La semaine dernière, Forbes publiait sur son site internet un article sobrement intitulé "Why Superman Can Kill: In defense of Man of Steel" (pourquoi superman peut tuer : pour la défense de Man of Steel) : un papier qui a enflammé nombre de nos collègues américains, qui ont profité de l'occasion pour revoir le film de Zack Snyder, et l'étudier sous toutes les coutures, dans l'espoir de le défendre, ou dans l'objectif de l'enterrer une fois pour toutes à deux jours de l'arrivée de son successeur, le très attendu Batman v Superman.
Pourquoi Man of Steel continue-t-il de faire parler de lui d'ailleurs ? Nombreux sont ceux qui ont posé cette question la semaine dernière. Et avant toute chose, il convient de rappeler l'importance de l'exposition médiatique : à quelques heures maintenant de l'événement, il est normal de voir les journalistes et les blogueurs du monde entier prendre leur clavier pour écrire sur le film supposé haï de Zack Snyder, qui date tout de même de juin 2013. Maintenant, l'aspect opportuniste de la pratique ne doit pas nous empêcher de réfléchir à ce qu'est bel et bien Man of Steel, avec près de trois bonnes années de recul.
En l'occurrence, je gardais un bon souvenir du film de Snyder, et un nouveau visionnage m'a rappelé pourquoi, tout en accentuant encore un peu plus les défauts que relèvent ça et là les internautes cinéphiles et/ou fans de comics. Premier point important, et qui n'avait que rarement été mentionné lors de la sortie du métrage dans nos salles : Man of Steel fait l'effort de proposer une histoire qui sert à la fois d'origin story et d'aventure à part entière pour Superman. Et étrangement, on entend rarement les spectateurs ou la critique saluer les efforts de Snyder, Christopher Nolan et David Goyer quant à la construction de leur film. Loin d'être parfaite, elle a toutefois le mérite d'alterner des éléments purement mythologiques - sur Krypton notamment - et une action plus linéaire. Les deux se nourrissent l'un l'autre, et permettent au spectateur de toucher du doigt ce que symbolise le personnage de Superman.
Maintenant, on peut imaginer que tout ce travail sur l'ensemble de l'intrigue a été quelque peu saboté par le désormais tristement célèbre assassinat de Zod des mains de notre héros. Et si d'un côté, je comprends que la scène soit polémique - notamment pour des fans ayant grandi avec cette absolue règle d'or en tête - je crois que de l'autre, elle est un argument d'une simplicité totale pour contrecarrer toute tentative de défense de Man of Steel. Et d'ailleurs, en tentant de justifier le choix de Superman, Mark Hughes, l'auteur du fameux article de Forbes, s'est cassé les dents. Or, il n'y a pas de justification possible : Superman a tué, c'est un fait. Et si ce choix est effectivement choquant, au regard de la mythologie et de l'histoire du héros, il n'est pas tout à fait vide de sens. Et se pencher sur ce sens, ce n'est pas excuser le geste de Kal-El, mais simplement, tenter de le comprendre, au sein de la diégèse du DC Extended Universe.
J'aurais d'ailleurs tendance à dénoncer non pas la scène, mais la défense que les intéressés comme Henry Cavill ou Zack Snyder ont fait d'elle. En effet, il ne s'agissait pas d'excuser l'acte, mais de l'expliciter, de le contextualiser. Et en l'occurrence, si le geste a déjà pas mal de sens au sein d'un film qui montre un Superman en quête d'identité, il est encore plus intéressant quand on le replace dans le cadre du DCEU. Tout d'abord, parce que celui-ci sera l'étendard d'une version dira-t-on moderne de nos héros favoris. A ce titre, il n'est pas inintéressant de figer la règle d'or "Superman ne tuera point" dans un geste profondément choquant, qui donnera une ampleur au parcours philosophique du personnage sur grand écran. Ensuite, la question de l'échelle de puissance - qui intéresse d'ailleurs beaucoup l'ami Snyder, à en croire sa mise en scène, très réussie, des Kryptoniens - peut s'avérer très utile en termes de world-building. Saisir, dans une effrayante débauche, la puissance de Superman et ses pairs, s'est s'assurer que cette puissance ait un impact sur les histoires que nous contera le DC Extended Universe.
Pour bien comprendre ce point, je me permets une petite comparaison avec le travail de Marvel Studios sur le même sujet. Etrangement, personne ou presque ne relève les destructions, pourtant elles-aussi colossales, provoquées par les Avengers et leurs ennemis, et se sera d'ailleurs aux frères Russo de saisir, le temps d'une Guerre Civile, l'impact de ces événements, comme la destruction d'une ville en Sokovie. Mais là où le MCU brode son univers au fil des années, Warner et DC ont peut-être une longueur d'avance en ayant enfoncé le clou du premier coup. Pour faire simple, je ne pense pas que le destruction porn de Man of Steel soit dû au hasard, ou totalement gratuit. Man of Steel aurait sans doute gagné à s'intéresser aux conséquences de ces destructions - plutôt que d'attendre une suite pour le faire - mais encore une fois, les ruines de Metropolis on un sens. À bien y réfléchir, Snyder et Warner ont peut-être déjà gagné leur pari : si nous continuons de discuter de l'assassinat de Zod et des destructions de Superman, c'est bien parce qu'elles nous effraient - à croire qu'ils restent des gens de bien dans ce monde.
Et si elles nous effraient, c'est bien parce qu'elles ont une vraie signification dans l'histoire, contrairement aux destructions de New-York ou de la Sokovie du côté de la concurrence, qui elle, choisit - et le choix est tout aussi respectable - d'enrober cette violence sous un maximum de fun et de blagues. Et en ayant fait de la destruction de Metropolis l'étincelle du conflit entre Batman et Superman, Zack Snyder nous a indiqué que rien n'a jamais été dû au hasard. Quelque part, on pourrait comparer son choix à celui de Brian Azzarello dans Luthor, qui nous montrait un Superman toujours brutal, voire bestial, pour mieux attirer la sympathie du lecteur vers Lex. Et je ne serai pas étonné de ressentir la même chose pour un Batman parti en croisade dès mercredi prochain. Dans le même ordre d'idée, les spectateurs pourraient entendre les arguments d'un Luthor (justement) ou d'une sénatrice Finch dans le film, ce qui les empêche de tomber dans le cliché du "vilain très vilain", et donne une certain poids, une certaine saveur, à l'ensemble.
Et c'est peut-être cette saveur, qu'on la trouve douce ou amère, ou les deux à la fois, qui sépare l'approche de Warner Bros de celle de ses concurrents sur le sujet super-héroïque. Warner Bros - Snyder en tous cas - à l'intention de faire des choix, et de les assumer jusqu'au bout, là où la concurrence, aussi efficace soit-elle, craint la prise de risques. Et des choix, des vrais, il y en avait partout dans Man of Steel. La construction narrative dont nous parlions en est un. La mise en scène complètement débridée de l'action - qui n'est pas sans rappeler le Dragon Ball adoré de Snyder - en est un autre. Je pense aussi à l'astucieuse exposition de l'histoire de Krypton sous la forme d'un film animation. La liste est longue.
Zack Snyder, dans son film, ne cesse de faire des choix. C'est peut-être la plus grande force du film, et un superbe écho au message qu'il renvoie : faites le choix du libre-arbitre, même si celui-ci vous attire les foudres de tout un monde. En ce sens, Zack Snyder n'a fait que suivre les conseils de sa propre histoire, en optant pour des parti-pris forts, qui donnent à son film une vraie densité, que je tenais à saluer, à l'heure où les blockbuster hollywoodiens sont plus que jamais effrayés par les propositions tranchées. Reste à savoir si Batman v Superman sera, sur ce point précis, le digne successeur de Man of Steel.
24 Mars 2016
BadYannHeeeuh, Republ33k, alors en fin de compte, l'avait-on si mal compris ce MoS ? Je charrie mais le coup BvS est tellement rude
22 Mars 2016
Robb Stark@BadYann : Complètement d'accord.
Cela dit, face aux productions Marvel Studios, je suis forcé de reconnaître au moins le mérite à Snyder de tenter quelques trucs, y'a quelques idées derrière quoi.
22 Mars 2016
krap1erMerci pour l'édito Republ33k, c'est super intéressant et ça apporte matière à réfléchir.
22 Mars 2016
Trunks93Et Batman chez Burton tue le Joker (pour le Pengouin je sais plus).
Comme on peut dire que Chez Nolan, Batman tue Ras al Gul, (même si il dit le contraire)
22 Mars 2016
War MonarchTrunks : t'as raison! et dans Iron Man 1! Tony tue les terroristes qui l'ont kidnappé lorsqu'il construit sa première armure (d'ailleurs beaucoup de super-vilains des films Marvel ont la fâcheuse attitude de mourir très souvent)
Dans le film Batman de Burton, Bat' tue un des sbires du Joker
et dans Returns, il tue des sbires du Pengouin (un avec la batmobile, l'autre avec une grenade)
je pense que nous en tant que fans, on mérite même pas le droit de leur jeter la pierre ^^"
22 Mars 2016
Trunks93@War Monarch. Et aussi Superman tue Zod dans Superman II. Ms ca là ca dérange pas les gens.
22 Mars 2016
War MonarchDe plus pour infos c'était pas la 1ère fois que Superman tuait "un" Zod
Le premier Zod qu'il a rencontré, Superman l'a exposé à une kryptonite spéciale qui l'a tué sur le coup (Sup a été traumatisé pendant longtemps à cause de ça)
Autre exemple, un nouveau Zod (cette fois un russe qui portait une armure lui conférant une super force grâce à un rayonnement de soleil rouge) a eu le coup brisé par Superman (et oui ça rappelle MoS !)
En tout cas je suis content que beaucoup ait changé d'avis concernant ce film et globalement je suis content du changement d'attitude de comicsblog qui fait quand même un peu plus d'effort, un changement certes rapide et à 360° mais ça reste une tentative malgré tout.
22 Mars 2016
BEBLAST... autant que ses faiblesses.
Pour moi c'est un premier essai solide, même s'il est plein de défauts, et j'espère vraiment que DoJ va s'attacher à combler ce que certains voient comme des outrages.
22 Mars 2016
BEBLASTJe trouve que l'analyse reposant sur le fait que Clark/Kal soit à chaque fois une sorte de pantin des trois visions "paternelles" assez pertinente.
Néanmoins, je n'y adhère pas, et trouve qu'elle relève de la pure sensibilité individuelle. On l'accepte, on y est sensible, ou pas. Elle se justifie, ou pas.
De plus, quand bien même celle-ci s'avèrerait vraie, où serait le problème ? Le film s'attache à montrer que Clark/Kal n'est pas un être parfait et omnipotent.
Il peut être sujet à la persuasion, voire à la manipulation (la scène dans les divers teasers et trailers de Dawn of Justice où Lex semble exercer un contrôle sur lui en sont la manifestation qui semble la plus évidente).
Peut-être que justement dans DoJ, Clark/Kal va enfin apporter sa propre subjectivité et trouver une voie alternative.
Je pense vraiment que MoS est une première pierre, un postulat de départ, et j'ai vraiment la sensation que beaucoup de membres ici en attendaient carrément plus que ça. Quelque chose de solide, un Superman complet.
Je ne dis pas que j'attendais autre chose, lorsque je suis sorti de la salle la première fois, j'ai été assez déçu du film. Mais au fur et à mesure, j'ai vu ses forces...
22 Mars 2016
Kit_Fisto, serial reviewerMoi j'ai toujours été un ardent défenseur de ce film MoS et puis le Superman( Christopher Reeve) des années 70/80 s'est bien débarrassé de Zod et des kryptoniens dans sa Forteresse de Solitude..Personne n'a rechigné enfin je crois pas ! :D
22 Mars 2016
JB'sC'est dommage, car pour moi Man Of Steel aurait pu être un film excellent. Il y a plein de bonnes scènes, portées par un bon casting (comme la scène de Jor-EL et de Lois dans le vaisseau de Zod), mais je trouve l'ensemble mal agencé. Et certaine scènes viennent pour moi gâcher le film : la mort de Jonathan Kent, l'attaque du vaisseau de terraformation et la scène du meurtre de Zod. Ce qui me choque ce n'est pas le meurtre, car au fond Zod c'est déjà enfui de la zone fantôme et Superman n'a pas forcément la connaissance de celle-ci. A ce moment là, il n'a aucun moyen de contenir ou raisonner Zod. C'est plutôt la scène qui est bancale. A aucun moment, superman ne se préoccupe des morts quand des immeubles sont rasés de la carte. Mais là, il se met enfin à réagir car la vie de deux humains sont en jeu. J'aurai préféré voir un superman accepter de prendre des coups pendant le combat pour tenter de limiter les pertes humaines. Et finalement le confronter à la seule solution possible : se salir les mains pour le bien commun.
22 Mars 2016
BadYannMan of Steel est l'un des pires travail de Goyer, les personnages humains sont sans profondeurs (Pa Kent, Lois Lane, Perry White...tous unidimensionnels), la dimension christique du personnage appuyée, lourdement, tréééés lourdement, tout le long du métrage pour en faire son antithèse un dieu vengeur...
Je rejoins, aussi, m91350, Superman passe le film à subir les choix des autres, à aucun moment il ne propose une voix différentes, il répond à la folie destructrice de Zod par la folie meurtrière.
Ce "choix" aurait-été cohérent si le film s'était appelé Superboy, la, Kal El est sensé avoir parcouru le monde pour se faire sa propre philosophie de vie et il n'a rien appris, il répond à Zod de la même façon qu'il a répondu au camionneur au début du film, tu parles d'une évolution .
22 Mars 2016
mercuryPour info, dans ses premiers numeros, en 1939, aucun vilain ou presque , ne survivait a sa rencontre avec le kryptonien. Tout comme les ennemis de Batman , qui avait un flingue , en 1940. le principe de "no kill" n'est venu que plus tard.
Au début du golden age, le Punisher aurait été un tendre. Alors , la sanction de Zod est juste dans la lignée du superman golden age. Je n'ai jamais compris cette polémique autour du kryptonicide de Zod au nom d'un principe qui a changé au fur et à mesure de l'histoire du 20eme siecle et des mentalités.
21 Mars 2016
BEBLAST@Brutal : effectivement, je me suis trompé ! ^^
21 Mars 2016
Brutal Destr0y333r@paradoX DC a une longueur d'avance aujourd'hui puisque le modèle marvel semble vouloir se renouveler car il s'essouffle et veut partir sur des histoires qui parlent des conséquences de leur batailles. DC a posé son univers directement dessus, je pense que c'est ce que veut dire republ333k
@Beblast "la ligne verte" ^^ à moins qu'il y ait le même dialogue dans la ligne rouge vu que je ne l'ai pas vu.
21 Mars 2016
BEBLASTJe ne comprendrais jamais ce tapage autour de la mort de Zod. Okay, cette scène viole le principe de base de Superman. Mais Superman est un personnage né en 1933 dans un contexte donné, avec une vision donnée du monde, de mœurs données, etc.
Il était TEMPS que ça change ! Il était temps que Superman évolue. Il était temps que Superman fasse un choix. Et ce choix a été fait. Ca ne fait pas de lui un meurtrier, mais un être à même d'agir quand c'est nécessaire.
De plus, Zod incarne l'erreur progressive kryptonienne, sans parler d'une tyrannie totale. C'est un être vile (pas nécessairement mauvais au début) qu'il faut abattre. Il n'y a pas le choix. Parfois, il n'y a peut-être juste plus de choix.
Ça me fait penser à cette scène dans "La ligne rouge" lorsque l'un des personnages dit à l'autre que son chien a attaqué son enfant, et qu'en dépit de tout son amour pour lui, il a été forcé de le tuer.
Bah voilà, la vie, parfois, c'est des choix impossibles, et pourtant la nécessité d'agir. Laisser faire, ou faire quelque chose.
Et puis symboliquement, il fallait transgresser cette règle pour poser les jalons du DCEU. C'est fort, et ça a marché, comme l'a souligné Republ33k.
21 Mars 2016
Ultralucide@m91350 : Je ne suis pas tout à fait d'accord avec toi, Kal El fut de naissance naturelle, c'était bien justement pour que celui ci puisse se forger sa propre destinée et ainsi échapper à un rôle social prédéfini par la société Kryptonienne. Clark (Kal) a déjà choisi de devenir un sauveur bien avant de rencontrer le fantôme de son père, et bien avant que son père ne meurt (justement Pa Kent ne voulant pas que celui ci assume un rôle de sauveur). Il n'est en aucun cas la marionnette de personne, il a choisi justement quel type d'homme il voulait être, s'affranchissant de se que lui a inculqué son père adoptif, soit un héros à l'état pur.
21 Mars 2016
paradoX@Ian0delond : parle pas d'anti-man, de la bave va apparaitre aux coins des lèvres de répu' ! et le yellowjacket est laissé pour mort, au moins autant que redskull ! ce voyage vers d'autres dimensions peut très bien les avoir tuer comme gardé en vie.
21 Mars 2016
paradoX*DC démarre dix ans après marvel*
DC à une longueur d'avance sur marvel !
bravo répu, ta plus belle mauvaise foi depuis ant-man <3
21 Mars 2016
m91350Il n'y a aucune forme de libre arbitre dans man of steel.
Jor El décide du destin messianique de Kal El, Jon Kent décide du destin de marginal de Clark Kent, Zod décide du destin de meurtrier de Superman.
Durant tout le film le personnage principal est un pantin, sans volonté, dont les ficelles sont tirés successivement par ces trois figures d'autorités.