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The Crow: Special Edition, la review

The Crow: Special Edition, la review

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Notre note

Ayant besoin d'exorciser l'immense peine dont il souffrait suite à la disparition de sa compagne survenue à cause d'un chauffard ivre, James O'Barr trouva comme seul exutoire, la création du personnage, désormais culte, Eric Draven, aussi connu comme le premier à avoir incarner l'esprit du corbeau vengeur. Initialement publié en plusieurs parties et ce, chez différents éditeurs indépendants, The Crow retrouve toute sa profondeur sous forme de recueil. Surtout que dans cette dernière version du TPB sortie le mois dernier, nous avons eut droit à du matériel inédit qui n'avait pu être publié auparavant pour diverses raisons. La première, concerne le nombre de pages ne concordant pas avec l'étape de l'impression. En effet, James O'Barr avait tendance à rendre un travail au nombre de pages irrégulier et ne rentrant pas dans les standards des comics pour les imprimeurs. La deuxième raison se rapporte, elle, à la grande tristesse de l'auteur dont le travail non publié jusqu'alors faisait remonter en lui trop de souvenirs.

"Still every night I burn, every night I scream your name"

Fear And BulletsNavigant dans une atmosphère triste et lourde mélangeant différents styles tels que le punk et le gothique notamment, The Crow n’en est pas moins un récit qui se veut chargé en poésie et en émotions. D’Arthur Raimbaud à Rose Fyleman, de grands auteurs/poètes voient leurs écrits repris ici par James O’Barr qui, par ce biais, se dévoile à ses lecteurs en montrant la grande tristesse qu’il a pu ressentir à la suite de la perte de sa compagne. Ce personnage errant la nuit dans les rues de la ville de Détroit nommé Eric Draven qui revient d'entre les morts et qui se met en chasse des hommes qui l'ont tués, lui et sa défunte compagne, Shelly, est en quelque sorte une transposition de l’auteur sur le papier. En effet, les désirs meurtriers de ce dernier se retrouvent là, couchés de sorte à pouvoir exorciser sa peine. La poésie n’est pas le seul élément à accompagner le lecteur dans sa tourmente. La musique y est très présente, elle aussi, avec par exemple les paroles de la chanson Decades du groupe britannique Joy Division. Mais ce n’est pas la seule référence à ce groupe. Les titres de certaines parties du récit font directement référence à quelques unes de leurs chansons. Hormis Joy Division, d’autres noms de la scène musicale de l’époque font, aussi, partie de l’inspiration de James O’Barr. C’est peut-être pour cela que l’on a longtemps attribué le fait qu’Eric Draven était musicien dans un groupe de rock alors que ça n’est pas évoqué dans l’histoire (même si les différentes adaptations cinématographique et télévisée ne sont certainement pas anodines, non plus). Pour venir compléter l’influence musicale du récit, en 1993, James O’Barr avait réalisé avec son groupe de rock Trust Obey (désormais dissolu) un album CD nommé Fear and Bullets servant plus ou moins de bande son à l’histoire. Les onze pistes que contiennent le disque permettent de se plonger encore plus profondément dans l’ambiance mêlée de peine et de tourmente que peut ressentir Eric Draven.

Outre le côté poésie "gothico-punk", la vendetta d’Eric se voit parsemée d’une multitude de souvenirs qui l’assaillent tout au long de sa traque envers ceux qui ont mis fin à ses jours ainsi qu’à ceux de Shelly. Que ce soit une simple danse avec sa bien-aimée, une journée à repeindre des murs de leur maison, un réveillon de Noël ou encore le souvenir de leur dernier pique-nique, en tant que lecteur, on peut se demander si c’est la tourmente du héros ou celle de l’auteur que l’on suit. Mais on ne peut s’empêcher de continuer à se plonger dans le récit tant il est intense.

Le périple d’Eric à travers les quartiers les plus malfamés de la ville à la recherche de ceux qui l’ont tué devient un défilé voire même un hymne à la violence dans lequel, il devient à son tour bourreau. Progressivement, il va suivre les traces des différents membres de la bande qui l’ont fait chuter de l’autre côté un an auparavant. Entre drogue, alcool et prostitution, tous ces milieux où sévissent le crime sont dépeints de telle façon que le lecteur peut parfois ressentir un certain malaise. Même si la violence est présente dans une grande partie du récit, The Crow révèle tout de même un léger brin d’espoir. Surtout lorsqu’Eric rencontre une petite fille dans le besoin et laissée à l’abandon par sa mère. En devenant son ami, le revenant a réussit à lui redonner le goût en des jours meilleurs où tout pourrait s’arranger.

Enfin, dans cette course à la mort, Eric ne sera pas seul, loin de là. Il sera guidé par un corbeau qui l’a ressuscité et qui, par la suite, l’aidera durant tout le temps qu’il passera parmi les vivants à pourchasser ses assassins. Il se trouve, aussi, que ce fameux corbeau était là lors du massacre du jeune couple un an plus tôt.

Des noirs & blancs très bien nuancés

Le point fort de ce comic-book en noir & blanc, c’est que son auteur, James O’Barr, a voulu jouer avec les ombres et la lumière, et qu’il l’a fait à merveille. Avec son trait, il instaure dès les premières pages le ton que le récit aura. En effet, on comprend tout de suite que l’histoire est très sombre et qu’elle se révèle relativement assez violente par la même occasion. Mais au beau milieu de toute cette noirceur, résident aussi quelques scènes bien plus lumineuses et au trait moins tranché. Le rôle de ces scènes en demi-teinte est de révéler certains des souvenirs qu’Eric Draven a eut avant sa mort mettant en avant sa compagne, Shelly, ainsi que lui-même dans des situations de la vie de tous les jours. Autre élément qui fait que cette nouvelle édition est intéressante, c’est qu’en plus de quelques planches retravaillées, elle se voit agrémentée d’un trentaine de pages en plus qui s’intègrent directement aux différentes parties déjà présentes dans la version initiale et ce sont, pour la plupart, de nouveaux souvenirs du revenant. Ce qui rajoute, alors, encore plus de mélancolie à l’histoire.

The Crow 

Ce n’est pas la première fois que le chef-d’œuvre de James O’Barr est traduit dans la langue de Molière. C’est donc un immense plaisir de pouvoir lire cette toute nouvelle édition française (qui se veut définitive tout comme son homologue d’outre-atlantique) respectant très fidèlement le scénario ainsi que les dialogues originaux. L’ambiance en est inchangée. Elle y est d’ailleurs toujours aussi profonde et pesante. On comprends donc queDelcourt a voulu mettre les petits plats dans les grands pour cette toute nouvelle édition de The Crow. Et c’est à Vincent Bernière (connu pour être à la fois écrivain, journaliste et éditeur maison de deux collections) que fût assignée la tache de transposer dans notre langue la résurrection vengeresse d’Eric Draven.

Grâce à tous les soins apportés par Delcourt à cette toute dernière mouture de The Crow en version française, le lecteur de la première heure sera ravi de retrouver cette histoire devenue mythique. Enfin, même si vous ne connaissiez pas l’homme au corbeau auparavant, rassurez-vous et prenez votre envol dans les méandres poético-gothico-punk de James O’Barr.


Avant d’être un simple récit sur un revenant voulant se venger de ses bourreaux, The Crow se veut plus être une transposition des sentiments torturés que James O’Barr ressentait lors de la perte de sa compagne, il y a de ça plus de 30 ans maintenant par un chauffard ivre. Une partie de lui nous a quitté en même temps qu’elle. Voilà le parallèle qu’il faut faire pour bien comprendre et appréhender cette histoire : Shelly était sa compagne défunte et les truands, eux, représentent l’homme qui lui a enlevé la vie. Quant à Eric Draven, c’est la symbolisation de James O’Barr (son désir de vengeance exorcisé sur le papier).
Enfin, l’œuvre de James O’Barr ne reçut malheureusement, pas le succès qui lui était dû lors de sa sortie mais, est désormais devenue un classique depuis quelques années et ce grâce, entre autre, aux différentes adaptations qui lui ont été consacrées.
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