Home Brèves News Reviews Previews Dossiers Podcasts Interviews WebTV chroniques
ConnexionInscription
Terreur Sainte, la review

Terreur Sainte, la review

ReviewDelcourt
On a aimé• L'expérience visuelle
• C'est quand même le retour de Frank Miller
On a moins aimé• Le message dérangeant
• Un peu trop cher
Notre note

Aujourd’hui nous allons parler d’un titre un peu particulier. Il est rare qu’une oeuvre soit polémique avant même sa sortie, que ce soit par son sujet ou son auteur, ou encore par les deux. C’est le cas ici de la dernière oeuvre de Frank Miller qui est sorti aujourd’hui chez Delcourt. A un moment où un film anti-musulman et les unes de Charlie Hebdo déchaînent les passions, et où le prix sur la tête de Salman Rushdie augmente de semaine en semaine, voici une oeuvre du controversé auteur de 300 et The Dark Knight Returns qui vient nous présenter un pseudo-Batman en guerre sainte contre Al-Qaïda. De quoi créer un frisson chez les libraires.

Si Frank Miller sera toujours considéré comme un grand auteur, le cynisme et la violence de ses oeuvres passées et présentes nous apparaissent de plus en plus ambigus à la lumière de ses déclarations ces dernières années. Il est difficile d’aborder ses nouveaux travaux sans se dire qu’ils soient le fruit d’une pensée à la limite de l’extrémisme de droite. Aussi quand il propose à DC Comics un recueil sur Batman combattant Al-Qaïda, la maison d’édition se voit obliger de prendre de grosses pincettes et de gentiment refuser un sujet sulfureux. Ce ne sera pas le cas de Legendary Comics, label issu de Legendary Pictures et qui débute tout juste en 2010, et qui voit là une bonne occasion de se lancer sur le marché en grandes pompes. Holy Terror est né.


Bien entendu on oublie Batman, mais le changement de nom et de costumes n’ont pas vraiment d’importance tant l’esprit du Chevalier Noir, et particulièrement celui de Miller, plane sur le bouquin. On retrouve donc Non-Batman en pleine chasse de Non-Catwoman en insistant bien sur le caractère spécial de leur non-relation. Et boom. Un attentat vient tout chambouler et le Non-Chevalier Non-Noir va s’engager dans la guerre pour laquelle il se prépare depuis toujours.

Miller tape là où ça fait mal dans un Amérique post-11 Septembre, et nous livre son état d’esprit et celui qu’il pense (qui est ?) partagé par beaucoup de compatriotes : la peur, la colère et l'incompréhension. Ce n’est pas le premier à le faire, et le résultat aurait pu être excellent. Le début du recueil est d’ailleurs plutôt pas mal, et la mise en scène de l’attentat aussi : on ressent la violence de l’événement, dans une mise en scène très visuelle. Là où le bât blesse, c’est dans la suite qui nous montre un amoncellement d’amalgames sur le terrorisme et les grandes figures de ce monde (dont certains sont morts depuis). Tout ne concerne d’ailleurs pas les musulmans, même si on retrouve l’éternel confusion Moyen-Orient=Musulmans=Terroristes. Non, on a aussi des figures populaires que Miller considère comme anti-américanistes, avec notamment un Michael Moore à la limite du souriant face aux attaques. Le message : “ceux qui ne sont pas avec nous sont contre nous, je le sais depuis longtemps, et je suis prêt à me battre pour défendre ma vision du monde”, soit en y réfléchissant bien, le même message que les extrémistes que l’auteur cherche à dénoncer...


Alors que retient-on de ce livre ? Un goût amer dans dans la bouche. L’idée que oui Frank Miller est de retour (et rien que pour ça il mérite la lecture), mais que l’idée qu’on commençait à avoir de lui se confirme. Et si on ne peut s’empêcher d’y penser en lisant, et que cela remet aussi en question à nos yeux ses précédentes oeuvres, on se dit qu’il faut peut-être dépasser l’auteur pour se concentrer sur l’oeuvre (après tout combien de collèges et lycées en France sont nommés en hommage à des poètes et écrivains qui étaient aussi des tueurs, voleurs, violeurs ou pédophiles ? On peut faire l’impasse). Mais même au-delà de ça, le tout reste mitigé et ne dépassera pas le statut de “OK”. Heureusement que l’expérience visuelle lui fait gagner quelques points.

Manu
est sur twitter
à lire également
Commentaires (41)
Vous devez être connecté pour participer