Alors oui, l'été ne prend officiellement fin que le mois prochain, mais nous sommes à la fin d'août, tout le monde va rentrer de vacances (à part votre rédac' chef préféré qui ne fait pas comme tout le monde et s'en va bientôt, quitte à raconter sa vie dans une chronique comics, autant y aller à fond), et les éditeurs de comics dégainent les grosses sorties pour vous persuader de rester un peu plus longtemps à vous prélasser avec quelques lectures dans les mains.
Entre la VO et la VF qui se rappelle à nous, quantité de choix vous sont donc proposé, et c'est naturellement que la Checklist Comics se plie en quatre (façon de parler, on reste sur un article numérique) pour faire le tri parmi toutes les nouveautés - et regarder les sorties qui font l'actu, ou qu'on vous recommande vraiment pour leur qualité, ou qui nous intriguent simplement. Du choix, de la qualité, un peu de curiosité, la recette parfaite pour le lectorat !
Bien entendu, aussi affûtés que soient nos radars, il manque peut-être l'une ou l'autre de vos sorties favorites du moment, et c'est là que vous pouvez intervenir dans les commentaires et enrichir la Checklist Comics en nous faisant part de vos propres choix ! Bonnes lectures à toutes et tous !
Derrière son épaisse pile de couvertures variantes (juste 23), de quoi peut bien causer le numéro spécial Marvel Comics #1000 ? De tout, et de rien. De tout, parce que l'initiative proposée par C.B. Cebulski et pilotée par Al Ewing va consister à retracer quatre-vingt années d'histoires, page par page, comme une grande mosaïque historique faite de petits moments imbriqués dans une histoire plus large. On pourrait dire que Marvel fait du DC, en se réinventant une toile d'histoires intra-connectées par le mystérieux Eternity Mask, une relique mystérieuse liée à l'ex super-héros The Dark Avenger. Et, de rien, puisque derrière les quelques planches s'intéressant à tels ou tels héros pour de petites histoires sympatoches en une page, le gâteau d'anniversaire a une saveur de surgelé. L'arc du masque, pas inintéressant, vient ainsi s'interrompre pour de toutes petites histoires déconnectées de cette trame de fond - mêlant un numéro à la Rebirth avec une sorte de petite anthologie fanservice. Les noms ronflants associés aux dessins aideront à la vente et à la curiosité autour de ce petit phénomène (où l'on découvre au passage que l'écrit de Mark Waid n'avait rien d'une préface), mais on pourra s'interroger sur la pertinence de cet étrange entre deux, qui semble avoir été imposé pour gonfler le roster créatif, faire vendre auprès des fans de tel ou tel artiste, et pour faire du remplissage quand l'histoire du masque fait un peu de sur place. Généreux en références, l'ensemble fait tout de même partie des grosses sorties de la Maison des Idées, et on apprécie le sérieux avec lequel Ewing place son nouvel artefact. De toutes façons il y a Mickey sur une des couvertures, vous êtes donc obligés d'acheter.
Toujours pas loin de Snyder et ses métalleries, c'est dans la poursuite de la mini-série The Batman Who Laughs que DC propose cette nouvelle alliance. Mais loin de l'ambiance lumineuse d'un World's Finest qui vit encore dans nos souvenirs, le titre va pousser les deux plus grand super-héros de l'écurie DC à enquêter sur les agissements du fameux Batman qui rit. Ce dernier, toujours dans le cadre Year of the Villain, est en train de corrompre un à un certains héros de cet univers - et si l'on sait déjà qui sont les personnages atteints, ce qui gâche un peu le plaisir de lecture, on ira à la découverte de ce numéro pour le talent de David Marquez, dont le trait précis fait plaisir à retrouver chez l'éditeur à deux lettres.
Ca se bagarre sous la pluie dans cette nouvelle cuvée d'Absolute Carnage, toujours servie par l'efficacité et le rythme du bon Donny Cates et la générosité des planches de Ryan Stegman. Carnage et Carnage se mettent en chasse de Venom et Venom (mais si, tout est clair) et s'apprêtent à croiser Miles Morales sur leur route. L'événement trouve ses marques dans un numéro de transition où l'on apprend peu de choses, mais où les bagarres restent efficace et le sentiment d'impuissance face à la menace du vilain Kletus s'intensifie. On regrettera que Marvel ait décidé de se couper du format de numéros en quatre-vingt pages, qui fonctionnait réellement dans l'entrée en matière de l'arc, pour la trentaine réglementaire qui laisserait le fan sur sa fin - à croire que le style de Cates appelle plutôt une lecture sur la durée, on vous conseillerait donc d'attendre que tout soit sorti pour vous ruer dessus, sauf si vous êtes fans des fameux rebondissements de fin de numéros.
Sean Murphy poursuit son ouvrage cette semaine avec Curse of the White Knight #2, un numéro qui prendra le chemin de l'origine (ancestrale) de la famille Wayne, dans les détours d'une introspection où le héros sera plus acculé encore que pendant son duel avec l'inquiétant Jack Napier. Avec Azrael sur les côtes, un Jim Gordon aux ambitions municipales proches de la crise de nerf, et de sérieux conflits internes, le Chevalier Noir continue de serpenter entre les débats et les vitres brisées du premier White Knight. Avec son agilité aux crayons, Sean Murphy poursuit sa remise en question des fondamentaux de Batman, en interrogeant le héros sur le bien fondé de son action et les répercutions de ses décisions sur son entourage, et Gotham City elle-même. Oh, et il y a Harley aussi. Elle lit le journal. On aime la Harley de Sean Murphy.
On pourra critique Marvel sur les initiatives foireuses des derniers mois avec les X-Men, mais il faut reconnaître qu'en ramenant Jonathan Hickman sur la licence, c'est peut-être la meilleure décision éditoriale menée par l'éditeur. Après une retcon d'ampleur phénoménale sur son second numéro, House of X va pouvoir reprendre son intrigue du présent avec ce troisième chapitre, quand Powers of X est plus déterminé à nous faire visiter un futur peu reluisant. La nation mutante s'est érigée sur l'île de Krakoa et Xavier/Magneto ont fait savoir à l'humanité qu'elle acceptait de co-exister sur Terre. La surprise reste à découvrir au vu de l'interlude que constituait le second numéro, mais la révélation sur Moira et ses plans rend l'ensemble bien plus important en terme de spectre narratif. Et on vous le rappellera encore une fois, au vu du travail de Pepe Larraz sur les planches intérieures, s'il n'y avait qu'un seul titre Marvel à vous conseiller cette semaine, ce serait sûrement celui-là.
Après deux mini-séries, Valiant ravive aujourd'hui la flamme de Doctor Mirage, cette médium capable de communiquer avec les morts et que nous avions déjà pu suivre dans deux aventures mystiques passionnantes. L'éditeur entame en ce moment une vaste opération de relances de ses personnages, parfois sur des mini-séries, parfois sur des ongoings. Il s'agit donc de la seconde option pour Magdalene Visaggio, qui nous met Shan Fong dans une situation bien délicate, puisqu'elle vient de perdre ses capacités surnaturelles. Un point de départ assez classique dont on attendra de suivre le déroulé, mais les premières planches de Nick Robles, et notamment son découpage, laissent entrevoir une très belle proposition artistique. Doctor Mirage arrive également dans le sillage des derniers remous éditoriaux de Valiant, avec le recrutement de Heather Anthos notamment. A voir ce que ces premières productions valent !
Arrivé en quasi-bout de course, Shredder in Hell approche de sa conclusion et emmène Oroku Saki aux portes de sa destinée. Le passionnant volume, écrit et dessiné par Mateus Santolouco, emmène, depuis son premier numéro la mythologie des Tortues Ninja un peu plus loin à chaque page. Versant dans un ésotérisme à la Jack Kirby - une des influences de Kevin Eastman et Peter Laird - ou dans la poésie mystique de Ronin, la catabase du ninja violet permet à l'auteur de parcourir d'autres réalités, d'autres styles, d'autres tonalités dans le monde généralement très urbain des TMNT. Alors qu'il doit enfin faire face au dragon des enfers, Saki reçoit l'assistance d'un allié inespéré, et recoupe dans cette dernière croisade les premiers pas de sa propre histoire éditoriale. Le clan des Foot, Yoshi, Tang Shen, et tellement d'autres détails sur l'origine même de ce monde de fiction en se rapprochant des divinités indiennes. Pas mal pour un bouquin connu du grand public pour ses morceaux de Vanilla Ice et sa promotion des soirées pizzas/canapé. Presque plus encore que Tom Waltz, Santolouco s'impose comme l'un des génies de la série Tortues Ninja avec cette mini-série passionnante, et qui emmène le concept beaucoup plus loin que la plupart des parutions consacrées au fil des dernières décennies. De la bonne came, sans cowabunga.
Décidément revenus en grâce au sein de la Maison des Idées, les Fantastic Four se découpent désormais en de nombreux projets, souvent très intéressants. En attendant l'hommage de Tom Scioli avec la mini-série Grand Design, Marvel profite de l'anniversaire posthume de Jack Kirby pour un retour à l'esprit de voisinage des premiers comics des Fantastic en revenant à Yancy Street, fameux quartier de résidence de The Thing où les voisins n'avaient de cesse de le tourmenter pour son apparence monstrueuse. Ancré dans la mythologie de ce personnage comme Hell's Kitchen pour Matt Murdock, la petite ruelle sera réinventée par quatre dessinateurs, Greg Smallwood, Mark Bagley, Luciano Vecchio et Pere Pérez. Le premier de ces artistes (illustres) ouvre le numéro dans un magnifique portrait mémoriel des planches et de l'esprit de Kirby avec une douceur qui ne quitte pas l'esprit général du numéro. Pas forcément utile, pas forcément important, l'entreprise permet aussi de rappeler les petits éléments bien cachés de la continuité et de proposer un ensemble qui, à l'envers du Marvel Comics #1000, parvient à humaniser la Maison des Idées en se rappelant des bonnes choses et pas seulement des gros projets tonitruants.
Après avoir plongé dans le monde coloré et absurde des blogueuses mode dans le premier volume, Bryan Lee O'Malley revient avec sa partenaire de crime Leslie Hung pour un deuxième hommage percé de moqueries à ce recoin sombre de la bulle internet. Meurtres, weekend entre copines, drogues, sous-entendus narquois et bisexualite latente, la série se poursuit avec le même mélange de blagues absurdes et de propos sur l'anxiété et la dépression dans un monde pourtant très superficiel. Pour les superbes personnages de Hung, pour Lottie et pour l'esprit de déconneur de Bryan Lee, toujours plus implanté dans le métissage du comics et du manga, on apprécie de retrouver cet univers - étonnamment passionnant, même pour celui qui n'aime pas causer chiffon
Suivant la nomenclature adoptée avec Clark Kent : Superman, c'est avec l'appellation Arthur Curry : Aquaman que Urban Comics nous propose de découvrir la reprise de la série par Kelly Sue DeConnick après le long (et sympathique) run de Dan Abnett. Un détachement naturel de tonalité et d'orientation qui conduit à une nouvelle tomaison, là ici justifiée, puisque l'on retrouve un Arthur Curry amnésique, repêché dans une petite communauté villageoise qui voue un culte païen à des divinités liées à la mer (et plutôt anciennes), qui auront fort à faire de l'aide que peut leur procurer un Aquaman qui s'ignore encore, et va devoir recomposer son passé. Quand Mera, croyant son amant disparu, doit aussi gérer Atlantis par elle même. Un démarrage en douceur et vraiment pas inintéressant, qui vaut notamment pour les planches de Robson Rocha, avec des personnages qui font plaisir aux rétines, et une ambiance rurale, presque celtique, fortement appréciable pour renouveler l'ambiance de la série Aquaman. A tester pour les fans du personnage.
Du côté de l'indépendant, c'est également du côté d'Urban Comics que l'on se tourne avec le second volume de l'excellent titre Ether de Matt Kindt et David Rubin. Le duo se reforme pour cette nouvelle mini-série, ici éditée dans un second tome, où le détective et scientifique Boon Dias recrute une équipe atypique de créatures pour lutter contre un flot de bestioles magiques qui s'échappe de l'Ether, cette dimension parallèle fantasmagorique que Boon adorait explorer. Une aventure plus épique en apparence que pour le premier tome, et qui promet dans tous les cas de nous emmener à nouveau dans un voyage où le merveilleux cotoie le superbe, grâce au travail d'illustration de David Rubin, prêt à nous exploser les rétines tant dans la composition des planches que dans l'imagination fertile qu'il dégage pour dépeindre les paysages, créatures et concept de cette dimension parallèle. Un incontournable de l'indé' qu'on vous conseille sans hésiter.
Et pour terminer, allons du côté classique de DC Comics avec cette nouvelle édition, très demandée, des New Teen Titans de Marv Wolfman et George Pérez. Il aura peut-être fallu attendre que Titans arrive, et que l'éditeur se cale sur la venue de la seconde saison, pour proposer aux lecteurs et lectrices de se plonger dans le run qui a fondamentalement réinventé cette équipe, avec une nouvelle série faisant suite à leur réintroduction dans les pages de DC Presents #26. Les anciens sidekicks des super-héros DC forment leur propre équipe et vont devoir très vite affronter Trigon, le père démoniaque de Raven. On associe à ce run le trait sans pareil de George Pérez, une écriture fine et qui met en exergue la belle dynamique d'équipe de ces jeunes super-héros, avec les thématiques qui s'associent à leur âge. En bref, un incontournable qu'on ne peut là aussi que vous recommander, n'en déplaise à votre porte-monnaie !