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Shredder in Hell #1 : Mateus Santolouco au sommet

Shredder in Hell #1 : Mateus Santolouco au sommet

Reviewidw
On a aimé• Mateus impérial à l'écriture comme au dessins
• Les couleurs de Marcelo Costa
• La relation Saki/Yoshi
On a moins aimé• Quelques références qui ne parleront pas aux nouveaux lecteurs
Notre note

Disclaimer : cette review vous est proposée par Roméo Carroz.

Attention, si vous suivez la série en VF avec les publications de HiComics, cette critique est susceptible de contenir quelques spoilers.

En 2013 en marge de la série régulière TMNT, IDW publiait The Secret History of the Foot Clan, une mini série d’Erik Burnham et Mateus Santolouco pour explorer le background du clan ennemi des Tortues Ninja, et approfondir les origines du Shredder. La réception de cette mini fut très bonne auprès des fans et des critiques, l’installant comme une pierre fondatrice du TMNT-verse d’IDW en exploitant pleinement le principe de réincarnation.

Au même moment, le dessinateur brésilien s’est imposé comme l'un des meilleurs sur les Tortues Ninja d’IDW, et surtout le plus prolifique, avec une trentaine de numéros sur l’ongoing. Sa présence fut importante dans la caractérisation des personnages, dont Oroku Saki, l’homme portant le masque du Shredder, qui fut décapité il y a quelques temps par son vieil “ami” Hamato Yoshi aussi connu sous le nom de Splinter.  

Si Shredder fait partie des vilains les plus iconiques des comics, c’est pourtant en partie par ses itérations grand public qu’il a conquis le public : le premier dessin animé (et par extension les jouets), et le film de Steve Baron. Pourtant, à sa création, il n’était pas prédit à un tel avenir et il ne devait pas revenir après sa mort dans le TMNT #1 de 1984. Son destin fut finalement tout autre (voir notre dossier sur Northampton) et il revint envahir par la suite nos écrans. Cependant, malgré l'exploitation du Shredder, l’homme derrière le masque, Oroku Saki, n’a été que peu exploité. IDW a au contraire basé toute la première partie de son univers sur Oroku Saki et Hamato Yoshi, leur rivalité, et le principe de réincarnation. La différence entre une rivalité héros/vilain convenue, comme on a pu avoir dans le dessin animé, est de mêler une opposition qui contient autant de haine que de fraternité, et donc plus crédible. Depuis 35 ans, Shredder a été bien des choses : un humain, une tortue, un utrom, des clones, un démon, et bien plus… mais l’accent a rarement été mis sur Oroku Saki comme chez IDW.


Cette force dans la caractérisation aurait pu être une faiblesse également : faut-il avoir suivi des années de continuité et des mini séries pour comprendre pleinement et apprécier Shredder in Hell #1 ? Mateus Santolouco montre ici plusieurs choses : il n’est pas qu’un excellent dessinateur, fait établi depuis déjà bien longtemps. Il sait également écrire. S’il était accompagné par Erik Burnam pour The Secret History of The Foot Clan pour des raisons linguistiques de son propre aveu, il est seul aujourd'hui aux manettes sur un personnage qu’il maitrise et connaît, tout en visant un public plus large. 

En une poignée de pages, tout le contexte nous est restitué sans aucune lourdeur et avec une grande fluidité, sans donner l’impression d’assimilation d’un grand nombre d’informations pouvant rebuter la lecture. Quelques subtiles références ne seront comprises que par les fans les plus assidus, mais ne gêneront en rien la compréhension globale. Pouvoir cibler et plaire autant aux connaisseurs qu’amener des nouveaux lecteurs est un élément important, surtout vue la baisse de ventes de l’ongoing qui sont descendues fin 2018 pour la première fois sous les 10 000 unités. Shredder in Hell #1 a aussi la lourde tâche d’amener à un TMNT #100 historique dans quelques mois.

Le principe même d’une vie après la « mort », pouvant amener à un retour au premier plan, est un thème on ne peut plus classique dans les comics, médium dans lequel le concept même de mortalité est assez abstrait. Les annonces de décès qui ne durent que quelques mois avant le lancement d’un event pour une résurrection fatiguent même certains lecteurs. Cependant, il est difficile de considérer comme malhonnête le retour du Shredder pour un simple argument marketing d'IDW. Rappelons que la réincarnation est à la base de leur univers. Suivre Oroku Saki dans son afterlife n’a donc aucune incohérence scénaristique.


Par son titre, Shredder in Hell aurait pu nous faire penser à un parcours à travers les cercles de l’Enfer telle la Divine Comédie, Shredder devant faire face à ses péchés pour obtenir rédemption. Au contraire, on est plongé dans la psyché torturée d’Oroku Saki, à la fois destinée à devenir le Dragon God, tout en ayant le souvenir enfoui de son enfance et de son amitié avec Hamato Yoshi. Ce dernier prend d’ailleurs une place importante dans son aventure, permettant de mettre Saki face aux choix qu’il a pu faire dans sa vie pour en arriver à sa situation actuelle.

La réussite dans l’écriture de Mateus Santolouco est sublimée par ses dessins, aucune surprise de ce côté là. Il délivre des planches à la fois lisibles et riches en détails, à la fois belles et horrifiques, puisqu’après tout Shredder est dans un enfer (le sien vraisemblablement), remplis de références sans que cela semble forcé. On sent qu’une même personne se trouve derrière le scénario, le découpage, et le dessin. Tout se déroule très naturellement. Les couleurs de Marcelo Costa apportent une dimension supplémentaire au titre. Les couleurs utilisées mettent immédiatement dans l’ambiance. Les souvenirs grisâtres installent le récit, les forêts verdoyantes et claires apportent un sentiment de plénitude, les cavernes ou fonds marins oppressent. Le mysticisme si cher à l’univers, ou le rouge vif marquent l’action et la violence de l’homme face à ses choix et ses combats.

Mateus Santolouco nous plonge véritablement dans la tête d’Oroku Saki. La mort n’est pas une finalité pour Shredder, et ici commence son voyage et son combat entre l’homme qu’il a été, celui qu’il aurait pu être, et la divinité qu’on attend qu’il soit. Plus de six ans de caractérisation du personnage se retrouvent condensés et sublimés ici, en prélude d’une suite qui s’annonce déjà dense et haletante. Le brésilien propose ici son meilleur travail au dessin, alors qu’il avait placé la barre déjà très haut, tout en offrant un récit riche pouvant convenir autant aux fans des Tortues Ninja qu’aux novices. A lire sans hésiter.

Arno Kikoo
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