
Ce n'est pas encore pour cette fois. La rédaction de Deadline publie un article pour faire le point sur l'humeur du moment pour la présidence du groupe Warner Bros. Discovery. Pour résumer ? La fusion avec Paramount Skydance ne devrait pas avoir lieu, en définitive. Apparue (par surprise) dans une actualité qui semblait pourtant s'être (enfin) tranquilisée sur le front des fusions et acquisitions de capitaux dans la petite oligopole de l'audiovisuel américain, l'idée avait été évoquée dans la presse selon ces termes : le clan Ellison (Larry, David, Megan) avaient manifesté leur intention de racheter Warner Bros. en septembre dernier, pour intégrer les actifs du conglomérat au sein de leur propre appareil productif, Paramount Skydance.
Cette opération de grande ampleur aurait pu accoucher d'une nouvelle superstructure sur la colline de Hollywood, si la fusion avait été officialisée.
Selon la rédaction de Deadline, la somme proposée par les Ellison a manifesement été jugée insuffisante par la présidence du groupe Warner Bros. Discovery. Et en filigrane, on comprend aussi que son président, David Zaslav, a surtout envie de faire monter les enchères. Toujours le mois dernier, la rédaction de Puck avait évoqué la piste d'un autre acquéreur potentiel, Netflix, pour entrer dans cette course folle. Sauf que, selon toute vraisemblance, et les quelques avis compétents recueillis sur le sujet, tout ceci serait en fait parti d'une petite manipulation de la part du PDG de Warner Bros. Discovery - lequel aurait en réalité profité d'un prestigieux combat de boxe diffusé sur Netflix (Canelo contre Crawford) pour aller s'entretenir avec Ted Sarandos... et planter la graine d'une rumeur de négociation probablement infondée.
Quelques semaines plus tard, Greg Peters, le second aux commandes du navire Netflix, avait expliqué que son entreprise n'était pas intéressée par cette perspective de fusion. En somme, Zaslav aurait donc manipulé la presse spécialisée, peut-être pour obtenir un meilleur prix de la part de Paramount Skydance... ou bien, et c'est une autre théorie crédible, dans l'espoir d'attirer le moindre gros poisson qui nagerait dans les environs. Le président de Warner Bros. a toujours prévu de vendre l'enseigne. Se pose seulement la question du montant, et de son propre avenir. En théorie, les Ellison n'avaient pas prévu de lui proposer un poste important une fois le rachat entériné... et, oui, si vous vous posiez la question, l'avenir de tout un secteur et de plusieurs milliers de salariés peut aussi se jouer sur ces considérations extrêmement égocentrées. C'est moche mais c'est comme ça : Succession n'est pas qu'une série télévisée.
Alors, quelle suite pour l'un des derniers géants du cinéma ? Pour l'heure, pas grand chose. David Zaslav et sa horde de lurons vont poursuivre le chantier de séparation du groupe en deux entités distinctes (et le mouvement devrait probablement se propager au reste de l'industrie, avec une société pour le streaming d'un côté, et une société pour la télévision linéaire de l'autre). Dans un communiqué de presse, le PDG confirme que son groupe est toujours disponible si quelqu'un se sent l'envie de mettre la main au portefeuille. Et de ce point de vue, Deadline envisage quelques pistes crédibles : si Netflix n'est pas intéressé, pourquoi pas Apple ou Comcast ? La porosité des lois anti-trusts n'en sont plus aux premières limites de leur modèle bancal. Dans le même temps, une théorie comparable persiste du côté du groupe Disney chez certains observateurs bien renseignés, et le nom d'Apple avait même été prononcé plusieurs fois comme perspective crédible d'une porte de sortie pour Bob Iger au sortir de ces longues années de crise.
Bref, pour Hollywood, la consigne "vite vite, il est l'heure de se faire racheter" semble faire un vrai retour en force, et ce malgré la disparition progressive des anciens grands studios, fondus dans les interstices et les portefeuilles d'actifs de conglomérats toujours plus gros, comme pour la Fox ou la MGM, depuis une petite dizaine d'années. Et dans le même temps, pour rappel, si Paramount Skydance se présente encore comme une enseigne spécialisée dans le cinéma, une partie de l'argent investi pour la création de cette structure provient (encore une fois) du secteur de la tech'. Des industries Oracle, dans le cas présent. L'avenir du cinéma et de la télévision aux Etats-Unis va-t-il devenir la propriété exclusive de ces géants de l'informatique, de la téléphonie et du service ? A voir.