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Doom Patrol : La vallée de l'étrange entre réussites et maladresses

Doom Patrol : La vallée de l'étrange entre réussites et maladresses

ReviewSeries tv
On a aimé• Des choix visuels et musicaux intéressants
• Quelques références bienvenues
• L'aspect décalé de l'équipe pris à bon escient
• Un haut de niveau de qualité pour une production Berlanti
On a moins aimé• Les dernières minutes cassent l'envie de faire quelque chose de nouveau
• Une peur de rentrer dans du trop conventionnel ensuite
• Avalanche inutile de "fucks" et Crazy Jane en demie teinte
Notre note

A cent lieues des propositions traditionnelles dans le répertoire du super-héros, la Doom Patrol évolue depuis quelques décennies sur le concept de personnages invalides. Des rebuts de l'accident de laboratoire, de la rencontre fortuite avec le surnaturel, une constante classique chez les héros à pouvoirs. Là où la plupart, après avoir été frappé par la foudre ou fait un vol plané dans une étagère de tubes à essais, s'en sortent avec trois jours de coma, une pousse d'abdos spontanée et un goût renouvelé pour le port de fringues moulantes. Mais pas la Doom Patrol.

Apparu en même temps que les X-Men, dont ils partagent l'idée du leader à roulettes, ces héros reprennent chez DC un trope plus courant chez les personnages de Marvel. Les héros accidentels prisonniers de leurs pouvoirs, comme le Hulk ou la Chose, qui sert d'ailleurs de modèle immédiat à Robotman pour sa grande gueule et son rôle de combattant impulsif. Certains auteurs pousseront l'idée plus loin, en profitant du bizarre général associé à l'équipe, pour des runs plus psychédéliques ou juste plus absurdes. Grant Morrison et Gerard Way semblent avoir été choisis comme référents essentiels de l'adaptation proposée par DC Universe, qui faisait ses débuts sur la plateforme ce vendredi. Qu'en a-t-on pensé ? Quels mystères se cachent dans les bureaux de Greg Berlanti ? Est-ce que les séries du Arrowverse auraient été meilleures si un bon pilon avait tourné dans les salles de réu' ? Toutes ces réponses (et même d'avantage) sont à retrouver dans les paragraphes suivants. Lisez le guide.
 

 
Le projet de série Doom Patrol est né de l'esprit de Jeremy Carver, un scénariste et producteur aux performances variables. Si on connaît surtout de lui son travail sur Supernatural, série qui sera longtemps restée l'une des plus originales (ou des plus regardables) de la marque CW, notoirement connue pour son hommage à Hellblazer, le bonhomme s'est aussi rendu responsable de l'adaptation américaine de Being Human. Une série pensée pour détourner les codes de l'horreur, où des montres de films fantastiques partagent un appartement et tentent de vivre une existence "normale" contre leurs natures respectives. Il est assez facile de comprendre ce qui a motivé DC Universe dans le choix de ce showrunner, assisté par son épouse Anna Fricke, co-créatruce de Being Human US et scénariste de longue date sur Dawson. Il faut bien remplir le frigo.
 
La série Doom Patrol va partir sur cette idée, à mi-chemin entre un propos sur le handicap au sein d'une famille recomposée, et sur l'idée de parodie absurde à la Supernatural de codes de super-héros. Narrée par le brave Alan Tudyk, ce premier épisode va raconter l'origine des "héros" de la patrouille maudite, en choisissant Cliff Steele, autrement dit Robotman, comme personnage principal. Suivront, au fil de l'épisode, Elasti-Woman (April Bowlby), Negative Man (Matt Bomer) et Crazy Jane (Diane Guerrero), en attendant d'en savoir plus sur le Chief, Niles Caulder, joliment interprété par le bon Timothy Dalton.
 
L'épisode va multiplier les effets de styles et emprunts à différentes oeuvres dont certains héros peuvent se rapprocher. Les origines de Mr Nobody reprendront les codes d'un Hellboy à la Del Toro, la transformation de Robotman s'inspirera du réveil d'Alex Murphy dans Robocop, celle de Negative Man irait plus chercher dans une mise en scène de films Marvel il y a une bonne quinzaine d'années. Généralement bien filmé, l'épisode aligne les effets de styles, avec une utilisation intelligente des couleurs et des ambiances propres à chaque personnage - à se demander si Carver a découvert Legion, ou simplement décidé de prendre son sujet au sérieux. Tout est loin d'être parfait, mais en comprenant les limites de ce type de productions, on peut rester optimistes sur l'idée que les adaptations ont (enfin) grandi, et que certaines saloperies passées à la Gifted n'ont plus lieu d'être. 
 

 
La gestion des moments de calmes est un des points forts de ce premier épisode - enfin, Berlanti Productions semble avoir compris ce qui a toujours manqué aux projets de son infatigable usine : la patience. L'épisode prend le temps de découvrir Robotman avec une économie de moyens intéressante, et des effets de couleurs ou de narration bienvenus. Carver a manifestement fait ses classes, et trouve dans ces premiers personnages la métaphore de l'invalidité qui fera le sel de ce pilote - peut-être pas de toute la saison. L'idée ne va pas être tout de suite de se positionner sur un créneau classique de super-héros, passé le cap du stéréotype propre à ce genre de séries. La maison oblige, un propos sur la différence (et la diversité LGBT) se positionne d'entrée de jeu, avant d'être rattrapé par les dernières minutes et tout un amas de clichés visuels ou narratifs pour poser la menace de fond.
 
Dans l'ensemble, ce premier contact reste très rassurant, loin devant l'aspect adulescent ou neuneu de Titans. Avec quelques vrais beaux plans en stock, un sentiment de parodie (parfois contre-productif) dans la narration ou l'impression d'une série consciente de ce qu'elle a à proposer. Des éléments à la Morrison viennent se glisser dans le tableau, là où le côté gratuit et abusif dans l'absurde ou la provocation émanant de Way est aussi présent. L'épisode balance un nombre conséquent de fucks et le personnage de Crazy Jane passe pour le reflux de facilité et de maladresses à la Berlanti que la série cherche à éliminer. Des choix dans la bande-son appuient l'idée de se différencier de cette caste de productions aujourd'hui (très) redondante, avec un accent mis sur l'idée de famille, de réclusion. 
 
Tout cela reste évidemment bien léger et très loin de la folie d'un Grant Morrison, dont on n'a retenu que quelques accents de psyché' et de jemenfoutisme des débuts, en gardant une ligne de mire très grand public. Une sorte de bizarrerie enfermée dans un produit de commande, qui a la qualité d'avoir compris l'intérêt d'adapter la Doom Patrol, sans forcément aller au bout de l'idée. Dès lors, tout dépendra (comme d'habitude) des attentes du public : certains vont s'ennuyer, à découvrir ces personnages qui ne se bagarrent pas entre eux, n'ont pas de sixpacks saillants et aucune envie de se grimper dessus pour distraire l'ado' éventuelle qui lancerait un regard naïf vers cette série plus ou moins vaguement liée à Titans, d'autres trouveront que tout ça est une belle tentative mais encore trop mainstream pour satisfaire leurs souvenirs d'une Doom Patrol autrement plus décalée dans l'appareil Vertigo.
 

 
Reste donc un bon produit à mi-chemin entre deux extrêmes, parfois vraiment réussi et qui satisfait par ses quelques prises de position esthétiques, musicales et dans le choix d'une bonne distribution. Timothy Dalton est comme à son habitude excellent, là où il sera plus compliqué de mesurer la performance de Tudyk, Bomer ou Fraser réduits à des rôles de comédiens de doublage. La crainte de voir une accélération vers un propos plus conventionnel (ou plus héroïque) dès le prochain épisode est grande, mais tel quel, ce pilote se pose comme l'un des meilleurs de la marque Berlanti depuis très longtemps, et la preuve que ce studio avait moyen de faire mieux pendant des années sur les séries CW. Pour l'heure, Doom Patrol suit la tendance : c'est toujours de mieux en mieux, mais pas encore parfait.
 
Quelques éléments à rajouter: il n'est évidemment pas nécessaire d'avoir vu Titans pour pénétrer dans ce premier épisode (ni d'avoir vu Titans en général, mais on ne vous juge pas), le choix des costumes aperçus en promo' n'est plus une surprise mais on ne soulignera jamais assez l'intérêt d'un Robotman concret et d'un Negative Man fidèle jusqu'à l'absurde, et le travail des équipes artistiques sur les éclairages et la colorimétrie nous rappelle qu'il fait bon vivre en 2019 loin des filtres foutraques des années 2000. A noter également que les origines de Cliff ressemblent pas mal au film Ricky Bobby avec Will Ferrell, ce qui est forcément cool, même s'il manque le méchant français éleveurs de chevaux de course homos. Tout ne peut pas être réussi du premier coup. 
Corentin
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