A mesure que les années passent, les éditions Komics Initiative sont en passe de réaliser une ambitieuse transformation, susceptible de s'adresser à un public de plus en plus généraliste. C'est vrai : au départ, pour ce qui est des comics proprement dits, le catalogue de cette petite enseigne se destinait essentiellement aux collectionneurs de telle ou telle bibliographie, dans l'idée d'aller chercher les raretés de grands scénaristes encore indisponibles sur le marché français (Garth Ennis, Warren Ellis, etc). En dehors des créations originales, et à la périphérie des projets plus modernes pour les amateurs de comics exigeants (Come Home Indio, Love & Rockets).
Depuis maintenant quelques années, on retrouve d'autres projets capables d'aller chercher les curieux, les consommateurs de créations originales contemporaines, amateurs des titres de la maison Image Comics ou de ses différents clones dans le présent. Prenez Money Shot, par exemple, un titre qui aurait pu trouver preneur chez des maisons d'édition plus mainstream, avec Tim Seeley au scénario. Ou encore à The Good Asian ou The Holy Roller plus récemment. Autant de comics capables de représenter la richesse de l'offre sur le marché indépendant aux Etats-Unis. La tendance se confirme avec le projet Local Man, qui s'intégrera à son tour dans la bibliothèque Komics Initiative d'ici l'année prochaine.
WildStorm par HBO
Autre créations signée Tim Seeley, Local Man se présente comme une sorte de renversement de perspective sur la vision un peu spéciale des justiciers de la génération Image Comics. Et quand on dit Image Comics, on veut dire Image Comics dans le sens de la version originelle : celle de Spawn, de Stormwatch, de Gen13, de CyberForce, à l'époque où la compagnie avait été lancée pour publier en priorité les séries de ses membres fondateurs, avec des héros musclés, des ninjas, des commandos et des mutants, et aussi des héroïnes pas forcément regardantes sur la quantité de tissu nécessaires pour composer un costume complet. Local Man imagine ce qui se serait passé si l'un des membres de l'une de ces équipes avait été foutu à la porte à la suite d'un comportement... disons, problématique ?
Le projet s'intéresse à Jack Xaver, dit Crossjack, ancien membre du collectif Third Gen. A la suite d'un scandale public, le justicier est foutu à la porte de l'équipe, et interdit légalement de revendiquer ou d'évoquer son passé de super-héros. Tombé en disgrâce aux yeux du grand public, Jack doit retourner vivre chez ses parents la queue entre les jambes. Sur place, il retrouve ses anciens camarades de classe, ses anciennes conquêtes, et la honte d'avoir foiré une carrière au sommet du monde et d'avoir déçu toutes celles et ceux qui avaient placé leur espoir sur l'enfant du pays. Le naturel va rapidement revenir au galop : Jack décide d'affronter le destin en devenant le "Local Man", un justicier à plus petite échelle qui tente de résoudre les problématiques d'un voisinage traversé par ses propres préoccupations.
Co-créé en compagnie de l'excellent Tony Fleecs (Stray Dogs), Local Man se présente comme une rencontre hasardeuse entre Southern Bastards, Crossover, Sex et Daredevil : Reborn (avec quelques emprunts à la série Justified ou Banshee pour les téléphiles) à destination des fans de cette lecture musclée et anormale des justiciers de la génération quatre-vingt dix. Avec le pessimisme d'une vie réelle en surplomb de cette avalanche de muscles et d'aventures disproportionnées, un renvoi à l'humanité, aux mécaniques familiales et à la vie rurale composé comme le revers du clinquant tapageur d'autrefois. Le titre est aussi gavé de référence aux fameux comics de cette période, pour les fans.
Une campagne de financement participatif devrait être organisée d'ici le second trimestre 2025 pour financer ce nouvel album.