Rare film Marvel Studios à sortir chez nous plus tard qu'aux États-Unis, Guardians of the Galaxy est déjà une réussite du haut de ses 250 millions de dollars de recette, se permettant même de dépasser le box-office mondial de The Incredible Hulk et Green Lantern en l'espace de 10 jours à peine. Pourtant, si la situation en 2014 semble si favorable à ses producteurs et à son crew, il n'en a pas toujours été de même et le projet faisait même figure d'arlésienne aussi folle que mal embarquée avant l'arrivée de son capitaine de bord.
"Le problème, si l'on ne prend pas de risque, c'est qu'on risque encore d'avantage."
Petit anniversaire pour Marvel Studios qui fête là son 10ème long-métrage (oui, déjà), le film de James Gunn est loin d'avoir toujours été le pari réussi de la Maison des idées. En effet, si l'on revient en 2012, alors que des rumeurs concernant l'existence du film bruissent depuis l'automne 2010 (et l'ouverture de COMICSBLOG.fr), Kevin Feige se retrouve devant un dilemme alors inconnu pour lui : lancer une nouvelle licence un tantinet risquée en raison du coût inhérent d'un Space Opera, à partir d'un script (celui de Nicole Perlman) qui ne convainc personne. Quelques mois de gestation plus tard intervient alors une décision qui aurait été murmurée par le marketing de Disney (maison-mère de Marvel depuis 2009, faut-il le rappeler) : il faut confier le film à un homme à tout faire capable d'apporter sa patte et son talent à un film appelé à être différent par son existence même.
La suite vous la connaissez : James Gunn embarque à bord du navire un peu chancelant et se voit confier un budget de 170 millions de dollars et les coudées franches pour adapter un comic-book un peu obscur de Marvel, de ceux dont le succès d'estime n'est plus à prouver mais qui ne parvient jamais à tutoyer les sommets des ventes mensuelles. On était alors bien loin de l'époque où le seul Rocket Raccoon parvenait à détrôner Batman au top des ventes.
S'enclenche alors un processus que nous sommes fiers d'avoir pu couvrir du premier jour jusqu'au dernier et le scénariste/réalisateur prend en charge la totalité de l'écriture et change, si l'on en croit ses dires, 99% du script original pour y ajouter son grain de folie et surtout, une soundtrack en forme de festival pop, invoquant les cultes 10cc, Bowie, Blue Swede et j'en passe.
La suite se compose avec une autre prise de risques, le recrutement d'un casting loin d'être flamboyant, choisi au peigne fin par James Gunn, plus que jamais capitaine de son Milano. C'est ainsi au cours d'une audition somme toute classique que Chris Pratt éblouit ses futurs collègues. Après avoir essuyé refus sur refus pour camper d'autres héros d'Hollywood (G.I Joe, Star Trek et j'en passe, mais nous y reviendrons dans l'article lui étant consacré), la star comique de Parks & Rec' aurait même pu voir l'opportunité Star-Lord lui filer entre les doigts à cause de son surpoids. Ce n'est qu'au prix d'efforts colossaux (et de coachs hors-de-prix) qu'il parviendra alors à se faire accepter grâce à ses abdos et ses pectoraux flambant neufs. Ajoutez à ça à l'inexpérimentée Karen Gillan dans le rôle de l'antagoniste, l'omniprésent Lee Pace pour camper son boss, Dave Bautista (par franchement convaincant aux côtés de RZA) et Zoe Saldana (seul véritable nom ronflant grâce à Avatar), et vous obtenez un casting bien loin des strass et des paillettes d'Hollywood, cantonné à l'union sacré pour que le film puisse véritablement exister.
La suite vous la connaissez, une petite famille s'est formée et Guardians est en train de tout rafler. On pourrait d'ailleurs arguer que c'est grâce aux ajouts (parfois tardifs) des stars que sont Bradley Cooper, Vin Diesel et Glenn Close que le film parvient aujourd'hui à se faire entendre à travers le monde (ce qui est loin d'être faux si l'on considère que Dominique Toretto a plus de fans sur facebook que d'habitants en France), mais la vérité semble être ailleurs.
Réalisé dans un laps de temps très court au prix d'efforts colossaux et de litres de sueurs, Guardians est porté par les sentiments qu'il transmet : l'amitié, la passion et la valeur du travail. Certes, le marketing dingue de Marvel permet de minimiser les risques, mais personne n'aurait prévu une réussite aussi totale pour le film il y a quelques mois encore. La preuve en est : beaucoup de gens nous riaient au nez il y a encore quelques semaines quand on annonçait Feige et les siens capables d'annoncer la suite du film avant même sa sortie aux USA, lors de la grande messe de la San Diego Comic Con.
Évidemment, le film est un berceau stratégique pour ses producteurs. Celui-ci est marketé comme le nouveau produit des fameux "créateurs d'Avengers et d'Iron Man" sans se référer à l'univers terrien de Marvel déjà bien en place, permet d'ouvrir encore plus en grand les portes du genre dans un studio qui ne fait qu'appliquer une recette qui fait ses preuves depuis 75 ans en BD et offre une nouvelle licence de Space Opera assumée avant le retour du patron en Décembre 2015. Comme diraient les mauvaises langues "rajoutez des posters dans toutes les gares et quelques money-shots" et vous obtiendrez un succès. Andrew Stanton (John Carter) doit encore pleurer à la lecture de tels arguments.
Plus que le bouche-à-oreille classique des films différents, sans stars et aux concepts obscurs, c'est le fandom Internet qui est parvenu à faire monter la sauce autour de Guardians of the Galaxy, si bien que le film est devenu une curiosité pour beaucoup (du plus passionné au néophyte) depuis cette (fin de) nuit où son premier trailer a été diffusé. Pour l'anecdote, sachez d'ailleurs que cette première bande-annonce un peu folle est née de la même volonté que celle qui anime le film depuis l'arrivée de James Gunn, puisque le panel de test à qui le trailer avait été montré l'avait déclaré aussi raté et inefficace que l'autre bande-annonce (que l'on ne verra jamais) qui vendait un film hollywoodien tout ce qu'il y a de plus classique, bien loin du résultat final. Et ce n'est que parce que les retours étaient mauvais sur les deux essais que l'équipe de Disney a tranché : "Si aucun ne plaît, autant diffuser le plus sincère, non ?".
Là aussi la suite vous la connaissez, Hooked on a Feeling de Blue Swede est devenu #1 sur iTunes en quelques heures et le le moteur vrombissant du Milano n'attendait que le mois d'Août pour s'envoler vers les étoiles. Jusqu'où ? Personne ne connait la réponse, mais la dernière analyse au box-office annonce que Guardians of the Galaxy pourrait battre les 10 premiers jours de Transformers : Age Of Extinction et venir tutoyer le milliard de dollars de recettes en fin de vie. Bien devant Captain America - The Winter Soldier donc. Et là où le pari semble doublement réussi pour Marvel, c'est que la licence est déjà l'une des plus connues auprès du jeune public grâce au renfort des produits dérivés et de l'attractivité de Groot et Rocket, permettant à Disney de compter sur une nouvelle gamme de héros, encore inconnue du grand public il y a six mois. Ajoutez à ça une série animée en production et l'arrivée des losers de l'espace sur Infinity et vous obtenez une franche réussite pour une équipe le mérite.
Et si l'histoire est encore jeune et à écrire, il n'est pas impossible que Guardians apparaisse d'ici quelques années aux côtés d'Iron Man premier du nom comme la preuve que tous les paris sont bons à faire pour les studios qui adaptent des Comics par camions, dès lors que l'on accompagne ses créations avec soin, sérieux et passion.
22 Aout 2014
Kit_Fisto, serial reviewerTrès bon édito Sulli !
On peut dire que le pari est réussi pour Marvel studios et James Gunn...Réussite critique et financière...
Vivement la suite !!!!
14 Aout 2014
Purpletax@ Laaris : Formaté ? Oui. Comme dans la plupart des films Marvel, ça finit en grosse baston un peu grotesque, pas très cohérente, où - attention, mini spoiler - on casse un ou plusieurs vaisseaux spatiaux. Un peu comme dans le dernier Captain America. Bien sûr, avant cela on nous a présenté les gentils et les méchants avec les péripéties d'usage.
Mais, devant le film et même avec du recul - je l'ai vu le mardi soir - la décontraction de l'ensemble, la personnalité des "héros" (bien moins irréprochables que d'habitude, voire même dégénérés comme dirait Gamora, et surtout très drôles), et un message crânement assumé (une histoire d'amitié bien plus que de rédemption) emportent le morceau. Enfin, dans mon cas hein. Et confèrent à cet excellent blockbuster une identité propre. Parier sur ce réalisateur s'est avéré opportun !
12 Aout 2014
LaarisBon ben pour un pari c'était quand même encore bien formaté.
Je ne sais pas trop s'il faut saluer un laborieux début de volonté de changement ou à l'inverse fustiger le cynisme du truc qui essaie de faire croire qu'il est différent.
On verra ce qui en ressort après une nuit de sommeil.
12 Aout 2014
NikhoVraiment un bon édito, parfait pour pour se préparer à voir le film ce soir!
11 Aout 2014
SoulSympa l'edito et vivement demain soir que je puisse enfin voir le première envol des gardiens ! *o*
11 Aout 2014
Arnaud LehueSi le film risque de marcher aux Etats-Unis et à priori dans le monde, rien n'est sur quant à son succès en France, non ?
Bon je me doute bien qu'il arrivera à faire pas mal d'entrées, mais est-ce que ce sera un succès phénoménal ?
11 Aout 2014
RokterraUn édito bien cool qui nous rappelle que s'il n'a pas vraiment pris un chemin classique, le film avait vraiment tout pour devenir épique. Vraiment, je pense qu'on pourrait faire un docu sur sa production, y'a une aura autour c'est dingue, l'histoire du trailer qui était considéré comme nul et qui au final a marqué tout le monde, la transformation de Chris Pratt, l'équipe d'acteurs absolument géniale où les plus populaires sont pas forcement ceux qui ont le plus de succès dans le film...
Bon. Ben j'ai tellement hâte de le voir...
11 Aout 2014
guigui le gentilChouette édito :)
11 Aout 2014
LaarisJe veux bien croire que le film aurait pu être un flop s'il avait été mal géré, mais de là à parler de risque ... investir 170 millions quand on s'appelle Disney c'est pas non plus un coup à mettre la clé sous la porte.
11 Aout 2014
Tbecks7Super édito Sullivan, merci !
Et +1 PeterJQuill
Pour mesurer les risques, il suffit de tester la réaction de nos proches du grand public, pas forcément familiers à l'univers des comics, lorsqu'on leur parle de Gardians ou quand on leur présente son synopsis. Personnellement j'ai eu beaucoup de réactions moqueuses et qui ne prenaient pas au sérieux le projet ! Un raton-laveur qui parle, un arbre qui marche avec la voix de Vin Diesel, Dave Bautista, tout ça dans l'espace... C'est moins convenu et gage de succès que des films de super-héros classiques (Iron Man, Cap', Thor...)
Heureusement, la hype a pris grâce à la com' parfaite (les BA notamment) et l'internet qui s'est enflammé !
Et bien évidemment grâce à l'élément essentiel , la qualité du film :) (qu'il me tarde de voir !)
11 Aout 2014
PeterJQuillCela aurait pu être un énorme bouzin. Très honnêtement. Et les bonnes gens auraient dit que cela est normal que cela se crash, que le grand public n'a pas les mêmes goûts que le premier geek venu, que cela est trop "débile", et cela aurait fini dans le top 50 des blockbusters qui ont connu un énorme flop. Et nombreux auraient été ceux qui "l'avaient vu venir". Prenez simplement le temps de relire les commentaires qui fleurissaient à chaque nouvelle annonce concernant ce film ou à chaque nouveau trailer. Beaucoup d'excitation oui, mais également énormément de circonspection voir de mépris.
Rendons à James Gunn ce qui lui appartient : il à fait d'une équipe d'illustres inconnus certainement le meilleur film Marvel (à mes yeux bien sûr) et a réussi à remettre au goût du jour le film de super-héros pop sans tomber dans les travers d'un batman et robin ou d'un green lantern. Je n'ai pas la place ici pour discuter des choix artistiques qui se sont révélés géniaux (le casting, la photo, les couleurs, la soundtrack, les dialogues, ...) mais force est de reconnaître que ce film vient de loin et que cela fait du bien ce voir ce film cartonner au ciné ... Merci Marvel et à quand Nova ? 2/2
11 Aout 2014
pikul@Trololo & jeez : de nos jours, pour un blockbuster de ce calibre, on estime en moyenne le budget marketing à 50 % du budget de production (c'est en plus bien sûr, pas inclus). Ça doit amener à un budget de prod + marketing au alentour 250 millions pour GotG.
11 Aout 2014
PeterJQuillTrès bon édito, merci Sullivan.
Apparemment deux camps s'affrontent pour juger du caractère risqué ou non du film. Pour ma part j'aurais tendance à penser que juger ce film non-risqué ou au mieux "standard", et sans vouloir tomber dans la philo de comptoir, cela s'appelle tomber dans une illusion retrospective.
Comme le rappelle Sullivan pensez d'abord que l'on parle d'une équipe. Pas un héros inconnu à introduire, non une équipe. Cinq individus plus différents les uns que les autres que l'on va devoir nous introduire, nous faire aimer, nous raconter leurs histoires et nous convaincre que c'est le truc le plus cool du monde. Et tout cela en deux heures.
Et quelle équipe : Un (faux) tocard de l'espace enlevé par des aliens quand il avait huit ans, un body-builder tatoué qui s'appelle "le destructeur", une alien verte et surtout un ration laveur et un arbre qui parlent. QUI PARLENT ! Que l'on puisse l'imaginer et y croire c'est une chose, mais en faire la chose la plus hype du moment c'en est une autre.
J'y ai toujours cru à ce film sans que j'arrive vraiment à l'expliquer. Mais j'ai également eu souvent peur du désastre final, artistiquement mais surtout au niveau du BO 1/2
11 Aout 2014
darklinuxComment ça inexpérimenté Karen Gillian ??? !! vous avez dormi en Corée du nord ?
11 Aout 2014
Guillaume_PrsBon édito, perso je n'ai jamais considéré le film comme étant un pari risqué (en tout cas pas plus que les autres films) d'autant qu'Avengers à changé énormément de chose tant du côté de la puissance de Marvel que de la perception qu'à le public de cet univers. Le potentiel film Black Panther est je pense le plus risqué des pari de Marvel Studio. Bref vivement demain soir, 19h45 !
11 Aout 2014
jeez@trololo : sauf erreur, quand on parle "budget", il s'agit généralement du budget alloué à la production du film et non à sa communication. Il n'y a donc pas sur cette somme (en l?occurrence 170 M) de répartition. J'ignore quel est le budget marketing des Gardiens...
11 Aout 2014
jeeztrès bon édito, sur le fond comme sur la forme. En effet, pour répondre à la question initiale, il fallait revenir bien en amont, au niveau du processus créatif et décisionnel. Certes Disney a tenté de réduire les risques a posteriori au travers d'une campagne marketing bien orchestré, mais il faut savoir reconnaître les risques inhérents à la décision de confier 170 M à un réalisateur peu connu pour filmer des personnages à peine plus connus et interprétés par des habitués aux second voire troisième rôle.
PS : J. Gunn "embarque à bord du navire" et non débarque.
11 Aout 2014
TrololoDifficile de donner mon avis tant que je n'aurais pas vu le film (je reviendrais poster le moment venu) mais ça serait intéressant de voir la répartition du budget entre le film et le marketing tout de même. Je me demande où on peut trouver cette info...
11 Aout 2014
Republ33kEdito' très intéressant cher Sullivan :) Merci ! Pour rajouter une petite pierre à l'édifice je dirais que Guardians n'est fondamentalement plus risqué que les autres prod' Marvel Studios. Si j'étais un gros studio ou un producteur, je produirais volontiers une nouvelle franchise space op' pleine de personnages attachants (coucou les produits dérivés) et de références saines. En revanche, un Iron Man, un Thor... Même si on peut dire que sont des personnages de comics plus connus, on ne peut pas dire qu'ils correspondent directement à un concept cinématographique. Alors que les Gardiens se rapprochent tout de suite de Star Wars, du space op' à l'ancienne... Un genre que tout le monde adore et qui avait disparu de nos écrans (n'en déplaise à J.J Abrams)