Comme toute adaptation d'un média à l'autre, les films inspirés de comic books n'échappent pas à la sacro-sainte question de la fidélité. Et encore plus depuis que les super-héros représentent la tendance dominante à Hollywood. Nous en avons eu de nouvelles preuves durant ce week-end de San Diego Comic Con : beaucoup ont évoqué la fidélité de Batman v Superman aux comics, pendant que d'autres me demandaient si Ant-Man était loyal aux comics qui l'inspirent. L'occasion pour nous de revenir sur sujet épineux.
Pour ne pas vous cacher mon propre avis plus longtemps (et ce n'est peut-être pas l'opinion de tous les membres de la rédaction, je tiens à la préciser), j'ai toujours considéré cette question secondaire, estimant que la transition d'un média à un autre nécessite toujours quelques écarts et autres réinventions. Cela dit, nous ne parlons pas de l'adaptation de romans, : les comic books - plus que tout autre variante de la bande-dessinée, à mon sens - sont des œuvres particulièrement visuelles, quand elles ne sont pas tout simplement Hollywoodiennes dans leurs thématiques ou leurs découpages. Et puisque les médias sont intimement liés, et encore plus depuis quelques années, il est normal de voir la question de la fidélité revenir sur le devant de la scène, avec une force tout simplement décuplée par la popularité des comic books dans la culture populaire.
Comme je le disais, nous avons pu le (re)voir ce week-end à l'occasion du trailer de Batman v Superman, notamment. Une bande-annonce dans laquelle tout le monde semble avoir trouvé son compte. À en croire mon propre compte Facebook, les fans de Frank Miller, les nostalgiques biberonnés à Batman : The Animated Series et les gamers convaincus par le Chevalier Noir selon Rocksteady ont vu dans le film de Zack Snyder quelque chose de profondément fidèle au matériau de base, ce qui est plutôt surprenant quand on sait que le métrage fait à la fois office de suite (à Man of Steel), de stand-alone (pour Batman) et de préquelle (à Justice League). Pour passer du côté de la concurrence, la violence et l'humour méta du trailer de Deadpool ont totalement rassuré le public, dorénavant convaincu par la sincérité de Ryan Reynolds et la fidélité de la 20th Century Fox au personnage.
Deux exemples radicalement différents qui nous prouvent une chose : la fidélité peut prendre bien des formes. Récemment, on peut l'apercevoir dans les costumes du Clown Mercenaire ou du Chevalier Noir, qui pour leurs nouvelles apparitions au cinéma, s'offrent des tenues tout droit sorties des planches de nos comics préférés. Et assurément, l'arrivée de costumes directement repris du matériau de base (notons la surprise du costume très Gotham By Gaslight de Batfleck) a tendance à nous rassurer, si ce n'est à nous faire plaisir. Il y a sans doute une stratégie commerciale derrière ce geste de bienveillance, mais qu'importe, les fans, et moi le premier, sont ravis de retrouver une chauve-souris obèse sur le torse d'un Batfleck colossal.
L'effet de la fidélité est évident, parfois immédiat, même, mais le sujet est il pour autant intéressant ? Rien n'est moins sûr. Tout d'abord, car on ne saurait définir clairement ce qu'est la fidélité aux comic books. Il suffit de voir la variété des adaptations proposées pour se convaincre de la multiplicité des fidélités. Qui est le plus loyal aux comics ? Un Zack Snyder qui transforme les cases de Watchmen en plans ralentis ? Un Nolan qui pioche allègrement chez Miller ou Jeph Loeb pour sa trilogie Batman ? Marvel Studios et les multiples armures de Tony Stark ? Chacun voit la fidélité là où il peut, ou veut, la voir.
Difficile, donc, de conclure sur la fidélité des films adaptés de comic books à leur matériau de base. Surtout quand ils sont aussi nombreux et populaires qu'en 2015, où Rocket Raccoon, les écrits de Frank Miller ou l'identité du vrai Mandarin n'appartiennent plus aux lecteurs de comics, mais bien à une masse de spectateurs enjoués à l'idée de retrouver leurs héros d'une année à l'autre. En l'absence d'une vraie définition pour la fidélité aux comics, et au beau milieu d'une époque où ils se sont démocratisés, je crois que cette question devient profondément secondaire.
Si nous comptons distinguer les bons films (adaptés de comics) des mauvais dans les années à venir, il nous faudra plus que la fidélité comme critère de jugement. Juger un film à ses qualités intrinsèques reste primordial dans des temps de forte concurrence, et ce sont les temps qui nous attendent. Mais après tout, le retour en force de cette idée de fidélité n'est pas anodin : le modèle d'univers cinématographique partagé brouille notre attention, en enchaînant les références au passé comme au futur, et on finit parfois par en oublier le métrage en lui-même. On le voit en sortant d'une salle de cinéma lorsque tout le monde évoque les scènes post-générique, et on retrouve la même forme d'oubli avant la sortie d'un film, où les débats sur la fidélité (Deadpool par exemple) ou non (Fantastic Four) d'un métrage à ses comics font toujours mouche !
En somme, comme beaucoup d'autres sujets entourant les films super-héroïques, la fidélité fait office de vraie-fausse question. Parce qu'on ne saurait la définir clairement, parce que la matériau de base appartient à tous, et parce qu'elle diffère d'un film à l'autre : comme me le disait Sullivan, on aurait par exemple du mal à parler de fidélité chez Suicide Squad, puisque chaque nouveau de l'escouade aligne des personnages différents, à l'image de Guardians of the Galaxy en face. Et d'ailleurs, la question devient caduque à chaque nouvelle adaptation osée : peut-on parler de fidélité chez Ant-Man quand on sait qu'il n'existe pas d'idée définie, dans l'inconscient collectif, sur ce qu'est un comic-book consacré à l'Homme-Fourmi ?
Ne nous restent alors que nos propres émotions par rapport à un film, des réactions finalement bien plus saines pour juger un métrage que des questions à moitié caduques comme la fidélité. Ça ne nous empêchera pas de nous montrer hostiles ou favorables à l'image que renvoient ces films aux comics qui les ont inspiré. Pour revenir sur la trilogie The Dark Knight, par exemple, j'ai toujours trouvé ces trois films très proches des comics Batman dans le sens où les émotions qu'ils provoquent chez moi sont comparables à celles que m'offre la lecture d'un bon titre consacré au Chevalier Noir. Et pourtant, Christopher Nolan est toujours resté très éloigné de l'univers gothique et des vilains fantasques inhérents au personnage, à l'exception de quelques références piochées ça et là. La fidélité est un sujet passionnant et complexe, mais il ne doit pas nous faire oublier la ligne qui sépare le bon du mauvais film.
22 Juillet 2015
Exoseed@Evil66 : Tu as tout à fait raison, Hulk et Superman sont exactement les mêmes personnages. Les deux sont des monstres incontrôlables et sur-agressifs gouvernés par leur colère. C'est une excellente description de Superman, bravo.
22 Juillet 2015
Evil66@Exoseed : c'est pas comme si Zod le laissait respirer hein...bizarre, quand Hulk dégomme un vaisseau alien en pleine ville sans se préoccuper de personne ça dérange pas...
17 Juillet 2015
Exoseed@Alex in the box : Pour le meurtre de Zod, admettons. C'était la première fois, on peut imaginer qu'il le regrette et qu'il décide seulement ensuite de ne plus tuer. OK.
Mais pour la ville c'est juste absurde. Même si il avait sauvé quelques civils et essayé d'amener Zod loin de Metropolis, il aurait eu à rendre des comptes par la suite puisque l'humanité aurait de toute façon été effrayé par sa puissance. Ça n'aurait donc rien changé aux développements narratifs futurs envisagés par Snyder, mais par contre ça aurait permis de respecter ce qu'est et ce que représente le personnage de Superman.
Et je ne parle pas non plus d'un personnage "plein de maîtrise". Il aurait pu essayer de sauver des civils et échouer. Là on a pas un seul plan où il fait autre chose que taper sur Zod comme un bœuf.
17 Juillet 2015
Alex in the boxEntièrement d'accord avec naflo, c'est nettement plus intéressant d'avoir la vision du réal et de l'équipe créative plus qu'une fidélité parfaite avec l'oeuvre, tant qu'il y a une notion de respect. Beaucoup d'entre vous parlent de MOS. Ok Big S tue Zod et détruit la ville, mais c'est ce que Snyder voulait afin qu'il rende des compte dans BVS, et que lui même apprenne de ses erreur. Le message est tout de même nettement plus intéressant qu'un Supes conscient de tout et plein de maitrise dès son premier fight...
16 Juillet 2015
nafloJe répondrai avant de lire l'édito, les film ne doivent pas être fidèle mais respecter l’œuvre, respecter pas dans le sens respecter le contenu mais adapter une franchise avec respect c'est lui rendre hommage.
Je vais de ce pas lire l'édito.
15 Juillet 2015
minbon édito,
petit troll ;
Snyder ce n'est pas le Greg land du cinéma ?
15 Juillet 2015
X-moi*personnage principal mais en énonçant que les robots sont mauvais ( pour ceux qui ne le save pas Asimov cherche à prouver que les robots sont des objets comme les autres donc inoffensif en soi) Pour en revenir à l'exemple des comics je considère à titre personnel que l'adaptation est fidèle au comics lorsqu'elle retranscrit dans un autre art le message/ la morale originelle du comics (ou plus souvent de l'arc narratif) ou du moins les émotions que celui-ci nous transmet.
Cependant je dois nuancer mon propos : un film qui "trahis" le matériau original peut être bon, bien qu'il ne retranscrive pas l'idée original.
Sur ce bonne nuit.
15 Juillet 2015
X-moiBonsoir à tous, je n'ai malheureusement eu le temps de seulement survoler les commentaires ainsi veuillez m'excuser si je répète un idée qui a déjà été évoqué.
Après la lecture de l'édito de bonne qualité comme d'habitude j'ai été un peu gêné par le fait que l'on n'y définisse pas clairement la notion de fidélité au-delà des exemples. Malgré ma piètre connaissance de l'art je sais (ou croit savoir, c'est selon) que l'art est une sorte de prolongement de la philosophie dont le but est de faire réfléchir le spectateur/lecteur ainsi 2001 multiplie les références à Ainsi parlait Zaratousthra, Star Wars dénonce ouvertement le 3ème Reich, etc. Les comics étant le 9ème art ils répondent donc à cette logique et on peut en déduire ce qu'est la fidélité. Une œuvre d'art doit par définition faire passer un message et une adaptation reste une adaptation du moment qu'elle respecte le message original (j'y exclus les caricatures/parodies qui sont une critique de l'œuvre) par exemple les livres de Zola découle de la pensée de Marx et une adaptation de Zola se doit de respecter cette pensée, autre exemple le film I robot ne respecte plus le livre d'Asimov non pas en introduisant un nouveau personn
14 Juillet 2015
UltralucideC'est surtout en grande partie le scénario de Terrio, Goyer c'est fait larguer petit à petit ;)
Autrement rien ne nous dis que Batman ait l'envie d'attaquer Superman tout de suite (sachant qu'il aurait eu 2 ans pour le faire), je pense que forcément il va se passer un truc pour leur donner l'envie de se battre et je pense que Luthor sera impliqué.
14 Juillet 2015
StarLord528A mon sens, un film de super-héros n'a pa besoin d'être très fidèle qu matériau d'origine our être bon. C'est même une très bonne idée quelque chose de différent. Ça montre une réelle créativité parfois même. C'est pour ça que Fantastic Four me branche beaucoup aussi.
14 Juillet 2015
ExoseedAh ouais ? Il est toujours annoncé au scénar sur IMDB pourtant.
14 Juillet 2015
Trunks93Apparemment c plus Goyer au scénario
14 Juillet 2015
Exoseed@Trunks93 : Ah ben en même temps tu peux pas attendre la même profondeur et la même intelligence d'un scénario écrit par Frank Miller et David S. Goyer.
14 Juillet 2015
Trunks93Je suis d accord pour le "se méfier", et les plans à la tour de Babel on tjr été existé, du moins ds le modern age. Ms la ca me semble too much, c'est plus se méfier, c'est decider tout de suite de détruire la menace , sans le recul qui est justement caractérise de Bruce Wayne. Le scénar de Miller marche bien ds le contexte de deux amis viellisant et allant ds des directions opposés. Là on semble être dans un autre cas, un batman existant depuis apparement 20 ans et un tout jeune Sup. En fait la réaection de Bruce Wayne me semble trop basé sur l' émotion que sur la raison.
14 Juillet 2015
Exoseed@Trunks93 : "Entre le batwing defonsant des hommes" C'est vrai, ça on jugera sur pièce. Par contre ça : "batman dont la première réaction face à sup est de vouloir le détruire ... " Désolé, mais c'est une des caractéristiques de Batman de se méfier de tout ce qui représente un danger potentiel et d'avoir un plan adapté pour l'affronter si besoin est. En l’occurrence, Superman ayant contribué à la destruction de Metropolis, il est évident qu'il veut l'éliminer (d'ailleurs, c'est en gros le scénario de The Dark Knight Returns de Miller hein...).
14 Juillet 2015
Trunks93Le Batman de Snyder respectant le Batman des comics,après 2 trailers j ai des doutes la dessus. Entre le batwing defonsant des hommes, et batman dont la première réaction face à sup est de vouloir le détruire ... Bon on jugera ds le contexte
14 Juillet 2015
Trunks93Pour continuer le sur MOS le probleme pour moi c le perso de Jonatan Kent, qui est vraiment dénaturé, dc ca se ressent sur Clark
14 Juillet 2015
Exoseed@Neibaf63 : "Quelque chose me dis que tu aurais trouvé autre chose pour remettre en cause la fidèlité au personnage/univers etc." Tu as tort. D'ailleurs Batman v Superman s'annonce comme une adaptation beaucoup plus fidèle par exemple, même si je crains que le film ne souffre d'autres défauts (notamment d'un point de vue du scénario). Le Batman de Snyder me semble respecter ce qu'est Batman dans les comics. On jugera sur pièce mais c'est plutôt bien parti.
14 Juillet 2015
Neibaf63@Exoseed "Le problème c'est que tu (et Robb Stark et Trunks93 aussi visiblement) considères que le seul moyen pour un réalisateur de s'exprimer artistiquement c'est de proposer une nouvelle version d'un personnage."
Trouve moi où j'ai pu dire ça ?! Je n'ai jamais dis ça. Mon prof de scénar (aussi naze était-il) avait pour l'habitude de dire quelque chose que j'ai mis assez longtemps à vraiment comprendre : "un réalisateur est là pour nous donner sa vision du monde". C'est de ça finalement que je veux parler. Sa vision peut être celle que tu considères comme juste, mais peut, ne pas l'être aussi.
Je suis d'accord avec toi sur MoS que le choix de la destruction de Metropolis remet en cause l'essence même (donc ce qui en fait son identité ??) de Superman mais est ce que pour toi si il avait sauvé les gens (pour faire vite) le film aurait été "une adaptation fidèle au comics" pour autant ? Quelque chose me dis que tu aurais trouvé autre chose pour remettre en cause la fidèlité au personnage/univers etc.
14 Juillet 2015
Trunks93Apres MOS a effectivement des probllèmes de scénars et Sup aurait sans doute pu gerer le crise autrement