Devenu relativement rare sur le marché des comics depuis la sortie de l'album Âme Augmentée (Upgrade Soul) aux Etats-Unis, Ezra Claytan Daniels s'est finalement décidé sur une date pour opérer son retour aux affaires. Remarqué pour avoir livré une prestation impeccable lors de son premier projet en tant qu'auteur complet, celui-ci va toutefois prendre un peu de recul. L'artiste l'avait déjà évoqué par le passé : le travail nécessaire pour compléter Âme Augmentée se sera révélé particulièrement éprouvant, et de fait, sa vocation originelle devait plutôt le mener vers les métiers du scénario. Et d'ailleurs, entre temps, Daniels avait également eu l'occasion de travailler sur la série télévisée Doom Patrol, en acceptant au passage quelques contrats de commande chez Marvel pour rester proche de l'industrie des comics.
Ceci étant, beaucoup de gens se demandaient ce qui allait bien pouvoir sortir du cerveau (somme toute : inhabituel) de cet auteur dessinateur complet. Et en l'occurrence, Daniels a cette fois décidé de se faire remplacer du côté des dessins. L'artiste Camilla Sucre assurera le graphisme sur l'album Mamma Came Callin', une nouvelle création originale annoncée tout récemment chez la maison d'édition William Morrow Paperbacks. Le titre est prévu pour le début de l'année prochaine, et se présente comme un polar noir (et surréaliste) basé dans les quartiers racistes de l'état de Floride... avec une petite touche de monstre des marais en bonus.
En l'occurrence, Ezra Claytan Daniels a effectivement décidé de taper dans le folklore des populations noires de cette partie des Etats-Unis, pour composer un drame familial sur fond de légendaire urbaine, de tueur en série et de commentaire social. L'auteur revendique quelques inspirations claires, en citant notamment la bibliographie du grand Ed Brubaker comme référence, de même que les écrits de Greg Rucka ou encore le comics Daddy Cool de Don Glut et Alfredo Alcala. Et aussi, voire surtout, toute la production du label Vertigo Crime, une sous-section de l'illustre maison d'édition exclusivement consacrée aux polars.
Pour faire court, voici le synopsis de l'album :
"Kirah est née d'un amour 'interracial' étonnant - surtout compte tenu de son environnement, dans la mesure où ses deux parents sont originaires du tristement célèbre comté d'Asurupa, au coeur de la Floride, un environnement notoire hostile au mélange des couleurs de peau. Autant dire que l'existence même de cette héroïne aura donné tort à tous les pronostics. Mais son enfance paisibile finira toutefois par être brisée au moment où celle-ci tombe sur un monstre issu d'une légende urbaine locale. A savoir : le « Gatorman » une horrible créature connue dans la région du sud des Etats-Unis depuis la période des lois Jim Crow : un monstre au corps d'homme, avec une tête d'alligator... et qui aime dévorer les enfants noirs.
Lorsqu'elle était petite, Kirah s'est réveillée face au Gatorman, qui venait de passer par sa fenêtre. Celle-ci n'avait alors que cinq ans. Mais selon la police, le monstre n'existe pas : ce serait son propre père qui aurait revêtu un masque d'alligator pour tenter de la tuer. Nous voici désormais vingt ans plus tard. Kirah s'efforce de bâtir sa propre vie d'adulte, libérée des traumatismes de l'enfance. Et au moment où celle-ci semblait enfin apaisée, son père, fraîchement sorti de prison, fait irruption dans son quotidien avec un message glaçant : 'le Gatorman vient te chercher.'"
Une promesse plutôt sombre pour un dessin à l'apparence légère. De loin, le coup de crayon de Camilla Sucre aurait effectivement tous les ingrédiens nécessaires (non, pas de blague sur les noms de famille, on n'a plus l'âge) pour coller à l'esthétique d'un comics jeunesse... sauf que l'habillage général a cette fois été repensée pour imprimer une tonalité désaturée et cauchemardesque. A voir.
Mamma Came Callin' est attendu pour le 3 février 2026 aux Etats-Unis, dans un format de 240 pages.
