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Un Regard sur les Indés #12 : I'm Not A Plastic Bag, de Rachel Hope Allison

Un Regard sur les Indés #12 : I'm Not A Plastic Bag, de Rachel Hope Allison

chronique

Quiconque se balade quelque temps dans les travées d'une boutique de comics ne tardera pas à voir de nombreux bouquins sponsorisés par différentes entreprises, des BD que les éditeurs ont financé grâce au "soutien" d'une boîte qui peut n'avoir aucun rapport avec les comics. Le graphic novel que l'on vous présente aujourd'hui est dans ce cas, mais est bien plus vertueux qu'un comics Marvel fait en partenariat avec Subway ou M&M's. Il cherche même à combattre la logique consumériste de ce genre d'entreprises.

 

• I'm not a plastic bag •

 

FICHE TECHNIQUE

Éditeur : Archaia Entertainment
Premier numéro : Avril 2012
Nombre de numéros parus : 1
Genre : Fable écologique

Retour en arrière, en 2012 exactement, Archaia Entertainment est encore un éditeur à part entière (il est depuis devenu un label de BOOM! Studios) qui place en premier lieu son éthique de travail. L'histoire nous apprendra que la morale n'est définitivement pas récompensée puisqu'ils seront à deux pages imprimées de mettre la clé sous la porte. Pour l'instant, ils continuent de promouvoir une certaine idée de ce que doit être un éditeur indépendant, et surtout ils se font les chevaliers de certains combats qui ne sont pas vraiment la préoccupation des autres maisons d'éditions américaines. Comme lorsqu'ils vont décider de publier ce graphic novel, I'm Not A Plastic Bag. Leur situation financière étant ce qu'elle est (seule Mouse Guard de David Petersen leur rapporte quelques deniers, ils sont même à perte sur la version américaine du Siegried d'Alex Alice), ils ne peuvent se permettre de le lancer sans aide.

C'est là que rentre en scène Jeff Corwin Connect, qui va agir comme sponsor. On est loin de McDo ou Coca-Cola cependant, puisqu'il s'agit ici d'une association qui fait état des espèces qui sont en danger tout autour de la planète et qui surveille les différentes menaces (le plus souvent humaines) qui dévisagent la Nature. Ils vont même s'engager à replanter deux arbres pour chaque arbre utilisé dans l'impression de ce comics. Un partenariat vertueux qui va permettre à Rachel Hope Allison de sortir son histoire à une échelle relativement importante. Cette dernière est une illustratrice qui a décidé d'user de son talent pour le dessin, elle est diplômée en bande dessinée de la School of Visual Arts de New York, au profit de différents organismes écologistes, qui font généralement la promotion d'énergies non-polluantes. Elle va se rappeler à ses premiers amours pour la BD et concevoir ce graphic novel qui est évidemment porteur d'un message évident.

L'idée de I'm A Plastic Bag nait quand Rachel Hope Allison va se rendre dans le Pacifique Nord pour voir par elle-même le vortex de déchet, ou Great Pacific Garbage Patch. Ce phénomène découvert au début des années 2000 est provoqué par les courants marins qui convergent et drainent petit à petit les déchets qui sont jetés dans les océans en un seul point (on a depuis découvert qu'un vortex similaire existait dans l'Atlantique), au point d'en faire un amoncellement titanesque d'ordures en plastiques et autres matières. On parle tout de même d'un tas d'ordures qui s'étendrait sur une surface qui fait de trois à six fois la superficie de la France. Une horreur totale qui contamine tout ce qui a autour et qui est une vraie plaie pour la faune locale qui se prend dans ces déchets pour en mourir.

Ce désastre écologique va donc pousser Allison à reprendre les crayons pour faire un comics. Son premier qui ne sera pas publié à compte d'auteur. Devant l'horreur, elle décide de faire une histoire quasiment muette, où l'on suit le chemin d'un sac en plastique, depuis la rue de la ville où il a été jeté jusqu'à ce vortex qui empoisonne le Pacifique. Un voyage silencieux, presque poétique, où l'on se laisse porter par le trait tout en douceur de l'auteure, pour arriver à ce monstre de déchet. Littéralement un monstre, puisqu'elle va décider d'anthropomorphiser le vortex, qui traine alors son spleen seul au milieu de l'océan. Dépressif, il ne rencontre jamais personne, jusqu'à ce qu'il croise une mouette qui deviendra alors pour lui une source de joie, sa visite quotidienne. Un jour, la mouette ne revient plus et le vortex continue de grossir encore et encore en retournant aux démons de la solitude. Il ne s'est pas rendu compte que la mouette est morte étouffée par le fameux sac en plastique que nous avions suivi depuis la ville. Une conclusion bien triste, et qui devient encore plus grinçante quand le vortex explose de joie en voyant carrément une colonie de mouettes arriver à la fin.

C'est une histoire très courte, très simple. Une fable qui se déploie tout en douceur pour délivrer un message d'autant plus dur et amer. Rachel Hope Allison ne se fend pas d'une morale ou d'un sermon, son histoire suffit à comprendre à quel point ce que l'Homme a créé, ce fameux anthropocène que certains politiques et scientifiques osent encore nier, est un danger terrible pour l'avenir de la planète. D'autant plus quand on sait qu'il faut des milliers d'années au plastique pour disparaitre. Si l'histoire fonctionne par elle-même, dure et belle, le graphic novel contient tout de même quelques textes d'explications. Ils font certes froid dans le dos, mais présentent aussi quelques infos sur ce vortex. Notamment le fait que ce que l'on retrouve en plus grande quantité dans cette île pas du tout naturelle, ce sont les mégots de cigarette qui ne sont pas du tout biodégradables. Amis fumeurs, prendre deux secondes pour jeter son mégot dans une poubelle plutôt que par terre ne semble pas grand chose, mais finalement cela pourrait déjà faire une différence.

Alfro
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