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Édito #55 : secousses dans l'empire Marvel Studios

Édito #55 : secousses dans l'empire Marvel Studios

chronique

La semaine dernière, les choses ont pas mal bougé du côté de Marvel Studios. Filiale de l'empire Disney depuis 2009, l'entreprise, aux ordres de Kevin Feige, a réussi à imposer son modèle à tout le cinéma de divertissement. Mais derrière cette réussite à plusieurs milliards de dollars se cache une structure et une hiérarchie complexe, qui viennent d'être repensées en prévision d'une phase 3 qui s'annonce comme un tournant non seulement pour le studio, mais aussi pour tout le genre super-héroïque.

D'une guerre civile à l'autre

Assez ironiquement, c'est le film Captain America : Civil War qui aura tout chamboulé pour Marvel Studios. S'il faudra attendre quelques mois voire quelques années avant de constater la pertinence de ces changements, on peut déjà retracer les différentes étapes de cette affaire, et les différentes interprétations qui lui sont liées. En l'occurrence, on retrouve deux "camps"  lorsque l'on essaie d'expliquer l'absorption de Marvel Studios par Disney.

Entendons-nous bien : depuis 2009, les maisons font partie d'un même empire. Mais son ampleur implique quelques marges de manœuvre, et à l'inverse, des dysfonctionnements. C'est pourquoi certains se réjouissent de la disparition du comité créatif, sorte de conseil d'état pour Marvel Studios, et de l'intégration de Kevin Feige, patron de Marvel Studios, dans la hiérarchie Disney. Tandis que d'autres prévoient déjà un interventionnisme certain de la part de la maison mère, et moins de libertés pour les films de l'un de ses studios, qui évolue maintenant aux côtés de Pixar et Lucasfilm.

D'un côté, on retrouvera ainsi le camp The Hollywood Reporter, source fiable et historique. On peut la considérer comme une "pro-Feige" dans le sens où elle a toujours présenté le producteur, même dans ces heures les plus sombres, comme un bon meneur d'hommes et un excellent chef de projet. De l'autre, commencent à se dessiner des partisans du comité créatif récemment dissout, qui contient certes Ike Perlmutter(patron de Marvel Entertainment, âgé de 72 ans) et son bras droit Alan Fine (son bras droit) mais aussi des scénaristes reconnus comme Brian Michael Bendis et Joe Quesada. Ils ont trouvé chez Bleeding Cool la voix de la raison, puisqu'elle appelle à la prudence et à la méfiance quant à l'intégration totale de Marvel Studios dans le giron de Disney. Et plus encore, puisque le site tente de lever le voile sur la personnalité deKevin Feige, qui aurait à de multiples reprises ignoré les conseils du comité créatif.

Qu'est ce que ce comité créatif et sur quoi agit-il ?

Tout d'abord, il nous faut rappeler que le comité créatif en question s'occupe de la marque Marvel, en général. Il n'est donc pas à proprement parler le comité créatif de Marvel Studios, même si, à l'heure où la marque s'exprime avant tout au cinéma, il devait avant tout traiter de ces métrages, laissant l'édition de comics ou le merchandising derrière. Il agit depuis de longues années déjà, et symbolise, quelque part, l'originalité du modèle Marvel Studios par rapport aux autres filiales de Disney, comme Pixar et Lucasfilm, qui suivent le même fonctionnement.

Pour beaucoup, cette instance suprême est donc responsable du succès de Marvel à l'international depuis quelques temps déjà. Et l'aide de ce conseil aurait ainsi été précieuse à des hommes comme Jeph Loeb (responsable des productions télévisées de Marvel) ou Axel Alonso, qui auraient toujours reçu les louanges de Ike Perlmutter et de ses troupes. Pour Bleeding Cool, le conseil est même directement responsable du succès des meilleurs films Marvel Studios.

Team Ike

Le site a en effet expliqué que les métrages les plus influencés par le comité furent Iron Man, Avengers, Guardians of the Galaxy, Captain America The First Avenger, The Winter Soldier et Civil War. Des films qui sont loin d'être les pires du studio, quand il ne font pas partie de ses plus grandes réussites, économiques (Avengers) comme critiques (Guardians of the Galaxy). De leur côté, Iron Man 2, 3, et Avengers : Age of Ultron n'auraient pas été influencés par le comité, tandis que Hulk, Ant-Man et les deux Thor seraient quelque part au milieu de tout ça.

Une liste bien pratique pour ce "camp", qui s'approprie des films qui sont globalement les plus appréciés du public, de la critique et des statistiques box-office. Il n'en faut pas plus pour incriminer Kevin Feige, Bleeding Cool rapportant, via des sources tenues anonymes, l'aspect loup solitaire du patron de Marvel Studios, qui aurait ignoré les conseils du comité lors de ses projets les plus récents, allant jusqu'à refuser l'aide qu'on lui proposait, là où d'ordinaire, il n'hésitait pas à la prendre. La discrète participation de Brian Bendis, Matt Fraction ou encore Mark Millar sur quelques scènes des meilleurs Marvel Studios, dont Iron Man, étant un fait avéré.

Team Kevin

Comme nous le disions, la liste évoquée par les sources de Bleeding Cool et les arguments qui en découlent sont bien convenus. Il est ainsi presque trop facile pour défendre Ike Perlmutter, sous couvert d'une certaine indépendance pour Marvel Studios. Effectivement, l'arrivée de Feige sous les ordres d'Alan Horn, chef de la branche cinéma de Disney, réduit les intermédiaires et donc les contre-pouvoirs. Mais c'est peut-être aussi un moyen d'agir plus efficacement, en termes de management comme de libertés artistiques. On a du mal à croire, par exemple, qu'un producteur solide comme Feige ait un jour dû rendre des comptes à un monsieur de 72 ans n'ayant jamais mis les pieds dans le milieu du cinéma, et qui utilisait l'échec d'Elektra et de Catwoman comme des arguments à l'encontre des films de super-héroïnes.

The Hollywood Reporter a ses propres sources, et fait état de multiples altercations entre Feige et le comité créatif, qui voulait par exemple revoir l'échelle et le casting de Captain America : Civil War. Ike Perlmutter, rapporte le journal, étant extrêmement dur en affaires, et on lui devrait même les contrats et les stratégies très agressifs du studio, qui aurait effectivement pu venir d'un homme influent mais peu versé dans la production hollywoodienne. Au contraire, Feige affiche une carrière plus que solide, et malgré quelques couacs, a toujours défendu une certaine vision, qu'on appelle aujourd'hui le Marvel Cinematic Universe.

Autre argument en faveur du "camp Feige" : l'arrivée prochaine de Doctor Strange, qui semble bizarrement différer en tous points des habituelles stratégies Marvel Studios. Peut-être parce que Kevin Feige est soucieux de renouveler son offre, sans doute parce que la nouvelle organisation de son entreprise lui permet une stratégie plus "cinématographique" avec une belle paires de couilles de guillemets. Mais la réorganisation de Marvel Studios étant silencieusement opérationnelle depuis quelques semaines déjà, Doctor Strange pourrait bien être le nouvel avatar du studio. 

Il nous est impossible de conclure aujourd'hui sur cette complexe question. Le cas Pixar pourrait servir d'éprouvette, mais l'animation est un autre business. L'intégration de Lucasfilm doit encore faire ses preuves, et la gestion des projets typiquement Disney comme les remakes en live-action des classiques de la maison est trop intégrée pour être comparée à la stratégie Marvel Studios. De toute évidence, la phase trois sera donc un champ de bataille de l'ombre pour l'entreprise, qui donnera raison à l'un ou l'autre des camps d'ici 2019. En attendant, comme dans tous les conflits, il y a des partisans, et pas uniquement les journalistes : Bleeding Cool et The Hollywood Reporter peuvent très bien avoir des sources travaillant chez Disney favorables à l'un comme à l'autre des managements mentionnés ici. Il faudrait avant tout s'inquiéter de la gloutonnerie de Disney, qui possède trois des noms les plus bankables de l'histoire de l'entertainment. Mais les succès, cette année, de Jurassic World ou de Furious 7 prouve que même à grande échelle, la concurrence reste possible.

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