Le procédé n'a plus de secret pour les fans ou les observateurs les plus avisés : après une tournage, voire pendant les prises de vues, sont organisées plusieurs sessions de projections tests opérées autour d'un premier montage témoin. Une occasion pour le studio et le distributeur de prendre la température d'un film auprès d'un public cible, de mesurer l'efficacité de certains effets, la compréhension ou l'incompréhension éventuelle de l'intrigue générale, et si le montage de la version cinéma devrait insister davantage sur un angle plutôt qu'un autre. Rien d'outrageant sur le papier.
Cela étant, il est de plus en plus fréquent chez les producteurs mal intentionnés que ces projections, plus ou moins bien orientées, servent d'argument pour faire pression sur un cinéaste et imposer une ou plusieurs ingérences créatives. En vendant l'idée aux équipes artistiques que le film n'aurait pas plu dans sa forme actuelle, ou, dans le cas du Annihilation d'Alex Garland ou du Lucy in the Sky de Noah Hawley, que le scénario serait tantôt trop sombre, tantôt trop complexe à aborder pour un spectateur lambda. Si Garland aura par exemple eu gain de cause contre Paramount, grâce au soutien de certaines grosses têtes d'Hollywood, Hawley, créateur de Legion, aura à l'inverse été forcé par Fox Searchlight (ou Disney) de retourner une partie du film pour le rendre "plus simple" suite aux projections tests.
Dans le cas de
Warner Bros., on se souviendra
du cas très similaire de David Ayer, parti au départ vers un angle de polar pessimiste et rattrapé par le studio suite à des projections tests, qui orientaient le montage de
Suicide Squad sous un angle de comédie. La direction que prendra le projet suite à ces nouvelles directives entrera dans la légende des cas de mauvaise gestion à Hollywood dans cette catégorie d'adaptations à licences.
Avec
Birds of Prey, le studio semblait décidé à expérimenter,
avec un film moins cher et vraisemblablement plus esthétique ou moins semblable à l'offre concurrente. Reste à espérer que
Warner Bros. ne compte pas répéter les fameuses ingérences de production qui auront formé la malencontreuse saga
Justice League, rattrapée par l'appât du gain et l'envie de faire du
Marvel contre l'avis des créatifs. A voir selon comment s'orchestreront les phases de tournage additionnel, si celles-ci ont bien lieu.