Paradoxalement, au cinéma, les bonnes histoires peuvent naître sur la base des films ratés autant que des films réussis. Et c'est vrai : séries B aux profils chaotiques, montées dans un bordel constant, sur des budgets parfois grotesques, en devant composer avec l'ego des uns et des autres... certains se passionnent pour l'excavation de ces plantades (parfois charmantes) du cinéma des blockbusters en mousse molle.
Or, quel meilleur exemple que La Ligue des Gentlemen Extraordinaires pour cette catégorie précise ? Un produit plutôt intéressant, composé sur la base du chef d'oeuvre d'Alan Moore et Kevin O'Neil, que l'on peut finalement comprendre comme le chaînon manquant d'une certaine période, pour les productions tombées entre la fin des années quatre-vingt et le milieu des années deux mille. Quelque part entre Wild Wild West et Pirates des Caraïbes, en somme. Pour les détails, la vidéaste Meeea est repassée sur cette impressionnante source d'anecdotes curieuses.
Réalisé par Stephen Norrington, déjà responsable du premier film Blade pour le cinéma, l'adaptation de la Ligue des Gentlemen Extraordinaires représente un cas particulier dans la liste des films basés sur le travail d'Alan Moore. Dans le sens où, si tous les autres auront tenté d'emmagasiner un peu du génie sarcastique et métatextuel de l'auteur britannique... de son côté, Norrington et sa bande ont préféré prendre le produit au premier degré. Or, adapter la Ligue au premier degré, c'est un peu l'équivalent de produire les Avengers de la période victorienne. Sur le papier, pourquoi pas, mais on risque forcément de louper une ou deux nuances de lecture au passage.
Meeea recompose avec adresse, humour, et une impressionnante dose de recherches (mais aussi de mise en perspectives : en retraçant bien toute l'histoire éditoriale du film, on comprend globalement que celui-ci marche comme le troisième volet d'une tétralogie entamée avec Wild Wild West, pousuivie avec From Hell et terminée avec Van Hellsing) le parcours de ce produit finalement assez intelligible, si l'on veut bien le prendre sous le bon angle.
Entre certains ajouts que Moore n'aurait sans doute pas désavoué (un Dorian Gray du plus bel effet, notamment), un profond respect sur d'autres points précis (le fait d'avoir voulu conserver un Capitaine Némo indien, donnée qui aura posé problème sur certaines autres adaptations du chef d'oeuvre de Verne) et une bonne dose de blockbuster débile (Shane West, ma poule, on t'oubliera jamais), La Ligue des Gentlemen Extraordinaires passe plutôt pour son propre objet, déconnecté des idées fondamentales du comics, et comme le dernier baroud d'honneur d'un Sean Connery en pleine exploration méta' de son passé de super-espion. Bref, si vous voulez vous documenter, on n'a pas vu plus complet sur ce film pour le moment :
Et au passage, Meeea évoque toute une variété d'autres produits amusants sur sa chaîne (surtout si vous détestez Indiana Jones 4 sans avoir jamais su dire pourquoi), on vous recommande donc son travail en général, dans la foulée de cette première vidéo. Si Hollywood a toujours envie de produire une nouvelle adaptation de la Ligue, au passage... boah. Non ? Hein ? Allez. C'est non.