L'un des problèmes majeurs entourant le sujet de la diversité en comics et au cinéma, est que nous manquons généralement de données chiffrées pour estimer l'impact public de certaines initiatives. Le terrain du débat se transforme donc vite en un royaume où le "je pense que" triomphe systématiquement, chacun pouvant s'abriter derrière une batterie d'exemples très personnels, et invérifiables.
Cependant,
des études commencent à abonder, poussées par des mouvements comme
MeToo ou
Black Lives Matter aux Etats-Unis, qui s'intéressent de plus en plus à la portée sociétale de certains faits. Le cinéma n'échappe pas à la règle et le super-héros, principal poumon économique du marché hollywoodien, non plus.
La BBC America, probablement inspirée par l'arrivée récente du treizième docteur - en l'occurrence, de la treizième doctoresse - dans Dr Who, a conduit une étude en compagnie de l'institut Women's Media Center, un organisme fondé en 2005 par Jane Fonda, Robin Morgan et Gloria Steinem pour étudier la représentation des femmes dans la société moderne. Si vous êtes passionnés de comics (et de Wonder Woman plus précisément), le nom de Steinem vous dira peut-être quelque chose.
L'étude dans son entier agglomère toute une série de faits que vous pourrez retrouver ci-bas. En résumé, celle-ci interroge les jeunes générations - de cinq à dix-neuf ans - sur l'épineuse question de l'intérêt de héros et d'héroïnes plus divers au cinéma, avec l'axe qui nous intéresse : dans les productions de science-fiction et d'adaptations de super-héros. L'étude a été menée sur un échantillon représentatif de 2431 participants.
Il en ressort différentes données intéressantes : le fait que les jeunes filles se sentent majoritairement moins bien représentées que les jeunes garçons (à 65% en moyenne contre 35% en moyenne), ou que l'ensemble des personnes interrogées, garçons ou filles, se prononcent pour davantage d'héroïnes dans ces sphères de l'imaginaire (85% pour les filles de 10 à 19 ans, 69% pour les garçons de 10 à 19 ans, 88% pour les filles de 5 à 9 ans, 75% pour les garçons de cinq à neuf ans).
Au sujet des effets concrets des premiers pas de cette diversité, amorcée récemment avec Wonder Woman et Black Panther, d'autres chiffres sont là : l'héroïne préférée des filles de 5 à 19 ans reste Wonder Woman, tandis que les garçons quels que soient leur âge préfèrent Batman - devant Spider-Man et Superman, qui sont partis pleurer en PLS dans un coin. Cela étant, ces chiffres agglomèrent les garçons et filles caucasiens, mais également hispaniques, noirs et asiatiques.
Ainsi, si on regarde dans le détail, sur l'ensemble des enfants ou jeunes noirs interrogés, 28% déclarent tout de même que Black Panther reste leur héros préféré - ce qui n'est pas rien, surtout au vu de la jeunesse du héros dans les adaptations (premier film cette année) et le fait qu'il se confronte à Batman, un mec vachement plus stylé. Plus intéressant, si on approfondit cette part des 28%, on remarque qu'elle ne concerne que les enfants ou jeunes noirs des sondés : pour les autres ethnies et couleurs de peau (caucasiens, asiatiques, etc), Black Panther n'est cité que par 6% des jeunes.
Autrement dit, une représentation qui trouve un certain écho pour l'avenir, et validerait donc les effets positifs à long-terme des efforts faits récemment par Hollywood - derrière la fameuse "hypocrisie" et ses effets supposément périlleux.
L'ensemble des données sont accessibles en détail à cette adresse, il vous est bien entendu possible de les consulter.
