros., l'immense refonte philosophique survenue après Justice League n'en était encore qu'à ses débuts - au moment de commencer à évoquer le film Joker, Ben Affleck n'avait pas encore quitté le rôle de Batman et la suite des opérations semblait particulièrement incertaine dans l'exploitation de la franchise DC Comics. A ce sujet, le Hollywood Reporter explique que le studio caressait encore l'idée de garder Leto à portée de mains, voire même que certains producteurs en poste auraient volontairement proposé un petit budget à Todd Phillips dans l'idée de l'effrayer ou de le faire fuir, ou, craignant son approche trop sombre, de prendre le moins de risques possibles.
Une piste confirmée récemment par une enquête du New York Times, qui aura révélé récemment que Warner Bros., apeuré par la tonalité du script présenté par le cinéaste, avait opté pour un partage des coûts de production avec les studios Village Roadshow et Bron Studios, pour réduire autant que possible l'investissement financier.
En résumé, un acteur furieux, qui aura d'ailleurs viré ses agents de la CAA pour changer de représentants (estimant que ses précédents collaborateurs auraient du lui parler du projet Joker plus tôt) et un studio qui n'aura cru que d'assez loin à l'idée de Todd Phillips, et qui se place aujourd'hui en héros de la création authentique contre la manufacture Disney, en réécrivant l'histoire et en oubliant pas mal de leurs propres doutes. Loin d'être fâchés, Warner Bros. et Jared Leto travaillent toujours de concert : l'acteur, après s'être consolé auprès de ses fans sur son île de gens en toges, a signé pour le film Little Things produit par le studio.
De son côté, Joker devrait prochainement passer la barre des 700 millions, et le dernier reste du clown de Suicide Squad devrait être une prestation de figurant (à la Shazam) dans le film Harley Quinn (and the Fantabulous Emancipation of One Harley Quinn) en février prochain. On a envie de dire que tout le monde y gagne, même si l'habituel portrait du producteur frileux sort - une fois de plus - renforcé après toute cette histoire. On remerciera au moins Kevin Tsujihara d'avoir tenu bon.