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Doctor Strange Tome 1 : Mark Waid emmène le docteur sur les traces de John Carter

Doctor Strange Tome 1 : Mark Waid emmène le docteur sur les traces de John Carter

ReviewPanini
On a aimé• Doctor Strange dans l'espace
• Les paysages numériques de Jesus Saiz
• Une bonne introduction sans prétentions
On a moins aimé• Quelques facilités temporelles
• Des dialogues qui forcent parfois sur la légèreté facile
Notre note

Avec les nouvelles séries du Fresh Start, importées, en partie, par Panini Comics, Marvel avait confié les rênes de Doctor Strange à Mark Waid et l'artiste Jesus Saiz sur une proposition inédite. Plutôt que d'explorer les dimensions, les pans mystiques du réel et les royaumes de démons et d'êtres magico-fantastiques variés, Stephen s'attacherait à imiter le parcours d'un autre Strange, celui de DC Comics, l'explorateur spatial parti de la Terre pour visiter les étoiles. Après des années à exercer en tant que maître des arts mystiques, le docteur se retrouve subitement en panne d'essence (chamanique). Coupé de ses pouvoirs, le héros laisse ainsi la Terre sans protection en cas d'attaque sur le réel.

Fort heureusement, Tony Stark, l'homme de science, a un plan pour l'homme de foi. Après lui avoir expliqué tout ça n'est qu'une problématique de batteries à recharger, le brun barbu conseille à l'autre brun barbu de se diriger vers d'autres planètes pour trouver d'autres mages, d'autres artefacts ou d'autres sources de magie pour se refaire une santé, et revenir jouer son rôle de rempart contre les vilains de l'ésotérisme une fois retapé. Doctor Strange part donc dans l'espace, dans un récit à l'ancienne qui imite, jusqu'à la narration, le ton des vieux comics d'aventures où un aventurier spatial valeureux (ou arrogant) explore de lointaines civilisations faites de puissances galactiques, de dictateurs invincibles et de folles rencontres aliens.
 
 
 
Graphiquement, Jesus Saiz fait le boulot en utilisant la peinture numérique en sur-impression de ses dessins, plus conventionnels, pour donner vie à des paysages superbes, à de riches environnements et à de jolis vaisseaux, façon couvertures de romans de science-fiction rétro' ou illustrations purement artistiques de jeux de plateau. Ces moments, souvent agréables à l'oeil, rapprochent le bouquin d'un mélange esthétique intéressant entre comics et dessin de concept art, renforçant l'hommage aux serials de voyageurs galactiques d'un autre temps (celui des bouquins, des feuilletons radio' et des premiers comic strips sur l'exploration spatiale, plus fantasmée). Pas mal de races et d'environnements se baladent dans cette compilation des cinq premiers numéros proposée par Panini, avec de vraies bonnes idées visuelles sur la planète des Skrulls et leur aspect polymorphe. 
 
Du côté du texte, Mark Waid raconte les faits à distance, en plaçant des cases de narration neutres et relativement littéraires qui vont, là-encore, jouer sur l'hommage à tout un genre de fiction - un artifice de récit qui un sens plutôt bienvenu dans les dernières pages, pour mieux préparer le volume 2 et éviter de s'appesantir sur cette technique, à usage limité. Le fait est que ce nouveau volume de Doctor Strange comprend assez vite les limites de sa promesse de John Carter à barbiche impuissant de magie sur une trop longue période, et, après quelques ellipses où les étapes les moins utiles sont mâchées, le bouquin s'intéresse surtout à l'énième leçon d'humilité utile à donner à ce héros, dont l'arrogance sera redevenue un élément définissant après l'adaptation au cinéma. 
 
En résumé, derrière l'idée, rafraîchissante, de faire de la série Doctor Strange un confluent d'inspirations à mi-chemin entre magie et voyage spatial de revue pulp, l'argument principal de ce premier arc va encore une fois s'intéresser à l'évolution du docteur vis-à-vis de ses certitudes. Son arrogance, la remise en question de son titre de "sorcier suprême" et l'envie de lui filer de nouveaux joujoux. Après la hache de Jason Aaron, Mark Waid lui file une épée, et casse la légende des artefacts nominaux ("L'Oeil d'Agamotto", "Le Foyer de Shambata", etc) pour créer un Doctor Strange guerrier et artisan, avec un nouveau costume pas dégueulasse. On appréciera - transformer le bon docteur, généralement dépeint comme une homme stoïque, sage et érudit, en mauvais garçon armé jusqu'au dents étant toujours un terrain de jeu ludique et une façon de casser les codes établis assez jouissive, même si le canon fait généralement fi de ces envies guerrières un peu neuneu.
 

 
Du côté des défauts, on pourra reprocher un placement temporel un peu brumeux: dès le premier numéro, une énorme ellipse temporelle laisse entendre que des mois se sont passés après que Strange ait perdu l'usage de ses pouvoirs. Dans le second, il est réduit en esclavage pendant soixante-treize jours, et, entre le quatrième et le cinquième, on s'y perd pour savoir combien de temps il aura fallu pour passer du magicien arrogant au forgeron sympatoche qui se fabrique une épée torse-poil. La morale est aussi un élément relativement brumeux, de même que l'emploi d'artefacts placés pour annoncer de futurs événements dans le monde de Marvel, lancés à la va vite dans un arc qui semble ne pas s'intéresser au reste des autres titres.
 
Le personnage de Kanna est aussi très utilitaire, derrière de bons dialogues : une jeune femme fougueuse, pleine d'humour et moralement souple comme on en trouve à la pelle dans les séries d'un autre Mark (écossais, pour le coup), et qui contredit l'esprit de space adventures rétro' pour un ensemble très Marvel, avec les habituels dialogues comiques servant à canaliser les enjeux. L'écriture ne cherche pas non plus à se compliquer la vie : la série avance vite vers son objectif avec peu de subtilités ou de grandeur, et on comprend que, du côté de Waid, l'ensemble est surtout une occasion de s'amuser sans chercher à accomplir quelque chose de grand. Sans être un défaut, cette légèreté et cette envie de ne pas renverser la table de thé place ce volume dans la catégorie des bonnes lectures optionnelles : on aime bien, mais on peut s'en passer. 
 
A moins d'être un amoureux fou de cette vision passéiste de la science-fiction où chaque planète est une aventure et où on s'embarrasse moins à définir les enjeux géopolitiques de chaque empire ou de chaque race à ranger dans un codex ordonné. De ce côté là, l'exercice de style est réussi, et on apprécie de trouver un Strange plus faillible, dans un ensemble très accessible qui risque cependant de ne pas plaire aux fans de la lecture classique du héros.
 

 
Très vite, cependant, Mark Waid fait le constat le plus évident : Doctor Strange n'est pas Adam Strange, et les récits du passé nous ont enseigné que l'espace, frontière de l'infini, avait aussi ses petites limites. L'arc d'introduction de ce nouveau volume aura au moins prouvé que le scénariste était capable de s'amuser et de créer autour du sorcier à barbiche, un signe encourageant pour un personnage mis à profit d'arcs plus besogneux au cours de la dernière année. De quoi manger et continuer de faire quelques expériences, sans se mettre la pression d'écrire, perpétuellement, l'arc définitif : en 2019, Doctor Strange est un héros de science-fiction. Après tout, pourquoi pas ? Reste maintenant à voir où Mark Waid compte nous emmener, et si Jesus Saiz aura d'autres belles idées de paysages sur les prochaines sorties.

Corentin
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