
A l'instar du magazine Métal Hurlant, d'autres revues contestataires d'autrefois tentent de faire leur grand retour. En utilisant parfois les mêmes outils. Pour l'actualité qui nous concerne, l'éditeur Dave Elliott, mémoire vivante de la BD publiée depuis le Royaume-Uni passé par Heavy Metal, 2000AD, DC Comics, et cofondateur de l'entité Atomeka Press en compagnie du regretté Garry Leach, s'est mis en tête de ressusciter deux productions emblématiques de la contre-culture d'Outre Manche dans les années quatre-vingt.
Celui-ci compte effectivement lancer un périodique susceptible de relancer l'esprit des magazines A1 et Deadline, assemblées sur une seule et même équation. De ce point de vue, la démarche aurait de quoi évoquer le travail de Garth Ennis sur les derniers volumes du projet "Battle Action".
Les deux marques convoquées participent peu ou prou d'une même génération. D'un côté, avec Deadline (magazine lancé en 1988), deux anciens de 2000AD s'étaient retrouvés en dehors des murs de la prestigieuse institution traditionnelle pour lancer leur propre revue de prépublication destinée aux adultes. Autant dire que les fondateurs connaissaient bien leur sujet, dans la mesure où Deadline avait été fondé par Brett Ewins (Judge Dredd, Rogue Trooper) et par l'immense Steve Dillon (Preacher, Hellblazer).
Ensemble, ces deux camarades ont accompagné, sinon anticipé, le mouvement de la nouvelle scène britannique sur les périodiques comics destinés aux lecteurs plus âgés, en parallèle de Crisis, Toxic! et Revolver. Quelques grands noms viendront rapidement se greffer sur ce nouvel appareil productif. Notamment, Brendan McCarthy, Peter Milligan, Shaky Kane, mais aussi les deux copains Philip Bond et Jamie Hewlett. Celui qui deviendra plus tard le cofondateur du groupe Gorillaz inventera le personnage de Tank Girl dans les pages du magazine. Au global, le titre durera sur plus de soixante-dix numéros, jusqu'en 1995.

Pour ce qui concerne A1, la revue en question, publiée chez Atomeka Press par Elliot et Garry Leach, rencontrera un succès plus mesuré. Avec seulement deux volumes de six et quatre numéros (entre 1989 et 1992) et un partenariat avec le label Epic de chez Marvel, celle-ci accueillera tout de même quelques belles productions : la Bojeffries Saga d'Alan Moore et Steve Parkhouse, quelques créations de P. Craig Russell et Dave McKean, entre autres choses.
En somme, deux gros morceaux de la presse britannique, refondus dans un seul et même alliage, sous le titre A1 Deadline. Dave Elliott a présenté le projet dans les grandes lignes via la campagne Kickstarter officialisée tout récemment pour financer cette résurrection tardive.
"Dans un monde saturé par les algorithmes, ce magazine fonctionne comme un cri de ralliement, un rappel salutaire que les comics sont encore capables d'avoir du mordant, une raison d'être, et une voix singulière qui mérite d'être entendue. Et ça commence tout de suite avec un premier numéro spécial de 80 pages !'

Pour résumer, la mécanique devrait reprendre une partie de la philosophie du nouveau Métal Hurlant : quelques chefs d'oeuvre d'autrefois repris depuis la grande époque (avec les bonus qui vont bien) et l'envie de publier les nouveaux talents capables de se présenter comme les héritiers naturels des contestataires d'hier. En l'occurrence, pour ce qui concerne la partie conjuguée au passé, on sait qu'une réédition de Tank Girl en couleurs a d'ores et déjà été annoncée (avec la participation directe d'Alan Martin et Jamie Hewlett), et que Shaky Kane sera également de la partie, de même que Dave Gibbons, Steve Pugh et Glenn Fabry.
Pour ce qui concerne les nouvelles contributions, quelques noms ont d'ores et déjà été annoncés : Alison Sampson, Laura Martin, Chloe Marveal, PJ Holden, Evan Dorkin, Peter Milligan, entre autres choses, dans un premier numéro qui devrait donc accueillir des archives, de nouvelles histoires, des illustrations mais aussi des articles de presse. Elliott assure au passage que 80% des profits récoltés après cette campagne Kickstarter seront intégralement reversés aux artistes participants, et que l'éditeur ne conservera aucune propriété intellectuelle sur les comics publiés au sein de cette nouvelle revue. Un esprit d'indépendance salutaire, et qui fonctionne effectivement dans le sens des magazines d'autrefois.
De nombreuses couvertures (avec un Donald Trump façon Galactus) ont également été annoncées, de même que de nombreux bonus complémentaires en fonction du succès de la campagne. Vous pouvez retrouver tous les détails en suivant le lien consacré. Espérons que la sauce prenne... et surtout, que l'aventure ne s'arrêtera pas au premier numéro.
