Sam Wilson a perdu la foi, après avoir appris que son pote Steve Rogers n'était qu'un infâme nazi en costume de héros - tel pourrait être le pitch de cette nouvelle série, et c'est à peu près tout ce que vous auriez besoin de savoir pour entrer dedans à quelques détails près. Le personnage s'installe à Chicago avec le Patriot, et va s'attaquer au problème de la violence urbaine, réunir les deux gangs les plus puissants et tenter de parlementer. Le maire (forcément corrompu) accepte mal l'ingérence du héros, et tout se met en place dans ce premier numéro pour un arc téléphoné, mais pas forcément dénué de fond.
Barnes ne choisit pas la ville ni le propos au hasard. Métropole violente traversée par la recrudescence de meurtres armés (plus de cinq cent morts par an à l'arme à feu, sacré bodycount), Chicago s'est illustrée comme le foyer de naissance de différents gangs issus des ghettos où les villes enferment les communautés pauvres multi-culturelles, afroaméricaines et hispaniques en particulier. L'histoire aurait d'ailleurs aussi bien pu se passer à Harlem, tant le schéma se répète et traverse toute la carte des grandes villes aux Etats-Unis, mais, le Faucon ne chasse pas sur les terres de Luke Cage. L'idée est surtout de rester pertinent.
Le scénariste référence directement un gang de la ville - les Latin Kings transformés en Spanish Kings - et se retrouve dans l'écriture et le dessin un genre d'immersion exagérée des rues façon The Warriors. La fin du numéro est aussi une référence directe, l'esthétique générale trouve cette gouaille authentique qui passe par des dialogues sincères, un jeu sur l'histoire éditoriale du héros et l'envie simple mais efficace de ne pas oublier ce que le Faucon peut raconter d'intéressant.
Dans les personnages plusieurs fois nommés, se crée un genre d'envie de microcosme des héros afro', vu à travers les yeux de Patriot, un jeune noir qui va chercher dans ses modèles des Luke Cage ou Brother Voodoo, à l'ombre des Steve Rogers ou Tony Stark. C'est dans ce genre de détails et une relation bien écrite entre le héros et son sidekick que la série se trouve une identité, à défaut d'avoir une construction surprenante. Ce premier numéro exécute un cahier des charges évident, qui se pousse malgré elle vers un cliff' de fin sans finesse et pas nécessaire.
D'autres détails gênent, de poses exagérées ou de narration poussive, mais l'ensemble garde ce côté gris vu à travers les yeux d'un héros désabusé qui veut garder intact l'idéal de Captain America en vie à l'ombre des réalités du monde, fictif ou réaliste. On attendra les prochains numéros, mais ce début est dans l'ensemble plaisant, et après quelques pages, fait l'effort d'un dessin particulier qui souligne la force des symboles portés par le décor et les personnages.
Falcon #1, un numéro qui fait un joli job. Sans être irréprochable, la série comprend les forces et faiblesses du héros qu'elle met en scène, son histoire et son propos forcément important après une année passée sous une certaine présidence (ou bien dans son pays d'origine et son passé, plus généralement). Barnes fait le boulot, Josha Cassara aux planches est au diapason, ne reste qu'un éditeur qui force pour imposer les gimmicks d'usage pour entacher le tableau.