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Édito #41 : Suicide Squad, l'habit fait-il le moine ?

Édito #41 : Suicide Squad, l'habit fait-il le moine ?

Chronique

Comme moi, vous attend(i)ez sans doute avec impatience Suicide Squad, le premier film super-héroïque mettant en scène une équipe de vilains, qui a le mérite d'émaner des têtes pensantes de Warner Bros, ayant sans doute compris l'opportunité qui se présentait à eux en passant en revue les personnages DC. Ajoutez à cela un casting d'abord prometteur - puis un peu plus mitigé - et un réalisateur à contre-courant du modèle Hollywoodien et vous obtenez l'une des productions les plus intrigantes de cette fameuse "mode" du film adapté de comic books. Seulement, David Ayer a jeté un peu d'huile sur le feu la nuit dernière en révélant le look de son escouade, qui était attendu au tournant par tous les fans, puisque l'escadron suicide a la chance de compter dans ses rangs des fan favorites absolus, comme Harley Quinn...

La déception

Vous l'aurez compris au regard de nos différents articles sur le sujet, nous sommes déçus. En proposant à son public de nombreux personnages hauts en couleurs, Suicide Squad était incontestablement le terrain de jeu ultime. L'occasion de donner à des vilains emblématiques une première apparence cinématographique, et de créer un groupe hors du commun, capable de voler la vedette à des héros un rien plus lumineux comme, au hasard, les Vengeurs, à grands coups de badassitude. Au lieu de ça nous avons, très franchement, quelque chose de médiocre, et à plus d'un titre.

Un savoir-faire inutilisé ?

On va encore nous taxer d'anti-DC/Warner, aussi aimerais-je commencer par ce que le studio fait de mieux : les costumes. Man of Steel proposait une incroyable tenue pour Superman, qui a demandé des mois de travail et beaucoup d'ingéniosité (le saviez-vous ? La cape a été découpée au laser). Et Batman v Superman introduira ce qui semble être le plus comics mais aussi le plus réussi des costumes de Batman au cinéma. Sans parler de celui de Wonder Woman. Bourrés de détails, pleins de textures différentes, ces costumes sont de petites œuvres d'arts pour les cinéphiles comme vous et moi. Et que vous aimiez ou non l'apparence de la Suicide Squad, vous en conviendrez, on ne retrouve pas le même soin dans les costumes des membres de l'escadron. 

Et sans parler de soin ou de qualité, car vous pourriez me répondre que ces personnages sont moins importants que la Trinité - et j'en conviens - leur look était aussi une question de cohérence. On vous le disait il y a quelques jours, Warner Bros. n'a toujours pas élu un chef de file pour diriger le navire DC au cinéma. Et je crois qu'aujourd'hui, cette absence se fait sentir. Car d'un côté, nous avons les costumes très élaborés (et accessoirement très fidèles, ce n'est pas incompatible) de la Trinité, et de l'autre, une bande de vilains à peine fringués. Il en devient même difficile d'imaginer un combat entre Deadshot et Batfleck par exemple : la crédibilité du tireur d'élite en prend un sale coup.

Premier degré, mon amour

Mais qu'à cela ne tienne, ces costumes pouvaient encore être parfaitement défendables s'ils n'étaient pas si premier degré. Nous le savons, il y a deux grandes tendances en ce qui concerne les costumes de super-héros/vilains : soit on opte pour un design très fidèle aux comic books, simplement transposé en trois dimensions, soit on cherche à réinterpréter les éléments emblématiques du personnage dans une version plus vraisemblable. Et ici, les tenues de nos suicidaires sont tiraillées entre ces deux options, ce qui rend le résultat plus frustrant encore.

Pourquoi, par exemple, tatouer les jambes d'Harley Quinn des losanges que l'on retrouve sur son costume classique ? Imaginer une tenue d'arlequin pour le personnage n'était-il pas plus judicieux ? Honnêtement, de ces costumes se dégage une certaine fainéantise, que personne ne peut ignorer : Killer Croc porte par exemple une veste en cuir frappée d'un lézard brodé, Boomerang s'habille d'un survêtement sur lequel on peut lire "Captain" et El Diablo porte son propre nom sur sa veste de baseball.

Photoshoot

Pour aller plus loin dans l'analyse, et tenter de vous faire comprendre notre déception, voici une brève étude de chaque costume présenté, de gauche à droite, nous avons :

Slipknot (Adam Beach), le vilain doté de cordes infinies, réinterprété dans une sorte d'alpiniste. Qu'à cela ne tienne, le personnage ne devrait pas être très important, et ses armes favorites pourraient même donner une bonne séquence. Boomerang (Jai Courtney), qui tient plus du gangster russe, tatouages aux doigts en témoignent, que du vilain australien. Une allure qui serait celle d'un Bane bedonnant, qui aurait sa place dans un film de Nicolas Winding Refn. Et j'oubliais, aucun boomerang apparent...

Katana (Karen Fukuhara), petite surprise de la bande. Le costume est un rien sobre, donc difficilement critiquable. Mais tout de même, son masque, seul élément emblématique du personnage en dehors du sabre, semble plus proche du carton que de la porcelaine. L'Enchanteresse (Cara Delevingne), bien peu habillée, sans doute pour suggérer des origines mystiques. Mais l'ensemble nous fait plus penser à The Grudge ou tout autre film d'horreur asiatique.


Rick Flagg (Joel Kinnaman), en bon militaire, s'offre une tenue tacticool mais qui le dispense de son vêtement emblématique : le pull jaune, qui aurait pu mieux l'intégrer au reste de l'équipe. Harley Quinn, à mon sens le costume le moins réussi. Entre le t-shirt "Daddy's Lil'Monster", les tatouages mal foutus (et mal placés, dans les deux sens du terme) la veste "Joker's Property" et la nuque rasée, on a là une punkette à la solde du Joker. Nous sommes bien loin du personnage tragique que les fans adorent. 

Deadshot (Will Smith), ma foi, fait l'affaire. Pour le coup le rendu est encore très "paintball" mais les couleurs et les attributs du personnage sont là. Le viseur aperçu sur le masque a d'ailleurs la présence d'esprit d'être sur l'œil gauche, ce qui évite à l'acteur et au personnage de superposer les lunettes de visée.

Killer Croc (Adewale Akinnuoye-Agbaje) est dans la veine des dessins de Lee Bermejo dans Joker. On salue le choix du maquillage en lieu et place des effets spéciaux en post-production. Mais l'ensemble aurait été plus impressionnant en augmentant la taille du personnage ou en le faisant apparaître torse nu. Enfin, El Diablo (Jay Hernandez) paraît presque trop propre au milieu de toute cette bande. Et les tatouages, qui sont d'ailleurs le point central de ses pouvoirs, ne ressortent pas assez. A ce compte-là, la production aurait dû se tourner vers Zombie Boy pour avoir un rendu plus poignant.

Dans l'ensemble donc, nous avons là une bande de méchants dont le seul liant serait le streetwear et/ou les tatouages. Une direction artistique qui aurait sans doute fait son effet il y a quelques années mais qui semble bien peu pertinente à l'heure où votre propre employeur porte des tatouages et des baskets de plus en plus souvent. Une déception d'autant plus amère que David Ayer, qui s'y connaît et en film de gangster et de guerre, n'arrive à rendre ni l'aspect fou ni l'aspect militaire du groupe. Mais n'allons pas trop vite en besogne - je critique avant tout les costumes, et ils ne font pas le film - Suicide Squad sera peut-être aussi brutal que réjouissant, et les membres de l'escouade pourraient bien porter d'autres costumes pour les besoins du métrage. Affaire à suivre en attendant la sortie du film, le 5 août 2016.


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