Attendu comme le Messie par une horde de fans de Scott Snyder, de Sean Murphy, des deux ou simplement par les nostalgiques d'un Vertigo flamboyant, The Wake s'est laissé approcher Mercredi dernier pour mieux nous rappeler la météo grisâtre et l'ambiance maussade d'un printemps que l'on se lasse d'attendre. Tirant tous les tiroirs du référentiel d'un scénariste que l'on a connu plus enclin à favoriser l'originalité, ce blockbuster quasi-indé' offre aux amoureux de John Carpenter une histoire aux apparences aussi convenues que diablement efficace. Décryptage :
Audacieux dans sa narration, The Wake démarre par un Flashforward des plus déroutants. Le lecteur y découvre un univers futuriste, 200 ans en avant, alors que les Etats-Unis semblent avoir été détruits par une menace venue de la mer sans précédent. Sous les flots, le New York dystopique à souhait voulu par Scott Snyder profite de couleurs hallucinantes (et hallucinées) de Matt Hollingsworth, des cheveux turquoises à l'équipement jaun(âtre?) du Dauphin que semble connaître l'héroïne.
Trop courte, cette intro', qui ne trouvera d'explications que dans de futurs numéros de la série, laisse alors la place au déroulement principal de l'action de The Wake : on y fait la connaissance du Dr Archer, cette fois-ci véritable héroïne, apparemment fan des Flak-Jackets (le groupe de Punk Rock Jesus) jusqu'à la casquette.
Experte en fonds marins, le Dr Archer semble rattrapée par de vieux démons et est "contrainte" à travailler main dans la main avec les USA pour résoudre une mystèrieuse affaire ayant fait surface (hum...) en Alaska, le tout sur un lit de Cryptozoologie et de créatures (menaçantes, difformes et profondément Lovecraftiennes) venues des fonds marins.
Timide, presque sur le reculoir par rapport à son histoire, Scott Snyder fait alors le choix de la décompression avec son récit. Pas de panique, The Wake se paye le luxe d'être publié en 10 numéros. C'est d'ailleurs cette pagination finale inhabituelle qui bouleverse les habitudes du créateur d'American Vampire, qui semble avoir du mal à lâcher du leste ou à briller en fanfare dès son premier numéro. Très (trop?) convenu, ce premier dixième fait en effet la part belle à une technique brillamment exécutée, que ce soit dans l'écriture ou au dessin. Une technique malheureusement étouffée par sa propre ambition...
S'aidant d'habiles références aux maîtres de l'horreur des années 80, Scott Snyder se prend presque les pieds dans le tapis d'un étalage de ses connaissances bien digérées, sans prendre la peine de livrer de vraies idées neuves, à la manière d'un Damon Lindelof qui a toujours bien révisé ses leçons.
Flashforward, dialogues subtils, ellipses, corporations dangereuses, secrets d'états, menace venue "d'ailleurs" et contexte géographique en Alaska : ce sont autant de trucs et astuces de scénaristes qui font mouche, mais qui sont éculés depuis 20 ans au bas mot.
The Wake serait-elle une série rétro-futuriste, à mi-chemin entre l'héritage d'un Lovecraft omnipotent et l'hommage aux seigneurs du nouvel Hollywood que sont Ridley Scott et John Carpenter ? Malheureusement, un seul numéro ne suffit pas à répondre à cette question, mais nul doute que le duo créatif en charge du titre en a suffisamment sous la pédale pour nous surprendre et nous émerveiller. Et quitte à connaître le fin mot de cette belle promesse en 2014, faites le choix de monter à bord dès maintenant !
07 Septembre 2014
Alex in the boxEn démarrant j'ai cru à un Fathomlike plus stylé mais en fait pas du tout, c'est 100 fois meilleur :)
02 Juin 2013
Benji_du91J'ai pas lu mais ça m'a donné envie! (bon, même si, soyons réalistes, il en restera plus un seul)
D'ailleurs, très bonne review ,Sullivan, chapeau!
02 Juin 2013
CedxBonne review. J'ai envie de lire ce comic.
01 Juin 2013
peter@Devil: Son film est quand même bien différent de celui de Scott, même si l'histoire a des similitudes (un groupe d'humains traqués un par un par une créature dans un lieu fermé).
01 Juin 2013
DevilPouletCarpenter a fait pas mal de navets, et son "meilleur" film est un copié/collé presque intégral d'Alien...
01 Juin 2013
ArnaudCorentin > Si je ne me trompe pas, le n/b de Punk Rock Jesus (auquel tu fais sûrement référence) n'avait pas été souhaité par Murphy, mais par Vertigo, même si artistiquement ça donnait effectivement un certain cachet. En revanche pour une série censée se passer sous l'eau, opter pour du noir et blanc (et donc pas de bleu) serait assez ... osé, non ?
01 Juin 2013
identifiantBonne review.
Personnellement j'ai aimé ce titre, de part son récit que par son dessin. Vivement le #2 !
01 Juin 2013
CorentinSans vouloir remettre en cause le talent de Scott Snyder (comme si c'était mon genre en plus^^) j'ai trouvé ce numéro 1 extrêmement décevant, c'est le type de début facile et éculé au possible et tant dans les dialogues que dans les personnages introduits, sans aucun relief.
Et même du point de vue graphique, je trouve ça presque dommage que cette série n'ait pas fait le choix du noir et blanc, le talent de Murphy aurait été encore plus sensible et l'ambiance aurait fait moins préfabriquée.
01 Juin 2013
ArnaudCe n'est qu'un #1, donc wait & see, même si pour l'heure je reste sur ma faim (logique, on n'en est qu'au #1). C'est lent, avec deux explications possibles : soit le nombre de numéros (important) a été choisi par DC, et Snyder est donc contraint de temporiser, soit Snyder souhaite imposer à son histoire un rythme lent à la DOTF, et pour le coup il a intérêt à avoir quelque chose à raconter afin d'éviter le coup du soufflé qui retombe.
Au final cette histoire a un côté propret qui la rend (pour l'instant) cool, mais sans plus. J'adore le style narratif de Snyder, qui n'est jamais meilleur que quand son histoire est ambitieuse et/ou originale. Comme ici. Sauf qu'ici, j'ai pas l'accroche que j'avais pu avoir avec Severed, la Cour ou Swampy. Avoir UNE recette de schéma narratif, aussi efficace soit-elle, est peut-être sa plus grande faiblesse.
01 Juin 2013
peter"l'hommage aux seigneurs du nouvel Hollywood que sont Ridley Scott et John Carpenter"
Je les qualifierait plutôt de seigneur du cinéma d'horreur/fantastique(j'ai toujours considéré The Thing comme le meilleur film d'horreur ever), les seigneurs du nouvel Hollywood étant Coppola, Scorsese ou Lumet...
01 Juin 2013
GiantJackFranchement, la review est vraiment bonne je trouve, chapeau !
En ce qui concerne ce numéro, j'ai vraiment adhéré, et j'ai été très agréablement surpris par un Snyder simple mais très très efficace et intelligent dans les dialogues. Ca m'a un peu soulagé de pas retrouver ce lien ultra métaphorique entre la narration et les images qui me fatigue beaucoup à force, tant il a pris l'habitude de l'utiliser à tort et à travers. C'est sobre, ça donne hyper envie de voir la suite (cette fin ! On comprend rien mais c'est génial !), ça lance beaucoup de pistes. Franchement conquis, alors que j'étais assez méfiant. Et Sean Murphy, à part sur certains visages, j'ai compris pourquoi vous l'aimiez tant. C'est vraiment captivant visuellement.