Les américains disent qu’on ne peut jamais revenir à la maison. C’est pourtant bien ce qu’a fait Mark Waid (JLA, Fantastic Four) en reprenant Ruse en compagnie de Mirco Pierfederici (X-Men Legacy Annual), une série qu’il avait créé du temps de Crossgen Comics. Vous n’êtes en effet pas sans savoir que Marvel a racheté les droits des titres du défunt éditeur et a décidé d’en relancer deux (pour l’instant) sous forme de mini séries. Voyons donc ce que vaut ce Ruse nouvelle version.
Pour ceux qui
ne le sauraient pas, Ruse est un pastiche de Sherlock Holmes se déroulant aussi
dans l’Angleterre victorienne. Simon Archard, le héros, est un détective aussi
génial qu’asocial. Il est secondé par la belle et tout aussi brillante Emma
Bishop. A la manière de Watson elle la « porte d’entrée » du lecteur
dans l’univers de Ruse, apportant une touche d’humanité au récit, notamment en
jouant les narratrices. Profitons en pour éclaircir un point : si vous
n’avez pas lu la série originale, vous pouvez bien commencer par ce numéro sans
avoir l’impression de prendre le train en marche. Il n’y a aucune référence aux
évènements passés. Et surtout Waid utilise la première moitié du numéro pour
raconter une petite enquête bien ficelée qui introduit agréablement les
personnages. Par contre, les anciens lecteurs seront heureux de trouver
quelques allusions aux anciens personnages secondaires (les agents d’Archard).
Du coup, on peut se demander si on est face à un reboot pur et simple, ou
plutôt face à un Ruse volume 2. Mais au final, peu importe. Ce qui compte,
c’est que Mark Waid n’a rien perdu
de son talent. Archard est charismatique, arrogant, par moments cassant et
toujours passionnant. Emma, elle, est pétillante, drôle et attachante. Le duo
fonctionne parfaitement, notamment grâce à des dialogues impeccables. Les
répliques excellentes se succèdent et je vous défie de finir le numéro sans au
moins esquisser un sourire. De plus chaque personnage a réellement sa propre
« voix », qu’il s’agisse des héros ou même des seconds
rôles. Par contre, il faut bien reconnaître que ce premier numéro ne
révèle pas grand-chose sur l’intrigue de la mini. Tout juste apprend on que
quelqu’un en veut à la vie d’Emma avant d’arriver au cliffhanger final. A
priori ce n’est pas grave, vu qu’il reste encore trois numéros et que celui-ci
est fort plaisant à lire grâce aux personnages. Cependant espérons que l’on
aura pas droit à une fin précipitée pour cause de retard à l’allumage. De même,
on regrettera un peu de ne pas avoir droit à des déductions brillamment alambiquées
de la part de Simon Archard. L’explication du premier « meurtre » par
exemple est bien trouvée mais un peu classique.
Pour ce qui
est du dessin, l’italien Mirco
Pierfederici prend la relève de Butch Guice (le dessinateur de la
quasi-totalité de la série originale, qui revient pour les couvertures) et s’en
tire avec les honneurs. C’est lui qui assure tout, des crayonnés à la couleur.
Son style rappelle un peu celui de Daniel Acuña par son côté aquarelle. Les
personnages sont réussis et on les reconnaît sans peine. Leurs visages sont
expressifs, en particulier celui d’Emma. Le petit air suffisant d’Archard est
lui aussi très bien rendu. Les arrières plans sont riches sans être trop
chargés, toujours grâce à leur aspect aquarelle, et confèrent un certain charme
à la ville de Partington où officient nos héros. Les couleurs sont agréables et
correspondent bien aux ambiances des divers lieux. Enfin les mises en page,
bien que classiques, sont claires et efficaces. Les rares fantaisies (pendant
la poursuite au début par exemple) fonctionnent plutôt bien. On déplorera juste
que les personnages à l’arrière plan soient systématiquement trop peu
détaillés, surtout lors des plans larges (il y en a même un qui perd sa
moustache, pourtant imposante). Mais globalement, c’est très bon et l’artiste
paraît promis à un bel avenir.
Ce premier numéro de Ruse s’avère donc extrêmement plaisant, avec des personnages particulièrement attachants et un dessin des plus agréable. On attend juste que l’intrigue débute réellement.
Les plus : Les deux héros
Le dessin
L’humour
Les moins : L’intrigue démarre à peine
Des déductions « trop » logiques
Le dessin manque parfois un peu de détails
Notes
Scenario : 4/5 (grâce aux dialogues, sinon plutôt 3,5)
Dessin : 3,5/5
Global : 4/5