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Transformers, G.O.D.S., Miracleman : critiques express côté comics VO !

Transformers, G.O.D.S., Miracleman : critiques express côté comics VO !

chronique

Bienvenue dans un nouveau numéro de la chronique des "critiques express". A intervalles réguliers, la rédaction vous propose de courtes reviews sur des numéros de comics VO sortis récemment. L'idée est de pouvoir à la fois vous proposer une analyse des sorties attendues du côté des éditeurs mainstream et indé', parler également de runs sur la durée, et essayer de piquer votre curiosité sur quelques titres moins en vue. En somme, tout simplement de mettre en avant le médium comics dans nos colonnes autrement que par le prisme pur de l'article d'actualités.

Au programme, la relance très attendue des Transformers chez Skybound, non pas parce qu'il s'agit des Transformers (on vous avouera bien volontiers que nous ne sommes pas les fans les plus hardcore de la licence) mais pour l'auteur qui s'en occupe, un petit point sur l'un des crossovers du moment chez DC, et le point également sur d'autre séries en cours ; parce qu'i l n'y a pas que la nouveauté dans la vie ! N'hésitez pas à nous faire vos retours sur cette chronique régulière, à la partager, surtout, au vu du travail qu'elle demande, et à nous faire part de vos récentes lectures VO sur les réseaux sociaux !

Transformers #1 - Daniel Warren Johnson

Daniel Warren Johnson est un nom qui s'accompagne en toute circonstances d'une promesse, quel que soit le comicbook sur lequel le bonhomme travaille : celle d'un grand spectacle. Compte tenu de la licence qu'on lui a confiée - celle de grands robots capables de se transformer en véhicules, il n'y avait pas grand doute sur le fait que du spectaculaire, il y en aurait. Hé bien, mettons qu'il se fera patiemment attendre puisque ce premier numéro de Transformers apparaît encore assez sage. L'idée n'est pas de faire un relaunch en tant que tel de la franchise mais d'intégrer cette forme de redémarrage à un univers en construction, l'Energon-verse, bâti sur la série Void Rivals de Robert Kirkman. C'est dans cette série qu'un des Autobots était tiré de son sommeil, et partait vers notre planète pour retrouver les siens. Dans cette introduction, avec le point de vue de deux personnages humains (il le faut bien), on découvre que des Transformers sont présents sur notre planète depuis des années mais se sont éteints au cours de leur affrontement. A leur réveil, hélas, le sommeil n'a visiblement pas été réparateur car les tueries entre Autobots et Decepticons reprennent de plus belle, et Daniel Warren Johnson n'hésite pas à faire disparaître d'emblée une icône de la franchise. 

Comme on l'expliquait dans l'intro, votre rédacteur n'est ni le plus grand connaisseur, ni le plus grand fan de la licence Transformers. Aussi ce premier numéro n'apparaît pas comme quelque chose d'immédiatement excellent, même si on sent que DWJ joue une certaine radicalité par certaines scènes - dont celle évoquée précédemment. Le point de vue humain est bien senti pour permettre aux nouveaux lecteurs de se plonger dans cet univers, tandis que l'écriture des Transformers permet de ressentir le passif de cette version des robots sans avoir le moindre élément de continuité en tête. Le ressenti est donc à la curiosité vu que de ce qu'on connaît de la licence en général, les cartes s'annonce rebattues ; d'un point de vue graphique, l'ensemble est évidemment beau, mais le côté cubique des Transformers empêche aux affrontement d'être ressentis de façon aussi vive que dans les précédentes séries de l'auteur, qui s'en sort bien mieux lorsque l'organique prend place (avec toutes les déformations corporelles qui y sont liées). La mise en scène est toujours bien vue, mais la nature même des combattants donne quelque chose de plus figé.

Il n'y a pour le moment jamais eu de travail illustré de DWJ qui soit un mauvais travail, mais ce Transformers #1 est sûrement le moins bon de tout ce que ce dernier a produit. Attention : cette lecture n'en est pas mauvaise pour autant, c'est juste que l'auteur nous a habitués à de tels sommets d'écriture et de spectacle graphique que quelque chose de tout à fait correct peut paraître décevant pour les plus grands fans. L'introduction est de bonne facture avec une exposition bien rythmée et une intrigue qui ne demande qu'à être développée, tandis qu'on espère juste que l'artiste pourra jouer avec les codes de cet univers pour le rendre moins statique dans les prochaines scènes d'action. Plaisant, sans être renversant.

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G.O.D.S. #1 - Jonathan Hickman & Valerio Schiti

Difficile de comprendre l'insistance de Marvel à pousser ce premier numéro pour le moment. Si Jonathan Hickman assure que, lors de son "retour" au sein de la Maison des Idées, étaient prévus d'un côté la saga de Krakoa et de l'autre le panthéon cosmique des G.O.D.S., l'impression d'un ensemble révolutionnaire n'est pas encore particulièrement prégnant. On se résume : si House of X et Powers of X avaient pour objectif de couvrir le groupe des mutants et affiliés, G.O.D.S. va plutôt s'intéresser aux personnages issus des mondes de la magie et des mythologies. Mais pas seulement - vous connaissez la formule, puisque la magie est "juste une science que la science ne sait pas encore expliquer", et puisque Jonathan Hickman cultive une inclinaison naturelle pour les diagrammes et l'algèbre plus que pour l'étude du lancer de boule de feu, le titre reste tout de même ancré dans des variables très pragmatiques.

En ce qui concerne l'intrigue, le scénariste nous explique que certaines forces n'avaient simplement pas encore été explorées jusqu'ici. Notamment, deux factions rivales (qui répondent à deux divinités adverses), représentées par de nouveaux personnages : Wyn, une sorte de John Constantine qui aurait décidé de se ranger, et Aiko, l'épouse de Wyn. Si le héros représente un dieu chargé de superviser certaines forces mystiques (les "Powers-That-Be"), Aiko, de son côté, a été recrutée pour devenir l'une des nombreuses Prime du Centum, une légion de soldats cosmiques à la solde d'une autre divinité, plus ouvertement tournée vers la compréhension du scientifique à travers le voile brumeux de la magie apparente (le "Natural-Order-of-Things"). 

Le gros du numéro va s'intéresser à Wyn, personnage désabusé, las de cette guerre incessante entre le bien et le mal, le combat contre les forces du chaos. Jonathan Hickman en profite pour insérer un propos sur le présent politique des Etats-Unis, en évoquant à mots (peu) couverts l'ère de la post-réalité, des batailles de tranchées sur les réseaux sociaux aux luttes de pouvoirs pour le contrôle de la vérité dans un monde en perpétuelle dissolution du tangible. En résumé, selon le scénariste, le bien et le mal sont devenues des notions bien plus abstraites qu'autrefois. Et à part ça ? On suit un combat contre un adversaire, qui reste pour le moment assez minime à l'échelle de ce que la campagne de promo' de la série avait laissé entendre, Cubisk Core. L'auteur déploie un panthéon cosmique intéressant, avec des créatures venues de différents folklores, de différents recoins des mondes de la magie à la Marvel, avec une certaine inventivité et une bonne dose d'humour.

Et puis ? Et puis c'est à peu près tout. L'histoire personnelle d'Aiko et Wyn prend un certain temps à enclencher le numéro, globalement mal rythmé et à peine introductif. On ne sait pas vraiment ce que le scénariste tente de convoquer pour le moment - une histoire d'amour impossible, visiblement, ou bien la mise en abyme d'une certaine fatigue personnelle. Ce premier numéro de G.O.D.S. passerait presque pour un one-shot dans une anthologie consacrée aux magiciens de la Maison des Idées (et peut-être que Jonathan Hickman aurait intérêt à passer à la concurrence pour s'amuser avec Hellblazer si cette envie le démange réellement). Les designs de Valerio Schiti sont agréables dans l'ensemble, à l'exception du personnage d'Aiko, un archétype de plus à ajouter à la pile des personnages féminins que l'on ne trouve que dans les comics, de la palette chromatique au costume en passant par le design épuré et impersonnel. Pour le dire plus simplement, cette introduction peine à décoller, on ne ressent pas encore la présence des "nouveaux" dieux, et on n'a même pas forcément le sentiment de reconnaître le mysticisme traditionnel de la Maison des Idées, beaucoup moins terre à terre d'ordinaire que cette parenthèse vers la fantasy urbaine encore trop ancrée dans le sol. Ca manque de magie, si vous voulez.

Mais, ce n'est encore qu'un premier numéro. Et si Hickman peine à trouver son tempo, en voulant visiblement poser l'histoire de Wyn et Aiko comme un élément de référence au point de laisser moins de place aux autres éléments à présenter, le personnage principal (et son acolyte blagueur, Dmitri) a au moins l'avantage d'être immédiatement sympathique. En revanche, si l'on s'amuse à comparer le début de cette série à House of X, ou même plus récemment, à Ultimate Invasion, on comprend vite que Hickman compte opter pour une direction d'ensemble très différente. Peut-être moins englobante, moins "chorale", ou moins révolutionnaire. La preuve : on ne voit même pas les Powers-That-Be et le Natural-Order-of-Things, au point de résumer la présence de ces deux créatures à de simples évocations fantomatiques. Difficile de créer de l'enjeu dans ces conditions, surtout quand la première aventure est immédiatement résolue à la fin du numéro. A voir pour la suite.

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Batman #137 (Gotham War) - Chip Zdarsky & Jorge Jimenez

Profitant du fait que Batman était pris dans les tourments cauchemardesques de Knight Terrors, Catwoman a pris sur elle de rassembler l'ensemble des malfrats habitués à opérer pour le compte de grands super-vilains (comme Penguin, le Joker ou Two-Face) pour leur inculquer son savoir-faire de cambrioleuse et de chat-pardeuse, pour que disparaisse la plus grande partie des crimes commis à Gotham City. Dans l'idée, seul des vols sur des gros riches devraient persister, un moindre mal dans l'idéologie de Selina Kyle. Mais ceci constitue malgré tout des crimes, et Batman ne peut laisser passer ça. On se retrouve ici dans la seconde partie de cette Gotham War, avec une introduction ramenant un super-vilain célèbre de l'univers DC, alors que le Chevalier Noir vient de perdre la propriété de son antique manoir. 

L'arc Gotham War est assez curieux : les lignes directrices et l'opposition idéologique entre Bat et Cat, sans rien apporter de révolutionnaire, ont une certaine légitimité à mener à un affrontement tel qu'on le voit. Le crossover permet surtout à Chip Zdarsky de continuer à faire sombrer son Batman dans une forme de jusqu'au boutisme qui fait qu'on commence à ne plus le reconnaître. L'idée est de mettre le super-héros dans une sorte de burnout de justice, puisque son esprit retourné au cours des récents évènements n'arrive plus vraiment à être rationnel dans ce qui est faisable ou pas pour son combat (évidemment sans fin) à Gotham City. En découle des réflexions, et surtout des actes (pauvre Jason Todd) qui sont presque out-of-character et qui pourraient bien faire décrocher pas mal de lecteurs du récit. Fort heureusement, Jorge Jimenez continue d'assurer une partie graphique de haute volée, ce qui rend l'ensemble de la lecture plutôt acceptable, alors qu'elle serait plus moyenne autrement. 

Le constat le plus dommageable au final avec ce Batman c'est l'impression que malgré ses presque quinze numéros au compteur, Chip Zdarsky persiste à vouloir livrer une intrigue sous acide, n'offrant aucun temps mort à un Batman en tension permanente. On attend toujours à ce que quelqu'un chez DC se rappelle que le Chevalier Noir est aussi utilisable pour des récits plus terre à terre, plus polar, ou dans une ambiance plus feutrée, plus gothique. Bref, que le "blockbuster d'action" n'est pas le seul registre qu'on peut lui appliquer. Si quelqu'un veut leur transmettre le message ?

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Miracleman : The Silver Age #6 - Neil Gaiman & Mark Buckingham

Dans les comics, rien ne finit jamais. Oui, oui. On sait. Vous en avez marre d'entendre cette phrase sortie à toutes les sauces, pour les arlésiennes comme pour les résurrections de personnages - allez vous plaindre à Alan Moore, 'pas notre faute si le gars a su trouver les mots. Vous auriez même toutes les raisons de le contacter à l'occasion de cette chronique, d'ailleurs, dans la mesure où Miracleman : The Silver Age cadre parfaitement avec l'interrogation de son propre héritage. On se rappelle : il y a de cela quarante piges, Moore avait pris sur lui de raviver le personnage de Marvelman, un super-héros britannique calqué sur le Captain Marvel (Shazam) de Fawcett Comics. Longtemps avant de s'attaquer à Watchmen, le scénariste avait alors entamé l'une de ses premières grandes déconstructions de la logique des surhommes. Marvelman, qui deviendra plus tard "Miracleman" pour des questions de droits, devenait en effet le premier de son genre à imposer à l'espèce humaine une dictature fondée sur la tolérance, l'entraide et la recherche du bonheur en arrachant le pouvoir aux différents gouvernements de la planète, devenant à ce moment là le dieu émancipateur d'un monde débarrassé des guerres, de l'argent et des crimes.

Après avoir posé son utopie à la vue de toutes et tous, Moore, anarchiste convaincu, hostile à toute forme de pouvoir totalitaire, même à celui qui s'arme des meilleures intentions, avait alors décidé de conclure sur une image... étrange. Miracleman, perché au sommet de son Olympe, contemple la Terre. Sa Terre, celle qui a été façonné à son image, dans son idéal de justice. Une société parfaite, sans inégalités, sans malheur, sans problèmes. Et alors ? Alors, face à ce paradis, le dieu de douceur et de sagesse se trouve pris d'un doute affreux. Sans être capable de mettre le doigt dessus, Miracleman réalise que quelque chose cloche. Là, en bas, au milieu des fourmis. Mais quoi ? Mystère. Et générique de fin.

Cette image puissante, cette conclusion irrésolue, comme une tâche sur une toile de maître, Alan Moore décide de ne jamais réellement l'affronter. Comme pour laisser au public le soin de se faire sa propre opinion. Finalement, lorsque l'éditeur de la série décide de poursuivre les aventures de Miracleman, le scénariste laisse les clés de la bécane à Neil Gaiman, son fils préféré, en lui accordant une liberté de création totale pour imaginer la suite de l'aventure. Or, à l'inverse de nombreuses continuations de sa bibliographie (validées ou non par le père fondateur), cette suite de Miracleman est fondamentalement canonique, à partir du moment où Gaiman passera les trente prochaines années de sa vie à réfléchir à ce que le surhomme avait contemplé au sommet de sa pyramide. Les numéros suivants iront chercher les failles dans l'utopie, les fêlures dans le monument. Avec une première série, Miracleman : The Golden Age, du point de vue des humains, et une seconde, Miracleman : The Silver Age, du point de vue des dieux. Et plus précisément, de Young Miracleman, le troisième personnage de la famille originelle, ramené à la vie et présenté à cette société parfaite. Sans contexte, ou plus exactement, sans comprendre pourquoi on lui a ôté le droit de mourir avec ses illusions perdues.

Sans surprises, la série est une franche réussite. Sur ces six numéros édités par la Maison des Idées (qui a racheté le droits de Miracleman pour permettre à Neil Gaiman de finir ce travail entamé il y a plus de trente ans), seuls trois sont réellement inédits. Mark Buckingham a tout de même pris le temps de reprendre à zéro les dessins des trois numéros laissés en friche à l'époque d'Eclipse Comics, pour accoucher d'une saga complète, superbe, et parfaitement maîtrisée. Le scénariste propose un renversement parfait de l'oeuvre de Moore. Si le passage du sorcier barbu était violent, dense, frénétique, et truffé d'inventions lancées à la volée, Gaiman opte pour un projet plus contemplatif, lent, qui s'attache à la suivre le quotidien, les moments de rien, la quiétude morose et mélancolique d'un monde parfait qui manque cruellement de vie et de surprise au détour de chaque coin de rue. Un miroir renversé qui se détourne de Miracleman, devenu une sorte de coquille vide qui cherche encore à ajouter de l'utopie à son utopie sans comprendre que, dans cette société de l'aboutissement atteint, le manque de place laissée à la faute, à l'erreur, à l'échec, a fait de la vie humaine une interminable séquence d'ennui et de vanité.

L'auteur va casser les propositions de cette utopie dans l'ordre, depuis l'idée originale qui voulait que les humains pourraient se faire "augmenter" et obtenir leurs propres super-pouvoirs (réponse : à quoi bon et pourquoi faire, sans un quotidien structuré et un objectif clair), en passant par l'implication des peuplades aliens embarquées dans ce grand projet (réponse : tout ceci n'était qu'une expérience qui commence à montrer ses limites) ou à cette génération dorée de surhommes à la conscience éveillée et qui voient plus loin que les limites de l'esprit humain (réponse : des gosses qui ne pensent qu'à s'amuser, à détruire et à revivre le passé glorieux des héros et des méchants - ou encore, qui ne pensent qu'au sexe, seule occupation susceptible de tromper l'ennui). 

Neil Gaiman part à la recherche de l'être humain dans un monde façonné par la divinité, par l'icône renversante du super-héros. A la recherche de l'origine, du point de bascule, voire même de la souffrance pour réinsuffler quelque chose de palpable dans cette collection de coquilles vides. Les héros de The Silver Age sont en quête de sens, comme si Gaiman tentait de bâtir toute une saga sur la dernière page de Moore. Un exercice de continuation fascinant, porté par des pages magnifiques, avec un Buckingham au sommet de son art et encore capable de magnifier son propre travail dans les contours, les regards, les décors et les environnements.

Mais, il ne s'agit que d'une review express, et malheureusement, la place manque pour élaborer plus avant (surtout, sans risquer de gâcher le plaisir à celles et ceux qui préféreront attendre la VF). Précisions utiles : non, cette série ne reprend pas le rythme ou les objectifs de la première série Miracleman de Moore. Personne ne se cogne dessus. Personne ne massacre d'innocents civils à coups de rayon laser. Il n'y a pas non plus de scènes de sexe, et le plaisir adolescent d'un Moore qui s'amusait à tout casser disparaît au profit d'une réflexion adulte, intelligente, calme et posée sur l'existentialisme à travers la matière des super-héros, dans un petit voyage à la fois tendre et discordant sur l'utilité de continuer, encore et encore, à chercher à revivre un passé qui a disparu. En un sens, la série est même une sorte d'auto-critique pour Gaiman et Buckingham, qui semblent vouloir expliquer que le projet même de Miracleman était voué à l'échec, et que cette idée de continuer à avancer plus loin ne fera que révéler les failles du chef d'oeuvre qui sert de point de départ. Saisissant. A refaire (pour conclure), et si possible sans avoir besoin d'attendre trente ans cette fois ci.

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Peacemaker Tries Hard #6 - Kyle Starks & Steve Pugh

Il y a les comics que les éditeurs sortent pour accompagner une adaptation, et il y a les comics qui, sans se cacher, sont créés pour répliquer au plus près la transformation induite par une adaptation. Pour saisir la nuance, prenez la récente série Spider-Man 2099 : annoncée pour coller à la sortie de Spider-Man : Across the Spider-Verse, celle-ci avait surtout pour but de capitaliser sur la présence du héros au cinéma, sans pour autant calquer le personnage sur l'interprétation de Sony Pictures. Alors que, pour Peacemaker Tries Hard... Bah, c'est le Peacemaker de James Gunn. Aucun doute possible. Oubliez le héros de Charlton Comics qui a servi de modèle au Comédien de Watchmen. Oubliez le travail de Pauk Kuppeberg, oubliez la Suicide Squad, oubliez son passage dans les comics Blue Beetle. Oubliez tout ce que vous avez appris : vous avez vu la série ? Bon. Vous l'avez appréciée ? Ce comics est fait pour vous.

Rares auront été les tentatives de ce genre à suivre à ce point le cahier des charges imposé par Hollywood, d'ailleurs. Le titre de Kyle Starks et Steve Pugh aurait même de quoi passer pour une sorte de saison deux (ou un point cinq) en attendant la suite des aventures de John Cena dans son casque étincelant et son étroit t-shirt rouge. Même humour, même esprit loufoque, même apparence (exactement la même apparence - si Pugh a facturé DC Comics pour ce "nouveau design", l'éditeur serait en droit d'attaquer le dessinateur en justice pour un cas flagrant d'emploi fictif), même amour des bestioles et même liberté de ton sur la violence, les blagues en dessous de la ceinture. Et même présence de la musique, qui s'inspire ouvertement du travail de Gunn et de ses super-héros mélomanes. Mais alors. L'objectif éditorial est clair, mais tout ça ne nous dit pas si le titre est réussi. La réponse ? Oui. C'est très bien. C'est très drôle. Lisez ça.

Lisez ça, parce que l'humour de Kyle Starks n'est pas forcément celui de James Gunn. Le scénariste suit la commande qui lui a été passée, en produisant un travail d'imitation saisissant (la tonalité du comics épouse les contours généraux de ceux de la série, et dans les deux cas, le résultat est évidemment marrant), mais insère au passage des notes d'absurde plutôt bienvenues. Des super-méchants "réparateurs" qui fonctionnent comme une petite équipe du BTP, un Deathstroke adolescent qui aimerait bien arrêter de tuer pour suivre ses véritables passions (le jeu vidéo et la danse), un gorille polyglotte qui parle Français sans la moindre faute de grammaire, et un Peacemaker qui s'improvise papa d'un gentil petit toutou... appelé Bruce Wayne. L'ensemble paraît très gamin à première vue, mais comme dans le cas de la série Max, Kyle Starks va vite trouver son tempo et comprendre l'intérêt de ce grand enfant dans un corps de culturiste, maltraité par son paternel, à la recherche d'un peu d'affection et qui mérite d'avoir une petite victoire pour le tirer vers le haut. Le projet est écrit avec une certaine dose de douceur, et tente de rendre au Peacemaker, éternel second couteau aux casques ridicules et au concept nonsensique, sa place sur l'échiquier des personnages qui tentent simplement de bien faire, malgré eux.

Globalement, on se marre bien, même si tous les gags ne font pas mouche à première vue. Avec une conclusion chaleureuse et finalement assez émouvante, Starks et Pugh remplissent parfaitement la commande qui leur a été passée par DC (on imagine assez facilement Jim Lee qui pointe un poster de la première saison de Peacemaker en gueulant "j'veux ça en BD" aux deux créateurs, avant de se retourner sur son fauteuil pivotant en s'allumant un cigare de méchant pour contempler l'horizon et réfléchir à ses prochaines bonnes idées). Le comics est plus destiné aux grands enfants qu'aux adultes, mais on a le droit à des gros mots, à de la drogue apparente et à des bastons contre des bébés borgnes. Que demander de plus. Peut-être une suite ? En ouvrant la porte à cette lecture loufoque de Peacemaker, James Gunn a trouvé une façon amusante de composer avec le personnage, et dans la mesure où les séries télévisées prennent plus de temps à se monter que les comics de super-héros, Starks et Pugh ont suffisamment bien compris la formule pour mériter un deuxième volume. C'est vrai, on a si peu l'occasion de profiter des bienfaits d'Hollywood en tant que lecteurs de BDs, pourquoi s'arrêter en si bon chemin ? 

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Arno Kikoo
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