Suite à la mise à pied de Bob Chapek, l'organigramme interne de Disney risque bien d'être refondu une nouvelle fois. La société avait déjà subi, après le départ initial de Bob Iger il y a deux ans, une sorte de grande réorganisation censée faciliter les prises de décisions venues d'en haut, et supprimer les intermédiaires pour placer l'ensemble des départements sous le contrôle direct de l'ancien (nouveau) président. Une conception verticale de la hiérarchie qui n'avait pas été sans poser problème à de nombreux lieutenants habitués, sous le règne d'Iger, à davantage de liberté. En particulier pour les studios Pixar, placés sous un contrôle particulièrement rude lors de ces quelques dernières années.
Le nouveau président (ou l'ancien président nouveau - on se paume 'voyez, déjà que les deux ont le même prénom) réinstauré à la tête du groupe Disney compte remettre en état le modèle précédent. Dans un mémo interne à la compagnie, Bob Iger explique que lui et ses équipes planchent justement à la mise sur pied de cette nouvelle organisation, qui devrait rendre aux créatifs et aux départements attachés à la production de contenus originaux leur autonomie d'antan. Une décision qui risque donc de pousser vers l'obsolescence certains postes importants au sommet de la pyramide, créée par Bob Chapek pour prendre les décisions à la place des studios.
A commencer par l'exécuteur des hautes oeuvres
Le principal concerné s'appelle Kareem Daniel, bras droit de Bob Chapek et homme de confiance de l'ancien grand patron. Celui-ci avait été nommé à la tête du pôle Media & Entertainment Distribution pour les prises de décisions relatives aux supports et aux stratégies de sortie des différentes productions originales du groupe Disney. Autrement dit, le principal décisionnaire dès lors que se posait la question de réserver un contenu aux salles de cinéma, ou bien à la SVOD via la plateforme Disney+. Kareem Daniel aurait ainsi joué un rôle essentiel dans l'évolution récente du groupe Disney, de plus en plus tourné vers l'industrie du streaming au détriment progressif de l'exploitation en salles, contre l'avis d'une partie des studios. Là-encore, les équipes de Pixar avaient été particulièrement sonores sur le cas réservé à certaines de leurs sorties récentes, avec l'exemple du film Red Alert.
Si Bob Iger a bien été le premier architecte de la plateforme Disney+, Bob Chapek n'avait jamais caché de son côté le statue de favorite réservé à cette antenne de SVOD après la crise du COVID-19. La pandémie et la fermeture des salles de cinéma auront bien entendu favorisé le développement du streaming à grande échelle, mais le recul progressif des contaminations et la réouverture du circuit d'exploitation traditionnel n'aura pas particulièrement aidé certains films à retrouver le chemin des salles.
En l'état, il serait assez logique d'interroger le rôle de
Kareem Daniel lors de l'étonnant bourbier
que fut la sortie du long-métrage Black Widow de Cate Shortland - une oeuvre distribuée au cinéma et en SVOD sans l'accord de la production. Cette décision fut à l'origine d'un bras de fer extrêmement tendu entre
Disney et l'actrice
Scarlett Johansson, et manqua même de se régler devant les tribunaux avant que
Bob Chapek ne finisse par céder.
A voir comment Bob Iger, de retour aux affaires, considérera l'état du marché et les futures décisions relatives à l'exploitation des productions actuellement en développement. Autre nouvelle à retrouver dans le mémo rédigé par le nouveau ancien nouveau président qui est nouveau, la potentielle mise à pied de nombreux employés du groupe Disney suite aux pertes épongées ces quelques derniers mois. Après avoir subi un revers douloureux à la bourse de Wall Street récemment, l'entreprise avait déjà présenté le retour d'Iger sous l'angle de la nécessité d'un capitaine fiable à l'approche de temps difficiles. Ce qui signifie, moins que pour les cols blancs et les plus hauts gradés, des charrettes de licenciements à l'horizon. Les présidents changent, mais les leviers de résolution de crise restent généralement les mêmes.