Entamée l'année dernière, l'édition complète de la série The Maxx de Sam Kieth se poursuit sous la bannière Réflexions. L'enseigne s'est donnée pour mission de rapatrier l'ensemble du volume original publié chez Image Comics aux Etats-Unis (1993), un curieux souvenir de cette génération d'auteurs indépendants amateurs de héros musclés et de paysages urbains en délabrement. A ceci près que, pendant que Todd McFarlane et Erik Larsen optaient pour des aventures ancrées dans une sorte de réel tangible, Sam Kieth, de son côté, optait pour un surnaturel onirique un rien plus imagé.
Maxx, still
La proposition de The Maxx, vu de très loin, aurait même tout d'une parodie plus ou moins revendiquée des us et coutumes de cette période - si les variables en présence avaient été inversées. Plutôt que de présenter une galerie de personnages féminins aux proportions surréalistes, ou d'opter pour le dogme de "la femme dans le frigo" qui utilise les héroïnes et leurs traumatismes personnels comme un motivateur à l'avancée du héros masculin, Kieth va s'intéresser à une jeune femme, Julie, assistante sociale dont la morphologie échappe aux codes de son temps. L'agression sexuelle dont celle-ci a souffert sera l'objet d'étude de l'aventure de The Maxx, un héros sans identité chargé de la protéger, ou de l'accompagner dans la réparation progressive de sa psyché. Ouvertement difforme, privé de visage ou d'existence civile, Maxx est l'anti-héros de la génération quatre-vingt dix, le miroir déformant des bestiasses musculeuses des débuts de l'univers Image Comics.
Difficile à résumer ou à cataloguer, la série évolue à travers des scènes de vie souvent absurdes ou anormales, des ruptures de réalité fréquentes et l'exploration de "l'Outback", une sorte de royaume onirique qui représente à la fois l'inconscient et le surnaturel dans la logique de Kieth. Drôle, consciente de son anormalité, rythmée, The Maxx échappe à toute forme de définition pour se matérialiser comme un objet rare, unique, et fascinant à décortiquer. L'artiste s'amuse d'ailleurs à varier les styles à la moindre occasion - avec des hommages à Calvin & Hobbes ou à Frank Frazetta, à Alice aux Pays des Merveilles ou à Savage Dragon.
Les éditions Réflexions ont publié le deuxième tome de leur série en sept volumes, qui couvre l'ensemble des 35 numéros parus aux Etats-Unis. L'album est actuellement disponible au prix de 16 euros 50 pour 104 pages, en attendant la suite.
"La suite des aventures de The Maxx, le héros maladroit imaginé par Sam Kieth avec un focus sur sa protégée, Julie, et sur le rôle de Mister Gone, qui devient de plus en plus clair, alors que Maxx va tomber nez à nez (si on peut dire) avec... The Pitt !"