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De Star Wars à Undiscovered Country : une discussion avec Giuseppe Camuncoli

De Star Wars à Undiscovered Country : une discussion avec Giuseppe Camuncoli

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Au cours de l'édition 2019 de Comic Con Paris, l'éditeur Panini Comics avait ramené avec lui un joli panel d'artistes. Outre l'immense Jim Starlin (à retrouver en interview vidéo par ici), nous avons eu la joie de rencontrer le dessinateur italien Giuseppe Camuncoli, travaillant dans l'industrie des comics depuis une vingtaine d'années, et que les lecteurs auront beaucoup vu chez Marvel, et notamment sur Star Wars récemment. Alors que son titre en creator-owned Undiscovered Country vient de sortir, nous vous proposons cette discussion avec Giuseppe Camuncoli pour revenir sur sa carrière et ses projets. Bonne lecture !

Remerciements : Sophie Cony, Panini Comics

***

Bonjour Giuseppe, et merci de nous accorder de ton temps. Je ne crois pas qu'on t'ait déjà interviewé sur COMICSBLOG, peux-tu nous retracer ta carrière ? Comment as-tu démarré ta carrière dans les comics ?

Bien sûr. Quand j'avais quinze ans, j'ai suivi un cours de bande-dessinée. Ce n'était pas une école professionnelle, plutôt un cours du soir, mais il y avait des artistes professionnel. J'ai rencontré Matteo Casali, un ami scénariste, et on a commencé à montrer notre travail dans les festivals italiens. On avait envie de faire de la bande-dessinée américaine, et on a donc commencé à faire notre propre BD en 1997. C'était auto-produit et ça s'appelait Bone Rest [La Fin d'un Monde en VF, nda]. C'était plutôt dans le style du Vertigo de l'époque. 

C'est une BD qui a été très bien reçue en Italie, surtout pour de l'auto-production. C'était un bon moment pour l'industrie en Italie à cette époque, et beaucoup pensaient en l'achetant que ça venait de Vertigo ! En 1998, on est allé à la San Diego Comic Con, parce qu'on voulait tenter notre chance aux US. On a pris des contacts chez Marvel et DC ; en 2000, j'y suis revenu et j'ai pu rencontre Heidi McDonald qui était éditrice chez Vertigo [et qui tient aujourd'hui le site The Beat, nda]. Elle m'a fait travailler chez eux sur le Swamp Thing de Brian K. Vaughan. Je n'aurais dû faire qu'un fill-in, mais j'ai continué jusqu'à la fin de la série. J'ai ensuite fait du Hellblazer avec Brian Azzarello, j'ai aussi fait Spider-Man : Tangled Web chez Marvel avec lui.


Ensuite, ça n'a été qu'une question d'accepter ou non des boulots. Je n'ai jamais eu de moments d'arrêt, sauf quand je décidais de prendre une petite pause. Ces dernières années, j'ai surtout travaillé avec Marvel, mais aussi pour le marché italien. J'ai fait une BD chez Ankama avec Caryl Férey qui s'appelle Maori. J'aime changer dans mes projets. Récemment j'étais sur Star Wars et je démarre ma nouvelle série chez Image Comics avec Charles Soule et Scott Snyder. Ça doit faire 20 ans de carrière, c'est plutôt fun !

Dès le départ c'est la bande-dessinée américaine qui t'intéressait, pourquoi ça ? 

J'étais plutôt fasciné par cette industrie. C'était mon rêve de travailler avec eux. Il y avait cet artiste italien, Claudio Castellini, qui doit être le premier à avoir bossé pour les US avec DC versus Marvel. J'ai toujours lu et aimé la BD italienne, ou le manga ou le franco-belge. Mais à l'époque c'était le marché américain qui me plaisait le plus, alors il fallait que je tente par là d'abord. J'aurais eu un plan B si ça n'avait pas marché, mais ça a marché !

Tu as eu des soucis en tant qu'italien à t'exporter pour l'industrie américaine ?

Non : j'ai lu tellement de comics que mon style était assez proche. Il y avait des petits trucs à améliorer comme les décors, mais au niveau du style de dessin, c'était plutôt facile. Tous les éditeurs que j'ai vus m'ont dit, même si je n'étais pas tout le temps super, que mon niveau de storytelling était bon. Et je pense que c'est parce que j'ai lu pas mal de comics. Il y a une génération d'auteurs, comme je suis né dans les années '70, qui a grandi avec la BD américaine, que ce soit en Italie, en France ou en Argentine. On a tous appris cette façon de lire et de dessiner. On a fait en sorte que ça s'accorde avec notre propre style, mais l'idée est de comprendre le style et le langage de la BD américaine.

Quelles ont été tes influences les plus importantes dans tes lectures ?

Les plus importants ? Frank Miller, Jim Lee, Dave McKean, Moebius, Hugo Pratt. Mais aussi Katsuhiro Ôtomo pour Akira par exemple. J'ai mis dans mes dessins ce que j'aime le plus de ces artistes, pour en faire un petit mélange qui donne mon style. Mais ce dernier change quand même avec le temps, ça évolue graduellement même si on ne s'en rend pas compte. Il ne faut pas s'arrêter de lire des bande-dessinées car on découvre toujours des auteurs qui sont géniaux. J'ai eu la chance de partager un studio avec Jim Lee quand il a vécu en Italie. Il m'a toujours dit de continuer à lire et de découvrir des talents, pour lui aussi, c'est important de voir ce que les autres font. On peut apprendre de tout le monde.

Un séjour qui a mené au projet Batman : Europa, c'est ça ?

Oui, tout à fait. Un super projet qui m'a donné l'occasion de travailler avec Jim Lee. Il a pu dessiner sur mes layouts, et ça m'a permis de faire un travail de peinture. Une première pour moi ! Heureusement que j'ai eu Gabriele D'ell Otto qui a pu me faire une formation express en deux jours : il m'a appris tout ce dont j'avais besoin pour l'exercice de la peinture. Quand je regarde aujourd'hui les planches d'Europa, j'en suis toujours content, même si je ne mentionne pas souvent ce travail.


Comment choisis-tu un projet plutôt qu'un autre ? Ça t'est déjà arrivé de refuser quelque chose ? 

Oui, notamment lorsque ça ne m'intéresse pas de dessiner certains personnages. Ce n'est pas que je les déteste, que je ne les aime pas, mais c'est que je ne veux pas me forcer à les dessiner. Par exemple, je n'aime pas dessiner les armes à feu. J'adore le Punisher, mais du coup je n'aurais pas envie d'en faire une série régulière, juste une couverture. On m'a proposé de dessiner les Power Pack aussi, mais je préfère les super-vilains que les jeunes super-héros. C'est pour ça que j'ai fait Dark Vador, par exemple. Je préfère les personnages sombres. En ayant la chance de pouvoir choisir, ça rend la chose facile. Un autre facteur que je prends en compte, c'est celui du scénariste. Par exemple j'ai fait récemment un Annual de Green Lantern, parce que j'avais envie de bosser avec Grant Morrison. C'est le type de scénariste avec qui tu es prêt à dessiner n'importe qui !

Tu aimes les méchants, mais j'imagine que tu aimes aussi Star Wars pour avoir travaillé dessus. Qu'est-ce que les comics apportent selon toi à cette mythologie, alors qu'il y a tout un tas d'autres médias à côté ? 

Il y a plein de détails, des choses que les films ne peuvent pas raconter, des personnages très nombreux à exploiter que les autres médias ne peuvent pas exploiter. C'est génial ! Dans notre série par exemple, on raconte comment Vador va construire son sabre laser. Quand j'ai lu le pitch de la série, j'ai trouvé très fort que l'on raconte cet aspect du personnage. Il y a un truc que Charles Soule a inventé, je crois, c'est que les Sith ne peuvent pas construire leur sabre laser, mais le dérober - avec violence - à un Jedi. Notre série est pleine de détails qu'on a pas vu ailleurs. En parallèle, les romans ou les jeux vidéo sont des espaces pour approfondir des aspects des personnages pour lesquels il n'y a pas eu le temps. C'est peut-être ce qu'ils vont faire aussi avec les séries Disney+...

Et tu n'as pas eu de soucis de contrôle créatif avec Disney ? 

C'était plutôt facile. Ils étaient assez attentifs sur les détails des costumes ou des vaisseaux spatiaux. Quand on créait des personnages ou autres, on m'a laissé beaucoup de liberté.


J'imagine que ta relation avec Charles Soule s'est bien passée puisque tu continues avec lui sur Undiscovered Country...

Oui, c'est lui qui m'a proposé de faire ça, et ça me permet de bosser avec Scott Snyder. On a accroché immédiatement avec Charles, on a toujours échangé beaucoup d'idées. 

Tu as déjà fait du creator owned avant ? 

Oui, j'ai fait une mini-série chez Skybound qui s'appelle Green Valley avec Max Landis, qui est en VF chez Delcourt. J'ai donc fait Maori chez Ankama, et Bone Rest également. J'avais fait un titre Bangock chez Vertigo. Ce nouveau projet est vraiment énorme, parce qu'il a déjà été optionné pour une adaptation -

Justement, comment tu expliques ça ? Et qu'il y a autant de commandes chez Image ?

On avait pas mal d'espoirs là dessus, c'est sûr. Mais c'est au-delà de nos attentes. Charles et Scott ont la même agent à Hollywod, qui a déjà vendu des séries qu'ils ont fait. On avait donc bon espoir de reproduire la chose. Je pense que le succès d'Undiscovered Country est que le titre est actuel. On a l'occasion de dessiner une Amérique futuriste, de voir comment elle sera dans trente ans, et ça intéresse forcément les lecteurs américains. Et sûrement ceux du reste du monde.

Vous avez pas créé Undiscovered Country juste pour en faire une adaptation ?

Non, pas du tout. Charles et Scott avaient envie de bosser ensemble, et de raconter cette histoire, qui leur semble spéciale. On fait toujours de la BD avec l'espoir qu'il en sortira autre chose, mais avant tout on fait des comics pour les comics.


Comment tu fais alors pour créer tout un nouvel univers de A à Z ?

C'est un exercice avec énormément de libertés, mais qui est aussi plus compliqué puisque tout est à 100% de ta responsabilité. On a un éditeur, Will Denis, avec qui j'ai travaillé chez Vertigo, et quand je fais des designs ou que je propose des idées, d'en discuter avec lui et les deux scénaristes ça permet d'avoir un bon feedback. Ça permet d'être tranquille ensuite si j'aime aussi ce que je fais.

J'imagine que tu n'as pas d'autres projets en ce moment à part Undiscovered Country ?

Je fais aussi des couvertures chez Marvel, mais c'est Undiscovered Country qui va m'occuper puisque c'est une ongoing ! 

Merci beaucoup !

Arno Kikoo
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