2011
a été globalement une sale année pour lire du Hickman. La saveur
de son Fantastic Four a manqué tout au long de l'année à son FF.
Ses débuts sur la nouvelle ligne Ultimate Comics a carrément été
baclé comme en témoignent à la perfection les critiques de Jeff et Sullivan. Le gouffre entre son écriture en 2010 et en 2011 était
tel que j'en avais fini par émettre la théorie toute personnelle
que les années impaires ne réussissaient pas à l'auteur. 2012 sur
les rails, mon hypothèse tend à se confirmer. Après cinq épisodes
à la narration pour le moins désordonnée, Ultimate Comics The
Ultimates #6 offre de quoi redonner espoir au plus sceptique des
lecteurs.
Depuis le début de la série une chose n'a pas
changé, l'action est on ne peut plus dispersée. En arrivant sur la
série Jonathan Hickman en a changé la structure, l'esprit. Il ne
s'agit plus ici de l'histoire d'une équipe. Dans sa volonté de
faire les choses en grand (comme il a pris l'habitude de le faire sur
toutes les séries auxquelles il touche) le scénariste nous conte
l'histoire d'un monde qui change et de l'impuissance des
représentants de l'ancien ordre face à une révolution sur laquelle
ils n'ont aucune prise. Ce parti pris débouche donc sur un numéro
de jonglage entre différents protagonistes dont certains ne sont
même pas affiliés aux Ultimates. C'est par exemple le cas du
nouveau Captain Britain ici en couverture. En l'espace de trois pages
centrées sur le héros britannique, l'auteur donne toute sa profondeur à
un personnage dont l'avenir au sein de la ligne Ultimate est pour le
moment des plus flous. Et ça marche ! On ne peut s'empêcher de se
demander quel rôle cette version de Jamie Braddock va jouer. Il en
va ainsi de même pour chaque scénette de ce numéro. Immanquablement,conversation après conversation (car c'est tout ce
que ce numéro a à proposer), Hickman tisse sa toile et parvient à
faire ce à côté de quoi il était passé jusqu'ici : susciter
l'intérêt.
Contrairement à la plupart des intrigues de la
série, celle lancée le numéro dernier autour de Falcon et Reed
Richards progresse rapidement. Surtout, elle prend une tournure
inattendue. La rhétorique que tient l'ancien Mr Fantastic au milieu
d'un paysage fabuleux parvient presque à charmer. Plus courte, la
rencontre entre Steve Rogers et Nick fury n'a rien à lui envier. Le
Captain America de l'univers Ultimate a clairement une personnalité
qui lui est propre. Le départ de l'icône à la bannière étoilée
s'était à peine fait sentir lors du premier arc. Son absence prend
ici tout son sens. L'action du Kratos Club, qui était tombé dans
l'oubli au milieu du chaos des épisodes précédents, révèle ici
son ampleur et annonce un avenir chargé pour un Tony Stark qui se
retrouve le cul entre deux chaises. Quant à Hawkeye, la mini-série
qui lui était consacrée trouve une utilité. Malheureusement cela
se fait au prix du plus grand défaut actuel de la ligne.
Ainsi,
la Maison des Idées a décidé de profiter du nombre restreint de
titres estampillés Ultimate Comics pour créer un monde cohérent en
connectant toutes les séries les unes aux autres. Ce qui peut être
plaisant pour qui lit l'ensemble de la gamme Ultimate s'avère comme
un poids dur à porter pour le lecteur qui ne s'intéresse qu'à une
série en particulier (seul le Spider-Man de Bendis s'en tire à
plutôt bon compte jusqu'ici). Cette volonté d'un univers unifié
tributaire de la continuité tourne parfois au ridicule. En témoigne
la scène parfaitement inutile du numéro 5 qui voyait Spider-Woman
réaliser qu'un nouveau Spider-Man avait fait son apparition. Ces
pages n'auraient-elles pas pu être employées de façon plus
judicieuses ? Globalement ce défaut risque de plomber le moral des
lecteurs aux porte-monnaie les plus légers sur le long terme. Ceux
qui n'ont pas lu la mini Ultimate Comics Hawkeye vont clairement
avoir du mal à apprécier à leur juste valeur les prochaines
aventures des Ultimates et des X-Men.
Enfin, un petit mot
sur les dessins. Esad Ribic qui n'était pas à son top au lancement
du titre comme l'avait très justement souligné Sullivan retrouve
ici du poil de la bête sur ses pages. "Ses pages", car Brandon Peterson s'occupe en fait de la quasi-intégralité du
numéro. Seul le passage consacré à Reed Richards est dessiné par
l'artiste serbe. Pour le coup, c'est beau. Du haut de ses cinq pages
Ribic fait rêver et donne envie d'emménager dans la City des Enfants de Demain. A côté, Peterson est à la hauteur et fourni un
travail propre comme il l'avait récemment fait sur Uncanny X-Men. Le
travail du duo est donc des plus enthousiasmants et achève de faire
de ce numéro le meilleur depuis le relaunch.
Ultimate Comics The Ultimates #6 est un titre qui restera particulièrement indigeste pour tous les néophytes et autres lecteurs qui auraient fait l'impasse sur le reste de la ligne Ultimate. Pour les autres, ceux que la continuité hardcore n'effraie pas et qui ont des biftons, ils sauront s'y retrouver et apprécier les promesses de cet épisode. Ce numéro est ce que Hickman a écrit de mieux dans l'univers Ultimate. A l'heure actuelle, rien ne permet cependant de garantir que son run restera mémorable, mais il est certain que le scénariste a toutes les cartes en main pour le rendre historique.