Pour faire plaisir aux patrons, Marvel valide une série de couvertures Tron : Ares avant le film

Et ce n'est même plus tellement provocateur de le signaler : au fond, dans le présent, Marvel a pu conserver un statut relativement autonome, comparativement aux prérogatives immédiates du groupe Disney. L'enseigne ne ressent pas nécessairement le besoin de participer aux campagnes publicitaires des nouvelles productions Pixar ou Lucasfilm, et les héros de la Terre-616 ne passent pas non plus tous leurs weekends dans les parcs d'attractions de la société mère. En revanche, quelques liens solides ont pu être institués depuis peu, et notamment par l'apparition de comics Disney (au sens strict) dans l'offre des produits Marvel proprement dits : du Picsou, du Donald, du Donald, du Picsou, sans oublier les couvertures variantes servies en offrande aux grands patrons de la pyramide pour célébrer l'anniversaire des cent ans du groupe.

Au global, ces initiatives restent suffisamment rares, et globalement inoffensives, et surtout encore assez éparpillées pour donner le sentiment d'une simple passe décisive entre bons camarades plutôt qu'un authentique rapport de féodalité entre les différents étages du conflomérat.

Age of (Ul?)Tron

Maintenant, le fait est que cette relation hiérarchique est sur le point de passer un nouveau pallier avec l'opération du moment : pour accompagner la sortie du film Tron : Ares de Joachim Ronning, plusieurs comics Marvel ont prévu d'afficher une poignée de couvertures variantes aux couleurs de la mythologie de cet univers de fiction. Ce nouveau programme a été sélectionné pour le mois d'octobre, en accompagnement direct de la sortie du prochain volet de la trilogie dans les salles de cinéma, et concerne les numéros New Avengers #5 (Hicham Habchi), Ultimate Wolverine #10 (Phil Noto), Avengers #31 (Mahmud Asrar), Captain America #4 (Stephen Segovia), Incredible Hulk #30 (Ben Su), Jeff the Land Shark #5 (Rod Reis), Miles Morales : Spider-Man #39 (Paco Medina), Moon Knight : Fist of Khonshu #13 (Luciano Vecchio), Ultimate Spider-Man #22 (Javier Fernandez) et Black Cat #3 (Mirka Andolfo).

En tout, dix couvertures ont donc été validées pour participer aux données de la campagne publicitaire indirecte du film Tron : Ares. Ce qui ne représente pas grand chose de concret sur le papier. Dans ce genre de cas, on aurait même plutôt envie de penser que ce seront bien les comics Marvel qui profiteront de cet effet de halo, et pas forcément le blockbuster lui-même. De fait, l'économie du cinéma ne dépend pas du nombre de variantes présentées dans les rayons des librairies spécialisées. En revanche, inversement, les fans des deux premiers films Tron pourraient trouver amusant de voir leurs super-héros préférés habillés dans les codes visuels de cet univers ludique, avec un Ultimate Wolverine posté sur la célèbre moto' de la saga, au hasard... En revanche, la question du rapport entre Tron et Marvel peut se poser. Définitivement, ces deux propriétés intellectuelles n'entretiennent pas la moindre relation de proximité, en dehors de leur voisinage de fait au sein du groupe Disney.

Fait suffisamment rare pour être souligné : l'éditeur a même publié un communiqué de presse pour justifier de cette opération publicitaire. Ce qui n'est pas inhabituel en soi (même si, généralement, la rédaction ne ressent pas le besoin de les traduire dans ces colonnes). Mais la démarche participe aussi, et certainement involontairement, de cette impression d'un élève qui a vraiment, vraiment très envie d'être élu comme le chouchou du prof'.

"Les plus grands héros de l'univers Marvel ont été numérisés et transportés dans le monde du Grid ! Dans cette cyber-réalité fascinante, Captain America, Scarlet Witch, Spider-Man et bien d'autres encore, ont été transformés en programmes superpuissants, dans des courses de Light Cycles pour le plaisir des Users ! Avec certains des meilleurs artistes de l'industrie aux commandes, ces couvertures variantes reprennent les costumes lumineux et élégants de l'univers de Tron en écho au personnage principal du film de Joachim Ronning, Ares, un programme ultra-intelligent qui s'est évadé du monde numérique pour investir le monde réel !"

Dis donc, moi ça ne me donne envie de voir le film tout ça. Mh mh. Ares vous dites ? Mazette. Captivant, héhé. Et puis, oh, regardez, Wolverine il est sur la moto' !! Vroum vroum snikt, j'ai pas raison l'équipe ?

Alors, est-ce que Marvel a prévu de suivre la formule des restaurants Disneyland et de leurs "burgers du moment" aux couleurs des franchises que le conglomérat a prévu de pousser d'une année sur l'autre dorénavant ? Il est encore un peu trop tôt pour trancher cette question avec certitude. Et pour voir plus loin, il est même presque un peu dommage de voir cette opération tout miser sur la sortie précise de Tron : Ares plutôt que sur l'historique précis de la franchise en elle-même.

C'est vrai : l'éditeur aurait au moins pu citer le nom de Moebius, responsable de l'esthétique du premier volet (quand même, c'est le genre de choses que l'on prend le temps de signaler en temps normal), ou le motif de l'intelligence artificielle et des robots, équitablement présents dans l'univers Marvel, pour former une connexion un peu plus authentique (ou un peu moins corporatiste, mettons) entre ces deux cousins du groupe Disney. Vous allez dire qu'on chipote. Et vous avez raison. C'est vrai. On chipote. Puisque rien de tout ça ne représente le moindre danger pour les comics de super-héros, est-il réellement nécessaire de commenter un mignon petite fayotage dans les règles au détour d'autres actualités autrement plus sérieuses ? Peut-être pas, mais c'est toujours rigolo de voir que Chester Cebulski se donne beaucoup de mal pour sa prime de fin d'année Accessoirement, les fans de Nine Inch Nails attendent aussi la sortie du film (ou de la bande-son du film, c'est selon), on peut donc parier sur une convergence des luttes inattendue.

Dans l'intervalle, on espère surtout que quelqu'un chez Marvel aura eu la bonne idée de mettre Ultron sur l'une de ces fameuses couvertures variantes. Ce serait dommage de ne pas en profiter pour se fendre la poire avec un bon gros jeu de mot de tonton, les occasions sont trop rares dans le présent.

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