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Final Crisis Tome 2 : Sept Soldats, deuxième partie d'un long chemin

Final Crisis Tome 2 : Sept Soldats, deuxième partie d'un long chemin

ReviewUrban
On a aimé• La générosité habituelle de Grant Morrison
• Les boucles entre les récits commencent à se faire
• Chaque artiste colle au style de sa série
• Certains segments assez puissants
On a moins aimé• Reste à savoir si tout le monde saura s'y retrouver
• Des couleurs qui vieillissent mal
Notre note

Urban Comics continue la publication de Final Crisis, un événement fleuve chez DC Comics qui aura entièrement remis entre son destin entre les mains du complexe Grant Morrison. Et si vous ne voyez pas exactement de quel scénariste il s'agit, imaginez vous pour vous faire une idée ces gens obsédés par un crime qui ont chez eux un panneau où sont placardés toute une série de photos, avec des punaises de couleurs et des fils rouges qui vont de l'un à l'autre entre deux articles de presse.

Grant Morrison fait ça, sauf qu'à la place de célébrités assassinées de meurtriers potentiels, chaque visage est un héros de comics et les liens qu'il tisse entre eux ne sont évidents que pour lui. Véritable scénariste du complot, il aura bâti son événement sur des ramifications lointaines, très profondes, et sur l'idée de faire intervenir la crise dans un quotidien bien implanté et segmenté. Avec, comme première arme, une nouvelle génération de héros qu'il aura créée (ou recréée) dans le courant des années 2000, les Seven Soldiers of Victory.
 

 
Présentés au travers de sept mini-séries, ces personnages sont au départ présentés dans des introductions efficaces, avant de devenir une sorte d'équipe contre la menace des Sheedas, un genre de race insectoïde qui affronte les humains depuis des millénaires. Après les quatre présentés dans le premier volume, il restait à conter l'histoire de Bulleteer, Frankenstein et Mister Miracle - attention cependant, ce personnage est bien un héros inédit.
 
Le tome s'ouvre sur le bouclage des histoires de Klarion et Zatanna, tandis que le Chevalier et le Gardien sont pour le moment absents. Le fait que seuls trois héros s'entremêlent dans ce second tome aide à trouver le surplus de fluidité qui manquait au premier, à plus forte raison dans une édition qui laisse un chapitre final explicite sur les intentions de l'auteur - mêler tout ce beau monde et présenter la menace globale pour secouer les deux du fond qui dormaient. Encore que chaque histoire puisse se lire comme une mini séparée.
 
La variété des styles proposés dans ce chassé croisé constitue l'une des qualités principales de cette édition : si Morrison donne vie à toutes les facettes de l'univers DC (super-héros, horreur, magie, street level, polar, etc), il s'est entouré d'artistes avec de véritables pattes et une envie de former un corps solide entre narration et dessins. Si vous regardez de près le passage du brillant Yanick Paquette sur Bulleteer, vous remarquerez que l'habillage général insiste sur les postures lassives ou sexy de l'héroïne, souvent dévêtue ou en combinaison moulante. De son côté, le texte, lui, développe un propos plutôt féministe, contre le fait que les super-héroïnes ne soient qu'un emballage de chair agréable à l'oeil, et dans une histoire où les comportements machistes sont nombreux. 
 
Comme si la mise en scène et l'iconographique de Paquette cherchait à prendre à revers ce que le lecteur a l'habitude de croiser sur les personnages féminins de comics, à plus forte raison après la décennie 1990. Une parodie méta' de la sexualisation, que l'artiste et le scénariste rendent plus éloquente en travaillant de concert pour que le moindre personnage féminin apparaisse comme une pin-up permanente, condamnée à cette posture dans le monde de la BD de super-héros. 


 
Sur Frankenstein, Morrison choisit Mahnke, un artiste justement célèbre pour ses visages improbables et son goût pour les expression horrifiées. Leur association permet de rendre palpable un monde bizarre, grotesque et fait d'aberrations de la nature (en un sens, parce que Mahnke préfère l'exagération au réalisme) mais qui accompagne aussi un propos sur le monstre véritable, pas forcément celui que l'on croit : Frankenstein est un héros bienveillant et les hommes "normaux" sont souvent plus cruels ou violents que lui.
 
Du côté de Mister Miracle, le héros n'est pas le classique Scott Free mais Shilo Norman, un autre artiste de l'évasion qui a endossé le rôle de Miracle dans des circonstances floues. Ce segment est une parodie intéressante de l'imagerie classique des New Gods, comme une version cartoony ou blacksploitation des concepts classiques, avec un dessin qui épouse là-encore le propos : rendre accessible ou mainstream les concepts de Kirby dans une histoire structurée comme un petit film d'action somme toute très classique, avec de jolis dessins tous publics. 
 
Chaque récit a ses forces et faiblesses mais, si vous faites l'effort de revenir au sommaire et de les lire dans l'ordre, numéro par numéro, il en ressort généralement de très bons récits bien rythmés et généralement plutôt efficaces. Chacun est peuplé de références plus ou moins accessibles, dans le style classique de Morrison, qui sème des cailloux aux lecteurs assidus comme des petites récompenses à trouver.

Enfin, le dernier numéro est la clé de déverrouillage des Seven Soldiers. Une explication qui pourrait se trouver en début de volume mais qui aide, en étant ainsi située, à ce que l'on ait pu appréhender les personnages avant de comprendre en quoi chacun va être utile. Ce segment cosmogonique est l'une des premières pierres de l'intrigue de fond pensée par le scénariste et un brillant hommage à Kirby, dans un numéro où J.H. Williams III déploie son impressionnante palette de styles accompagné par les superbes couleurs de Dave Stewart. Comme un bonus de fin, ce passage est celui qui aide Sept Soldats à ne pas être qu'une simple imbrication de bonnes mini-séries : on ressent l'énergie globalisante qu'instille Grant Morrison à sa vision horizontale de l'univers DC, avec cette mythologie et cette mise en scène qui part de la création de la Terre par les New Gods vers un style Kirby, un style fantasy, un style pulp et un style moderne. En bref, c'est plutôt bien.
 

 
C'est plutôt bien, et pourtant tout le monde n'y retrouvera pas forcément son compte : l'inconvénient de ce style très long-termiste étant qu'il sera frustrant de n'avoir que des bouts d'histoires à recomposer ensuite. On conseille donc ce tome aux amoureux de la mythologie DC, aux grands fans de Grant Morrison et à ceux qui, comme lui, aiment faire des ponts narratifs entre des segments A, B, C ou Y. Une très bonne lecture néanmoins, qui prend bien le lecteur par la main pour l'emmener au gros événement suivant (et vu sa complexité, l'opération était nécessaire). 
Corentin
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