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La nuit où Disney a fait trembler la Terre en voulant racheter une partie de la Fox

La nuit où Disney a fait trembler la Terre en voulant racheter une partie de la Fox

chronique

Lundi soir, les internets ont une nouvelle fois pris feu alors qu'un rapport très sérieux du site CNBC, qui traite de l'actualité globale de la finance, annonçait que des discussions avaient lieu entre Disney et la Fox depuis plusieurs semaines. Mais dans quel but ? Si vous avez lu le titre de cet article (bien joué), vous savez donc que la société de Bob Iger avait en tête de rafler la mise sur une majeure partie de la société de production historique de cinéma et ainsi étendre son empire.

Les voix se sont donc élevées rapidement, criant au génie d'un côté et au scandale de l'autre. Maintenant que la tempête est passée et que les discussions entre les deux parties ont visiblement pris fin (pour le moment), il est temps pour nous de faire un peu le point sur cette actualité de Disney qui, après ses rachats successifs de Marvel et Star Wars, aurait pu une nouvelle fois casser l'équilibre (déjà peu stable) de la Force.

Unlimited Power !



La première chose à noter sur cette éventuelle transaction, c'est qu'elle aurait donné Disney gagnante à de nombreux niveaux. Si nous traiterons du cas bien particulier de Marvel Studios un peu plus loin, la manœuvre n'a évidemment pas été lancée dans l'unique objectif de récupérer certaines des licences super-héroïques détenues par la Fox. Il faut en fait voir le problème à l'envers puisque cette dernière était tout aussi intéressée à l'idée de se faire racheter pour ainsi atteindre une portée monstre grâce à la puissance de la société de Mickey.

En effet, la société voit ses limites et aujourd'hui, les modes de consommation de contenus ont beaucoup évolué ces dix dernières années avec l'explosion de Facebook, des réseaux sociaux en général donc, et grâce à l'installation confortable de Netflix à travers le monde. Un concurrent indirect que les studios espèrent pouvoir supprimer de l'équation bientôt avec le lancement de plateformes de streaming dédiées des plus grands studios comme Warner et bien évidemment Disney.

C'est dans cette optique, et pour choper la licence Avatar (on parle du film qui a fait 2,2 milliards à lui seul), que la société a ouvert les valves d'un rachat puisque la Fox est bien plus qu'un studio de cinéma et jouit d'une énorme présence sur les écrans, en plus de ses chaînes d'information et de sport - pas concernées par le deal d'aileurs. À l'aube de l'ouverture de sa plateforme de streaming, Bob Iger a dans l'idée de gagner du temps de développement pour profiter de l'expertise de la Fox, déjà installée dans de nombreux pays, dont l'Allemagne et l'Italie, pour créer des contenus à proposer sur sa plateforme qui viserait le public d'un pays en particulier. Il faut voir ici le parallèle, avec un succès relatif, chez Netflix avec Marseille. Mais Disney s'essaie aussi à l'exercice avec le film The Last Warrior, production cinématographique uniquement destinée à un public russe.

Mais revenons à Marvel Studios car dans son coin, Kevin Feige se frottait déjà les mains puisqu'il voyait ainsi l'opportunité parfaite pour compléter sa propre carte de l'univers Marvel et récupérer les rares licences qui échappent encore au monopole du studio, qui a rapporté 5 milliards d'euros rien que sur le sol américain depuis 2008. Le deal sur Spider-Man avec Sony étant bien verrouillé, notamment grâce au succès de Homecoming, le visionnaire à la casquette aurait donc pu récupérer les énormes jouets que sont l'univers mutant (qui compte évidemment les X-Men mais aussi Deadpool) ainsi qu'une autre licence phare qui a pourtant échoué dans les salles pour des raisons de production, Fantastic Four



On sait le studio prêt à de nombreux sacrifices pour récupérer un nouveau roster quasi-infini de personnages puisque c'est dans cette optique que Marvel a décidé, ces dernières années, de mettre en retrait les deux licences dans ses publications papiers, au grand damn de tous les amoureux des héros pourtant centraux dans l'évolution de la Maison des Idées.

Et finalement, Kevin Feige n'aura jamais été aussi prêt de son but. Pourtant toujours très bavard pour le futur de Marvel Studios, en n'ayant pas peur de prévoir des films sur les cinq années à venir, le Big Boss du studio n'a pourtant jamais été aussi discret quant à la suite des aventures de ses héros sur le grand écran. Clairement, on peut y voir un changement de stratégie, pour éviter de jouer sur la lassitude des spectateurs, qui finiront par détourner leur attention du studio à force de présenter des listes de projets.

Pourtant, le studio n'est pas dans sa position la plus confortable à l'aube de son dixième anniversaire puisqu'on le sait maintenant, Avengers 4 sera la fin d'une époque et devrait signer la fin de contrats de nombreux acteurs phares de la licence. Si les têtes en question n'ont pas été explicitement nommées, il n'est pas trop difficile de tabler sur Chris Evans, qui a déjà annoncé son départ à plusieurs reprises par le passé, et sur Robert Downey Jr. qui ne vit plus que dans l'ombre de Tony Stark et qui a exprimé des envies de nouvelles expériences artistiques.

Pour le moment, nous savons que la phase 4 sera "différente", seule indice lâché par un Kevin Feige d'habitude si bavard, qui démontre surtout que le studio cherche encore une direction à prendre dans les prochaines années. D'autant plus que des chuchottements circulent doucement dans les couloirs de l'industrie annonçant que le bonhomme quittera ses fonctions en 2019, après la sortie de Captain Marvel, dernier projet officiellement en développement pour Marvel Studios. Récupérer les jouets de la Fox aurait donc été une manière simple de redorer les attentes autour du studio tout en offrant littéralement les moyens au MCU de passer à un niveau supérieur.

Big Bob is Watching You


Pour autant, faut-il se rassurer que le deal n'ait pas été jusqu'au bout ? Probablement. Nous parlons depuis le début de cet article d'un événement qui aurait pu être cataclysmique dans l'industrie du divertissement, pouvant même rapidement dépasser le simple cadre du comic-book pour avoir une portée politique plus globale. Vous le savez probablement, mais la valeure principale d'une œuvre d'art, peu importe la forme qu'elle prend, est d'être une extension de la liberté d'expression de la tête pensante derrière. 

Une œuvre d'art permet donc de refleter des idées, quelles soient finalement bonnes ou fumeuses, d'un artiste qui cherche avant tout à toucher un public, d'horizons lui aussi différents et le faire réfléchir à une problématique donnée. Malheureusement, nous vivons dans un monde qui s'est complexifié avecune mondialisation innarrêtable, donnant la rentabilité gagnante face aux courants de pensées dans l'évolution de notre civilisation. L'art est devenu une industrie et une entreprise comme Disney, qui affirme pourtant vouloir laisser ses créateurs s'exprimer, ne le fait finalement que dans un spectre très limité. On a d'ailleurs pu voir les effets de ses ingérences partielles dans la direction de Lucasfilm et la gestion catastrophique de ses réalisateurs mais aussi, dans une certaine mesure, à travers les nombreuses productions du Marvel Cinematic Universe, qui gardent finalement un squelette toujours très commun.


Dans une société comptemporaine dans laquelle le profit est donc maître, et il ne s'agit pas ici de démagogie puisque nous sommes tous des acteurs d'un tel système, voir un groupe gigantesque comme Disney faire main basse (ou presque) sur l'industrie du divertissement n'est clairement pas une bonne nouvelle. Sans vouloir aller jusqu'au conspirationnisme, il est clair qu'une grosse boîte comme celle de Mickey réfléchit ses projets en terme de risque et travaillera évidemment pour les minimiser au maximum. 

C'est ainsi que l'on voit des produits finaux calibrés pour le "grand public", cette expression batarde qui désigne finalement une vision de l'art assez consensuelle pour plaire au plus grand nombre. Si le format permet tout de même de véhiculer des idées, il faut avouer que la portée sera moins forte. Exit donc les visions tranchés et exit les prises de risque majeures, pour un résultat qui ne peut que nuire à la diversité des œuvres et aux messages poussant à une plus grande réflexion d'un public, qui pourrait finalement remettre en cause ses modes de consommation. Si cette vision peut paraître caricaturale dans l'approche, vous comprendrez le message, surtout si on prend en compte que Bob Iger a déjà annoncé ses intentions de vouloir se lancer dans la politique. Une vision assez effrayante qui donnerait finalement une œuvre de science-fiction passionnante, comme vous le soufflait mon cher Republ33k dans le dernier Popcast.

AlexLeCoq
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