Les semaines se suivent sans discontinuer (au contraire de cette chronique qui a bien du mal à tenir sa régularité) et les sorties comics en VO et en VF ne comptent pas encore s'arrêter d'ici les fêtes de fin d'année. Si vous êtes bloqué chez vous en ces temps de grèves (ça compte surtout pour la partie parisienne de notre lectorat), alors il faut vous occuper avec quelques bande-dessinées, n'est-ce pas ? Comme chaque semaine, les sorties sont nombreuses et la Checklist Comics essaie de faire le tri, entre les comics qui font d'eux-même l'actualité, et ce qu'on vous recommande par leur qualité !
Comme toujours, quelques sorties peuvent passer entre nos mailles acérées, mais ce n'est pas une raison pour les ignorer, bien au contraire. On vous invitera comme toujours à nous faire part de vos lectures du moment dans l'espace commentaire !
Quelques années après nous avoir livré DKIII : The Master Race (sur lequel Brian Azzarello s'occupait de l'écriture suivant les directives de l'intéressé), Frank Miller revient une fois de plus à son oeuvre la plus célèbre, avec ce one-shot en continuité directe du précédent volume. Le couple formé par Superman et Wonder Woman a eu un second enfant après Lara, le jeune Jonathan Kent, qui va devoir apprendre à composer avec une humanité toujours sur le déclin, entre les conseils du paternel et une grande soeur qui semble bien plus encline à mépriser l'espèce humaine. Un propos toujours très politique pour Miller qui tape allègrement sur Trump et mise sur l'écologie et le féminisme, preuve d'une volonté d'être toujours actuelle. Fort heureusement, Miller conscient de la difficulté de son trait aujourd'hui laisse le génial Rafael Grampa aux commandes du dessin, pour un résultat somptueux entre le ton général qui évoque Quitely et un sens de la composition on ne peut plus exquis.
En cette fin d'année, Marvel mise beaucoup sur une nouvelle exploration de son célèbre univers futuriste situé en 2099, et c'est le scénariste Nick Spencer que l'on retrouve forcément sur le numéro consacré à Miguel O'Hara. Au programme, un retour sur les origines du personnage et une potentielle exploration du mythe, tout en préparant les grands axes de cette forme d'event particulier, avant que Marvel n'aille sur d'autres plate-bandes évènementielles avec Incoming. Avec un Jose Carlos Silva plutôt en forme, on reste confiant sur ce one-shot, permettant aussi aux nouveaux lecteurs de découvrir ce personnage, charismatique s'il en est.
Nouvelle série Image Comics en tant que potentiel blockbuster de l'indé', le titre de Scott Snyder doit confirmer l'essai cette semaine. Le récit nous emmène dans un futur proche (d'ici une trentaine d'années), où les Etats-Unis rouvrent leurs portes après s'être coupés du monde entier, l'occasion pour une équipée d'aller découvrir tout ce qu'il s'est passé en ce laps de temps. Si l'on ne tient pas trop compte de la propension verbale de Snyder, Undiscovered Country séduit par son idée, et aussi par les très belles planches de Camuncoli, qui donnent clairement envie d'y retourner. On attend donc désormais que le titre rassure dans sa qualité, pour en faire une série Image Comics à suivre en cette fin d'année.
Après avoir fait vieillir son fils, apporté une trêve entre les maisons El et Zod et amené la Legion of Super-Heroes, une nouvelle grosse étape se fait dans les pages de Superman pour Brian M. Bendis, jamais à cours d'idées pour dynamiter sa série. On nous l'avait annoncé publiquement, et la décision était prise par Kal-El dans le dernier numéro, notamment à cause des retombées d'Event Leviathan : il est temps que Superman dévoile son identité au reste du monde, et cela ne sera pas sans conséquences. On s'attend bien sûr à ce que la révélation et ce qui suivra soit réfléchi, tant aux implications sur l'activité journalistique de Clark Kent que sur les retombées politiques d'avoir un Superman enregistré comme citoyen américain, et ce numéro devrait nous permettre de nous faire une première idée de cette direction engagée. Le résultat promet en tout les cas d'être beau avec Ivan Reis, toujours fidèle sur la partie artistique.
Du côté de Boom! Studios, la production se montre vraiment intéressante ces derniers mois. A côté de Once and Future de Kieron Gillen ou Faithless de Brian Azzarello se trouve ce Something is Killing the Children, nouveau récit d'horreur de James Tynion IV, qui est déjà arrivé à son avant-dernier numéro. Le titre est assez explicite : dans une ville des Etats-Unis, quelque chose fait disparaître les enfants, et la jeune Jessica Slaughter (un nom pareil, ça ne s'improvise pas), au regard inquiétant, est là pour arrêter le responsable. Mais là, le FBI est aussi arrivé en ville, et leurs intentions ne semblent pas aller au mieux pour la jeune fille. Une histoire prenante, un trait atypique mais séduisant, le cocktail est réussi pour cette jolie trouvaille indé' - qui, on vous le dit ici mais c'est un secret, arrivera par chez nous en VF en 2020.
Les one-shots Year of the Villain de DC Comics ont su se montrer parfois divertissants, mais l'on reste conscient que l'ensemble ne va pas rester dans les mémoires, l'éditeur à deux lettres se contentant d'accompagner son initiative éditoriale avec ces quelques à côtés. Alors pourquoi se tourner vers ce numéro Harley Quinn qui plus est ? Tout simplement pour son concept et son auteur. Le concept, c'est une soirée d'élection on ne peut plus méta pour élire le super-vilain de l'année chez DC Comics. En outre, les lecteurs ont pu soumettre leur vote sur internet, le résultat de l'histoire étant donc soumis au vote en question. L'auteur, c'est le génial Mark Russell qu'on ne vous présente plus, qui nous a d'ailleurs expliqué qu'il avait écrit une page de script pour chaque nommé (et que Mike Norton a dû dessiner), afin de prévoir en amont qui serait le gagnant en tous les cas. Une façon de faire qui attire d'autant plus la curiosité sur un numéro qui devrait miser une fois de plus sur l'humour corrosif de son auteur.
Retour à l'horreur et à Boom Studios! qui nous propose un nouveau titre par un spécialiste du genre, Jeremy Haun (Wolf Moon, The Beauty), qui se joint à l'artiste Danny Luckert (Regression). Une femme perd un oeil et son mari des suites d'une agression. Sur le chemin du retour à une vie normale, elle se fait greffer un oeil prosthétique, et commence à voir des choses de plus en plus terrifiantes, alors que la "Red Mother", entité mystérieuse, peut voir à travers elle. Un discours sur l'évolution intérieure de chacun et des inspirations cinématographiques modernes sont au coeur de ce récit qui s'inscrit dans la droite lignée des récents titres adultes de Boom! Studios dont on vous parlait plus tôt dans cette chronique. Un premier numéro qui nous attire donc évidemment pour voir si cela tient dans cette continuité qualitative.
Voilà une nouveauté Image Comics qui était passée en dehors de notre radar lors de son annonce, alors on se rattrape ici. Le co-créateur du très bon Rat Queens, John Upchurch, revient sur le devant de la scène comics indé' après quelques déboires personnels pour ce titre Lucy Claire, mélange de fantasy et d'horreur dans lequel l'héroïne, qui donne son nom à la série, s'est vue diffamée et retirée de la garde de ses enfants après pourtant des années de bons et loyaux services. Quand un danger venu de son passé refait surface, Lucy Claire décide de laver son honneur et de faire tout ce qu'elle peut pour sauver ses enfants. Une histoire semble-t-il inspirée d'évènements personnels, et l'on vous encourage à jeter un oeil aux pages de preview, parce que le tout à l'air magnifique, Upchurch ayant l'air de se donner à fond sur le dessin. Pour le plaisir des yeux, à tester !
Tout le monde connaît les débuts de Batman dans les pages des comicbooks Detective Comics puis dans le propre titre Batman de National Comics. Mais, galvanisé par le succès du héros, Bob Kane avait en mire une publication plus prestigieuse de l'époque, celle des comics strips, ces bandes courtes publiées de façon quotidienne dans les grands journaux nationaux. Une reconnaissance bien plus importante que les magazines bon marché qu'étaient les comics de l'époque, et ces séries de strips se retrouvent aujourd'hui compilées en VF dans cet album. De quoi découvrir un aspect méconnu de l'histoire de Batman, dans un ouvrage au format spécialement pensé pour accueillir ces strips - comme toujours, Urban Comics sait soigner ses éditions. Un indispensable pour les amateurs du Chevalier Noir et de bande dessinée patrimoniale !
Du côté de Panini Comics on ira vers les comics d'époque - mais un peu moins vieux puisque l'on retourne aux années '60 et à l'explosion du nouveau Marvel mené par Stan Lee, Jack Kirby et consorts. Ce sont bien ces deux là qui nous intéressent avec cette nouvelle édition de l'intégrale des Fantastic Four sur l'année 1966, une année Ô combien importante pour la première famille de Marvel, puisque c'est là que l'on retrouvera la première apparition de Galactus et du Surfer d'argent (un concept toujours aussi génial avec le recul que l'on a aujourd'hui), mais également de Black Panther. Une année donc historique, et s'il faudra hélas compter sur l'augmentation des prix de Panini sur ces nouvelles éditions, il s'agit de comics très certainement indispensables pour qui se passionne pour l'histoire de Marvel.
- Note : décalé au 8 janvier 2020
On vous a déjà fait un long podcast pour vous expliquer tout le bien qu'on pensait du chef d'oeuvre de Darwyn Cooke, The New Frontier, qui a connu une splendide réédition sur le territoire français dans la collection Black Label d'Urban Comics. Une façon pour l'artiste et l'auteur de réimaginer la période de transition du Golden Age vers le Silver Age avec l'apparition des nouveaux héros, de la formation de la Justice League of America, avec un discours politique toujours aussi actuel, et un ouvrage dense, aux multiples intrigues et niveaux de lecture, qui transpire de l'amour que Cooke avait pour DC Comics et ses icônes. Avec le trait caractéristiques de cet artiste disparu bien trop tôt, The New Frontier est définitivement à mettre sous tous les sapins cette année.