Autre tradition, désormais bien installée dans le mode de vie normal des productions basées dans l'imaginaire des super-héros, le metteur en scène David F. Sandberg a évoqué le sujet des critiques adressées à Shazam : La Rage des Dieux. Dans la foulée d'Ant-Man & the Wasp : Quantumania, le scénariste Jeff Loveness avait eu une réaction comparable à celle de Sandberg. Dans les deux cas, ces deux artisans embauchés pour honorer la commande d'un studio s'étonnent de la réaction (généralement négative) des professionnels de la critique spécialisée, aux Etats-Unis ou ailleurs. Le réalisateur s'est exprimé sur le sujet via les réseaux sociaux.
Sandberg a commencé par évoquer le différentiel entre les critiques professionnelles et celles réalisées par le public via le système de notation et d'avis de la plateforme RottenTomatoes. Dans le cas de Shazam : La Rage des Dieux, l'indice "tomatometer" des rédacteurs spécialistes place le film à 51% d'approbation, tandis que le "tomatometer" public grimpe de son côté à 89%. Le réalisateur explique qu'il s'agit à la fois de la pire note attribuée à l'un de ses films par les critiques de presse depuis le début de sa carrière, et à l'inverse, de la plus haute note reçue pour l'un de ses projets de la part des spectateurs et des spectateurs. Sandberg se déclare relativement surpris, dans un message qui trahit toutefois une certaine déception - le réalisateur explique avoir fourni une copie qu'il estime tout à fait correcte, et expliquera plus loin n'avoir aucun regrets quant à la production des deux films Shazam.
Just to be clear, I don’t regret even for a second making the Shazam movies. I’ve learned so much and gotten to work with some truly amazing people. Will forever be grateful that I got to direct two of these! They’ve been very challenging but valuable experiences.
— David F. Sandberg (@ponysmasher) March 20, 2023
Au demeurant, ce discours cadre effectivement avec les propos de Jeff Loveness, à propos de la réception du personnage de M.O.D.O.K. en particulier. Problème, celui-ci aura aussi tendance à alimenter une sorte de populisme qui résonne de plus en plus fort à propos du cinéma des super-héros - à qui une partie du public ne demande plus d'efforts d'originalité ou de créativité, considérant qu'il s'agirait à chaque fois de simples divertissement inoffensifs, sans risques et sans engagement émotionnel, et donc tout à fait capables d'échapper à un jugement critique formel. Un discours qui va également viser à caricaturer l'avis des "cinéphiles" et leur recherche de codes ou de règles artistiques dans un secteur qui reste, au fond, une extension de la logique de distractions franchisées juste là pour occuper le terrain.
Il reste assez étonnant de voir un metteur en scène avec une telle expérience du milieu prendre si personnellement des critiques qui ne le visent pas sur un plan individuel, ni intime. Puisque, avant même de chercher à personnaliser ce débat, en invoquant le fait que les critiques vont heurter (personnellement) de pauvres salariés à qui on ne demande pas grand chose, les concernés oublient souvent que le processus critique s'inscrit aussi dans le rejet d'un système hollywoodien qui - aux dernières nouvelles - intéresse de moins en moins de mode. Sandberg peut se retrancher derrière l'opinion favorable des utilisateurs de RottenTomatoes (sans évoquer, au passage, les problématiques liées à ce genre d'agrégateurs critiques - les problèmes de review bombing, les notes dithyrambiques rarement accompagnées d'un texte argumenté, etc), mais il oublie problème majeur de Shazam : La Rage des Dieux : n'avoir pas réussi à susciter l'intérêt du public.
Avec le troisième pire démarrage pour un film de DC Studios, le projet risque bien de se matérialiser en nouvel échec financier, et avant même de savoir ce qu'en ont pensé les spectateurs, il serait plus intéressant de comprendre pourquoi ceux-ci ont été si peu nombreux à se déplacer en salles. Peut-être qu'une partie du public a effectivement été voir le film (et a ensuite pris le temps de donner son avis sur le web), mais une autre partie a décidé que le projet n'était pas suffisamment intéressant pour motiver le coût de la séance. La priorité des studios Warner Bros. ira sans doute à résoudre ce problème en particulier, avant même d'aller interroger les scores sur RottenTomatoes.
Plus loin, Sandberg explique qu'il compte arrêter de travailler pendant quelques temps sur les franchises de super-héros, lassé par les "discours en ligne" qui accompagnent cette catégorie de projets. A voir si le bonhomme obtiendra de meilleurs critiques une fois rendu à d'autres sphères du cinéma.
One thing I’ve really been looking forward to is disconnecting from the superhero discourse online. A lot of that stresses me out so much and it will be nice not having to think about that anymore.
— David F. Sandberg (@ponysmasher) March 20, 2023