Depuis quelques années maintenant, l'horreur revient en force sur le marché des comics. Les projets d'anthologie à succès se multiplient (Ice Cream Man, Creep Show), certaines enseignes se tournent même ouvertement vers la production exclusive de séries basées dans les codes de l'épouvante (High Strangeness, Panick Entertainment) et les grands artistes spécialistes de la trouille multiplient les projets salués par la critique (James Tynion IV, Maria Llovet). Rendez-vous compte : Oni Press a même décidé de ramener d'entre les morts le label EC Comics. Les signes ne trompent pas : l'horreur est devenu le genre porteur du moment, et les enseignes redoublent d'efforts pour capter cette part de marché.
Chez Image Comics, une nouvelle entreprise concernée par le phénomène est actuellement en train de se monter. La maison d'édition a signé un partenariat avec différents investisseurs (AGBO, TLC Management) pour monter un nouveau label indépendant : Ninth Circle. Celui-ci se donne pour objectif de produire de nouvelles créations originales dans le genre de l'épouvante, et aligne déjà quelques noms importants : Garth Ennis, Ram V, Adam Glass, Marguerite Bennett et Joe Pruett. L'initiative est directement commandée par la Kimberly Steward, fondatrice de K Period Media et productrice des films Manchester by the Sea et Suspiria.
Les Cercles de l'Enfer
Garth Ennis compte ouvrir le bal avec un premier projet. En compagnie de l'artiste Mike Perkins (Swamp Thing), le scénariste a prévu d'attaquer dans le dur des productions Ninth Circle avec le one-shot Freddie the Fix, un titre présenté comme une comédie noire dans le communiqué de presse. Celui-ci est attendu pour la fin de cette année.
"A la croisée des genres entre l'horreur et l'humour noir, Freddie the Fix suit l'histoire de Freddie, un gars à la Eddie Mannix que l'on appelle quand vient le moment de réparer les conneries provoquées par les stars d'Hollywood. Les stars de films d'horreur en particulier : des loups-garous, des vampires, des zombies, des extraterrestres, des croque-mitaines, des prédateurs en tous genres... bref, toutes sortes de trucs. Sauf que, dans cet univers, ces monstres ne sont pas de simples humains qui portent un déguisement."
On comprend bien que le projet devrait proposer la dose habituelle d'éléments comiques emblématiques du style Garth Ennis, et ressemblera plus à son Hitman qu'à son Calliban. Grand habitué des lancements de maisons d'édition, le scénariste irlandais est effectivement un champion de l'horreur premier degré (prenez Crossed, prenez A Walk Through Hell, prenez The Ribbon Queen) mais a aussi l'habitude d'insérer une forme d'autoparodie ou d'humour dégingandé dans bon nombre de ses projets. Et ça tombe bien : Ninth Circle ne se donne pas pour seul objectif de traiter l'épouvante sous un angle précis.
Au contraire : en reflet des cercles de l'Enfer de Dante, la compagnie vise large, avec des titres qui pourront aussi bien évoquer les possessions, les démons, les slashers, l'horreur psychologique, et oui, pourquoi pas aussi ajouter un peu de comédie dans la formule ? Freddie the Fix sera donc le premier titre de l'enseigne, avec un numéro d'ouverture annoncé pour le 11 décembre 2024.
Suivront ensuite d'autres créations originales : un projet par Marguerite Bennett (Batwoman) et Jill Thompson (Dead Boy Detectives), un autre par Joe Pruett (Domino) et Butch Guice (Invaders), Adam Glass (Deadpool Pulp) et Bernard Chang (X-Men), ainsi que Ram V, et d'autres numéros signés Garth Ennis dans la foulée. La formule est aussi assez originale dans la forme : chaque numéro sera accompagné d'une petite histoire courte capable de fonctionner sur un plan indépendant, autonome, comme un petit bonus pour accompagner la mode des anthologies modernes. A priori, cette stratégie devrait s'appliquer à l'ensemble des numéros de chaque série Ninth Circle, mais les détails ne sont pas forcément très clairs sur le sujet : est-ce que les histoires en question seront réalisées par les équipes créatives du titre principal, ou bien par des équipes bonus invitées pour l'occasion ? C'est à voir.
Le communiqué de presse décrit cette stratégie comme une forme de double-feature pour doper chaque numéro et alimenter le public à intervalles mensuels avec de nouvelles idées à flux tendu. Reste à attendre de plus amples détails (notamment sur la participation de ces différents investisseurs venus du monde du cinéma, dans la mesure où de nombreuses enseignes fondées récemment ont suivi cette même promesse du multimédia : créer des comics pour centraliser les propriétés intellectuelles et s'assurer la mise en route d'adaptations futures).
On peut remarquer au passage dans le premier aperçu de Freddie the Fix que les pages sont un peu plus larges que le format traditionnel du single issue standardisé. Peut-être une façon d'amplifier l'impact de chaque numéro, technique déjà pratiquée chez Ahoy Comics ou DSLTRY pour amplifier l'idée du fascicule comme un authentique critère de démarcation.
