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Black Hole, la review

Black Hole, la review

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Notre note

Black Hole est l’un de ces comics qui a su passer la ligne blanche, celle qui sépare ceux qui connaissent de ceux qui ne s’intéressent même pas. Black Hole n’est pas juste un comic book, c’est une “oeuvre”, c’est une chose à avoir lue, même par ceux qui jusqu’ici n’osaient pas errer outre atlantique lorsqu’il s’agissait de lire quoi que ce soit de dessiné. Oui, Black Hole a séduit toutes les classes aux prétentions intellectuelles, comme seule la bonne vieille bande dessinée avait su le faire auparavant.

Charles Burns, son auteur, s’est assuré aussi qu’au delà de son talent de scénariste ou de dessinateur, son aura d’artiste suffirait à attirer les foules. Imaginez plutôt : 10 ans pour livrer 12 tomes de taille tout à fait modeste, nous ne sommes pas sur de la surproduction. Et les gens qui prennent leur temps, ça fait un peu artiste torturé, ce qui est la classe.

Keith, un des principaux héros de ce Black Hole

C’est arrivé près de chez vous.

Ce qui fait aussi l’intérêt de Black Hole, c’est son scénario. Burns y parle d’une maladie sexuellement transmissible qui métamorphose ceux qui la contractent : une queue de lézard, un visage couvert de pustules, un nez qui pourri et tombe, une seconde bouche tout à fait fonctionnelle qui vous pousse sur la gorge... Tout est possible, et tout est assez terrifiant.

La maladie touche souvent des jeunes, lycéens pour la plus part. Dans leur petit communauté fermé, les choses se remarquent vite, et se refilent tout aussi vite. On n’est pas sérieux quand on à 17 ans : on a juste très très envie de ne plus être vierge. En gros. Mais c’est l’un des postulats de l’univers de Black Hole, et c’est ce qui va permettre au lecteur de suivre et de s’intéresser à ses personnages, humains, malgré les apparences.

On se prend alors à s’intéresser à ce qu’il adviendra de Keith, l’ado moyen un peu looser, fumant dans les bois avec ses potes, obssédés par une des nanas populaires du lycée. On se tracasse de l’aventure entre Chris (cette fameuse fille), et Rob, le tombeur du coin. On s’apitoie sur le sort de ceux qui, atteints par la maladie et horriblement transformés, se sont régugiés au coeur de la forêt voisine à leur ville, au campement qu’ils appellent “the pit”, le puits, la fosse.

Forcément, vous ne voyez pas sa queue de lézard

Le poids des mots, le choc des images.

Mais un bon comics repose aussi sur un bon dessin. Hommage aux films d’horreur des années 70 (La Dernière Maison Sur La Gauche, Carrie...), Black Hole remplit tout à fait ce critère. Le trait noir épais confère à cette oeuvre toute la lourdeur que son thème suggère. Ce n’est pas la simple transposition d’un bête teen movie en comics : c’est l’approche de sujets durs, mis en page d’une façon qui ne l’est pas moins.

Chaque transformation causée par la maladie apporte son lot de dérangements pour le lecteur, chaque situation difficile vécue par les protagoniste est vivide, dans ce noir et blanc très dur. Et puisqu’il traite d’une MST, Burns parle un peu de sexe, avec les codes de l’époque qui le concerne : il montre donc, mais sans chercher à tapiner. Sauf si votre truc, c’est le look 70s et la menace planante de ressembler à un zombie, juste pour quelques minutes d’une relative extase adolescente.

Black Hole : Les portraits des malheurs.

Témoin mais pas juge.

Vous n’êtes sûrement pas passé à coté de l’allégorie. Cette fameuse MST qui transforme les gens en parias pourrait être une version plus “graphique” du Sida. Le travail de Burns a d’ailleurs peut-être perdu une partie de sa force au passage des années 2000 : ce qui était vrai dans les années 90 ne l’est plus forcément maintenant. Mais là encore, la force de Black Hole se fait remarquer. Il vous sera difficile d’y rester insensible, et de ne pas ressentir de gène à la lecture de ces tomes.

L’histoire a bien sûr une certaine morale, mais n’est jamais moralisante. Il s’agit plutôt d’un regard posé sur les tensions et les craintes de l’adolescence, avec ses métamorphoses poussées ici au grotesque et aidées par cette maladie, ce passage à l’age adulte si difficile et cette peur constante d’être marginalisé. Et comme ce n’est qu’un regard, pas une façon de vous mettre la tête dedans à grands coups de babouche, tous ces thèmes sont assimilés sans accroc, sans efforts et surtout sans culpabilités. Après tout, ça aurait tout à fait pu être vous, cet ado forcé de rejoindre “the pit”.

Connaitre le Sida rend cette scène beaucoup plus stressante

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